Régulièrement les médias partagent les faits divers concernant les agressions de SOS médecins. Fin août, deux confrères ont été molestés par des personnes, cela alors que ces collègues venaient au secours de patients. De ces deux agressions, celle qui a été moins développée par les médias métropolitains, et pourtant la plus violente est celle survenue à Saint Denis de la Réunion. C’est également celle qui a conduit à une condamnation bien moindre qu’à Mulhouse (où un autre confrère a été blessé). Nous avons l’impression (je me trompe peut-être) que la justice condamne de manière plus importante les agressions médiatisées.
Au-delà de ces faits concernant des médecins exerçant leur travail pour secourir les patients, nous ne devons pas oublier que certains actes répréhensibles ont conduit certaines antennes de SOS médecins à refuser toute intervention dans certains secteurs urbains jugés trop difficiles ou dangereux. Ces faits sont relatés en séances au sein de certains conseils de l’ordre qui soutiennent le plus souvent ces collègues, faits qui sont le plus souvent peu relayés par la presse générale ou professionnelle.
Le rôle essentiel des médecins de SOS
Or il faut savoir que travailler de nuit en tant que médecin généraliste devient une opération très risquée et qu’elle n’est pas souvent considérée à sa juste valeur. Accepter d’appartenir à la grande famille de SOS médecins est une épreuve que certains médecins acceptent par goût et passion. Outre leur fonction de soutien auprès des médecins libéraux urbains qui ont des difficultés à gérer leur quotidien, ils aident aussi les régulateurs du 15 à prendre en charge des situations parfois complexes. Leur participation à la permanence des soins évite de majorer un engorgement déjà existant au sein des unités d’urgence. De plus, ils permettent de pallier à l’insuffisance de volontaires pour assurer les gardes de nuit et de week-end.
On met en avant dans certaines occasions, malheureusement trop rares, leur utilité. Néanmoins nombreux sont les patients et médecins libéraux ou non qui reconnaissent l’action de ces confrères. Cependant au fil du temps nous remarquons que leur travail devient plus difficile pour deux raisons : pénurie de praticiens, responsable d’un plus grand nombre d’appels, mais aussi changements de mentalité au sein de la population française.
Ainsi les différents fonctionnaires ou agents assurant la sécurité et l’aide aux victimes sont très régulièrement pris à partie, cela alors qu’ils viennent au secours des patients. Certains journalistes parlent d’une minorité de personnes à l’origine de ce manque de respect, et nombreux sont ceux qui minimisent ces faits pourtant inconcevables au sein d’un pays démocratique. On (médias et certains partis politiques) en arrive même à banaliser ou à avoir une attitude compassionnelle vis-à-vis de ces cités. L’exécutif est responsable du développement de ces zones de non droit, car l’intégration de ces populations n’est pas une priorité pour ces politiques.
Nous voyons trop souvent des confrontations peu admissibles, ou des agressions pas très compréhensibles. Le plus difficile est de noter que la médiatisation de certains faits (cas du praticien de Mulhouse blessé) permet d’interroger les politiques et les habitants des cités difficiles. Ces personnes montrent leur désapprobation ou mettent en avant leur détermination pour que de tels faits ne puissent pas se reproduire, mais au final aucune mesure concrète n’est prise en compte, et la vie continue de la même manière. On accepte avec un fatalisme trop trivial cette situation pourtant anormale.
Zones de non droit
Dans ce contexte il est nécessaire pour l’exécutif de rapidement reprendre la main, et d’arrêter de parler de zones de non droit. Comment est-il possible, dans un pays démocratique comme le nôtre, que puissent exister des lois féodales appliquées dans certaines banlieues ? Ce qui est choquant est de voir que régulièrement des journalistes parlent de victoires sur ces zones de non droit et de retour de la démocratie.
Au-delà de cette situation ubuesque, nous devons penser aux citoyens qui ont de faibles ressources, et sont contraints de cohabiter avec une pègre qui limite leur champ d’action. Ainsi, certaines personnes ne peuvent plus faire leurs courses sans être menacées, ou tremblent à l’idée que leur voiture (ce n’est pas le plus souvent une première main) soit incendiée par des dealers mécontents ou souhaitant fêter le 1er janvier.
Cette frange fragile de la population est en droit d’accéder aux mêmes attentions que celle qui vit dans des quartiers plus résidentiels. C’est la raison qui conduit SOS médecins à poursuivre inlassablement son action contre vents et marées. De ce fait en tant que confrère, mais aussi citoyens français, je tiens à leur rendre hommage appuyé. Ils prennent journellement des risques, et ils le font en connaissance de cause. Merci encore à eux, et à leur bravoure.
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