Il est désormais temps d'adopter une définition de la santé et des droits sexuels et reproductifs qui dépasse la prévention des maladies et la contraception, pour comprendre l'éducation à la sexualité, la prise en charge de l'infertilité, et les conseils sur les violences de genre, exhorte un rapport d'une des commissions du « Lancet ». La commission Guttmacher-Lancet (du nom de l'Institut new-yorkais qui la conduit), composée de 16 experts issus d'Afrique, d'Europe, du Moyen-Orient, d'Amérique du Nord et d'Amérique latine, dévoile les résultats de deux ans de travail.
« La santé et les droits sexuels et reproductifs sont menacés dans le monde entier. Les progrès ne sont pas inévitables, et rien ne peut être considéré comme acquis », mettent en garde les éditeurs du « Lancet », les Drs Richard Horton et Elisabeth Zuccala, citant, en exemple, la politique anti-avortement de Donald Trump ou les reculs en Amérique latine, en Pologne et en Russie.
Si plusieurs pays ont fait des progrès indéniables en matière de contraception, de mortalité maternelle et infantile, et de VIH, les inégalités persistent. Selon la commission Guttmacher, plus de 4,3 milliards d'individus reçoivent au cours de leur vie des soins inadaptés en matière de sexualité ou de reproduction, dans le monde entier. En outre, chaque année on recense 25 millions d'avortements dangereux, 2 millions de nouvelles infections au VIH, et 266 000 décès liés à un cancer du col de l'utérus. Seuls les plus riches accèdent à l'assistance médicale à la procréation. Et une femme sur trois subit des violences liées au genre, le plus souvent commises par le partenaire.
Dans les pays en voie de développement, plus de 30 millions de femmes accouchent en dehors des structures médicales ; 45 millions de femmes ont un suivi anténatal inadéquat ou inexistant ; et plus de 200 millions de femmes qui le souhaiteraient n'ont pas accès à une méthode contraceptive moderne.
Une feuille de route plus large que les objectifs de l'OMS
Pour que ce constat ne soit pas une fatalité, selon les termes de Ann M. Starrs, présidente du Guttmacher Institute, il est nécessaire que soit adoptée une définition de la santé sexuelle et reproductive plus globale que celle indiquée dans les objectifs du développement durable (ODD) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Doivent y entrer, outre la contraception, la santé maternelle et infantile, et le VIH, inclus dans les ODD, les soins contre l'infertilité, la lutte contre les violences de genre, la prévention et le traitement du cancer du col de l'utérus, l'avortement, la prévention des infections sexuellement transmissibles et l'éducation sexuelle.
La commission appelle les États à s'attaquer plus largement à toutes les lois ou normes qui vont à l'encontre de l'égalité entre les genres. Les groupes les plus vulnérables et marginalisés (adolescents, migrants, déplacés, handicapés, etc.) doivent être spécifiquement soutenus.
L'effort doit enfin porter sur l'éducation et l'information. « Le point de départ pour améliorer la santé sexuelle et reproductive est d'en parler franchement et précisément. Trop longtemps, ces thèmes ont été exclus des politiques publiques, des cursus scolaires, bannis des discours publics » écrivent les auteurs de la commission, appelant à promouvoir une vie sexuelle épanouie et saine. L'information et les soins doivent être accessibles à tous, indépendamment de l'âge, du statut marital et socio-économique, de la communauté, de l'orientation sexuelle et du genre.
Le coût de ces investissements, estimé à 45 milliards d'euros, est modeste lorsqu'on le lit par tête (7,50 euros) même si les pays les moins développés auront encore besoin d'un soutien extérieur, lit-on.
« Les plus importantes réformes sont celles qui promeuvent l'égalité des genres et donnent aux femmes et aux filles un meilleur contrôle sur leur corps et sur leur vie », a salué le Dr Tedros A. Ghebreyesus, président de l'OMS.
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