Un médecin italien condamné pour erreur de traitement anticonceptionnel

Publié le 26/06/2014

Pour avoir prescrit un traitement substitutif de la ménopause (patch Estraderm TTS50 non commercialisé en France depuis 2012) à une patiente venue le consulter pour une contraception hormonale, un médecin généraliste vient d’être condamné par le tribunal de Milan à participer aux frais d’entretien de l’enfant né de cette erreur médicale, à hauteur de 400 euros par mois jusqu’à ses vingt ans. C’est-à-dire le moment où il deviendra indépendant selon le magistrat en charge du dossier.

Préjudice patrimonial

Dans son verdict, le juge a estimé que cette erreur médicale a « directement entraîné un préjudice patrimonial » non couvert par l’assurance souscrite par le généraliste qui devra donc payer 116 000 euros de sa poche aux parents de l’enfant dont il devient en quelque sorte le père putatif.

L’affaire remonte à 2008. Un couple prend rendez-vous avec son médecin de famille. Le mari au chômage et malade, explique que la situation économique de son couple qui a déjà deux enfants, est difficile. En raison de ce contexte, ajoute l’épouse, « nous ne voulons pas un autre enfant ». Le médecin décide de prescrire un patch anticonceptionnel à la jeune femme. Or visiblement, les techniques de prévention des grossesses non désirées ne font pas partie du bagage professionnel du généraliste qui se trompe de produit. Résultat : la jeune femme tombe rapidement enceinte. Le couple décide de garder l’enfant qui nait en 2009 mais traîne le médecin devant les tribunaux pour préjudice patrimonial.

Un jugement sans précédent

Devant le parquet de Milan, l’avocat du couple accuse le médecin de ne pas avoir su faire son métier. Il affirme que le couple est pénalisé sur le plan économique et sur le long terme. La défense rétorque en accusant la jeune femme de « légèreté » car elle aurait dû lire la notice explicative avant d’utiliser le patch. L’avocat du médecin ajoute que la patiente avait affirmé qu’elle souffrait de troubles hormonaux et que le traitement a été prescrit pour régulariser son cycle menstruel. Pour le juge, ces arguments ne tiennent pas la route et aggravent au contraire la position du médecin.

Cette décision de justice sans précédent en Italie pourrait introduire la notion de précédent. « Le juge a estimé que le médecin a empêché le couple de gérer sa vie sexuelle en toute liberté. Sur le principe, le verdict est juste. Je trouve toutefois que le critère de remboursement ou plutôt de coparticipation aux frais d’entretien de l’enfant est injuste car il tient compte de la contingence d’une situation qui pourrait être transitoire », estime Massimo Giannuzzi. Selon ce procureur général de l’État (« dell’avvocatura di Stato »), la peine infligée au généraliste devrait être réduite en appel puis en cassation. « On ne peut pas appliquer un critère mathématique, la situation financière du couple pourrait changer dans le temps. Sur le plan purement juridique, ce verdict qui introduit un nouveau principe qui dit que la procréation est liée à la situation d’un couple est très importante car elle introduit un précédent », analyse Massimo Gianuzzi

Ariel F. Dumont, à Rome

Source : lequotidiendumedecin.fr