Dans un nouveau rapport rendu public aujourd’hui à Londres, Médecins du monde (MdM) dénonce le fossé entre l’affirmation d’un droit à un accès universel à des soins de qualité et la réalité de ce droit dans beaucoup de pays en Europe. Intitulé « L’accès aux soins des personnes confrontées à de multiples facteurs de vulnérabilité. Obstacles à l’accès aux soins des enfants et des femmes enceintes en Europe », le rapport s’appuie sur les données collectées en 2014 lors des 41 238 consultations médicales et sociales, réalisées auprès de 23 040 personnes (dont 78 % d’immigrés non européens) en Allemagne, Belgique, Espagne, France, Grèce, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse et Turquie. Les résultats confirment l’impact persistant de la crise économique, notamment dans un pays comme la Grèce où 2,5 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté (23,1 % de la population totale).
Les femmes et les enfants, les plus vulnérables
L’enquête confirme la grande vulnérabilité des patients qui consultent dans les centres de soins gratuits de MDM. Presque tous (91,3 %) vivaient sous le seuil de pauvreté et la grande majorité (84,4 %) a été confrontée à au moins un acte de violence. Deux tiers des patients (62,9 %) n’avaient pas de couverture maladie, principalement du fait de lois restrictives qui excluent certains groupes de population. Les barrières à l’accès aux soins les plus citées sont l’impossibilité de payer les soins (27,9 %) et des problèmes administratifs (22 %). Lorsqu’on les interroge, 22,9 % des patients perçoivent leur santé physique comme (très) mauvaise – 27,1 % pour ce qui est de leur santé mentale.
Les femmes et les enfants sont particulièrement concernés par les obstacles à l’accès aux soins. La moitié des femmes enceintes interrogées (54 %) n’ont pas eu accès à des soins prénataux avant de consulter dans un centre de soins gratuits de MDM et, parmi elles, 58,2 % ont reçu des soins trop tardivement. Par ailleurs, la grande majorité de ces femmes enceintes n’ont pas de couverture maladie (81 %).
À souligner que moins de 1 % des migrantes enceintes (y compris les citoyennes de l’Union européenne) ont migré pour des raisons de santé.
« Il est choquant de constater que seul un tiers des enfants reçus en consultation en Europe avaient été vaccinés contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) et à peine un peu plus d’entre eux contre le tétanos (42,5 %) », note MdM.
Appel à l’accès universel aux soins
Le rapport contredit un mythe « souvent utilisé par les gouvernements pour limiter l’accès aux soins », selon MDM : celui de la migration pour raison médicale. Seulement 3 % des migrants reçus par MdM avaient migré pour des raisons de santé. Ces personnes vivent en moyenne depuis 6,5 ans dans le pays de migration avant de consulter MdM et seulement 9,5 % des migrants souffrant de maladies chroniques le savaient avant leur arrivée en Europe. « Très peu de migrants sans papiers tombent gravement malades en Europe et lorsque cela arrive, cela arrive longtemps après leur arrivée. Ils devraient être protégés de l’expulsion lorsqu’un accès effectif à des soins de santé adéquats ne peut pas être assuré dans le pays vers lequel ils vont être expulsés », insiste MdM.
L’organisation appelle les États membres et les institutions de l’UE à garantir des systèmes de santé universels de santé publique ouverts à toute personne vivant en Europe. « Tous les enfants résidant en Europe doivent avoir un accès sans réserve aux programmes de vaccination nationaux et aux soins pédiatriques. Toutes les femmes enceintes doivent avoir accès à l’interruption de grossesse, aux soins prénataux et postnataux et à un accouchement sans risque », précise l’association. L’appel s’adresse aussi aux professionnels de santé invités à « fournir des soins à tous les patients, quels que soient leur statut et les barrières légales en vigueur, en accord avec la Déclaration des droits du patient de l’Association médicale mondiale ».
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation