« Bien sûr, si les patientes attendent des excuses du conseil de l’Ordre, je les présente. Sans aucun problème. » Il aura pourtant fallu force acrobaties à Me Georges Holleaux, qui défend une des plaignantes au procès du Dr André Hazout, pour décrocher les excuses du conseil départemental représenté ce mardi par son secrétaire général Jean-Luc Thomas, sa présidente, Irène Kahn-Bensaube, étant excusée pour raisons médicales.
Connu pour avoir été l’un des champions de la lutte contre la stérilité, l’ancien gynécologue est jugé devant la cour d’assises de Paris pour des viols et agressions sexuelles sur six de ses patientes. Radié de l’Ordre en 2013, il reconnaît des « gestes inadéquats » et des « relations consenties » mais réfute toute contrainte.
Une « scandaleuse désinvolture » ordinale ?
Fait peu commun, depuis le 4 février, c’est tant le procès du praticien qui semble se jouer devant les assises que celui du conseil de l’Ordre de Paris. Dès le premier jour, Me Holleaux a regretté que l’instance ait « l’impudence de vouloir se constituer partie civile », alors même qu’elle a été condamnée en octobre 2012 par une cour administrative pour « inertie fautive » après s’être abstenue de faire remonter plusieurs plaintes dénonçant le comportement inconvenant du gynécologue.
Une position soutenue par l’avocate générale, Annie Grenier, « scandalisée » par une telle désinvolture et, plus surprenant, par le Conseil national de l’Ordre des médecins qui le 6 février s’est lui-même fendu d’un communiqué pour condamner les « manquements » de l’instance départementale.
Le 14 février, le Pr René Frydman avait vigoureusement condamné les dérives déontologiques de son ancien confrère, tout en prenant bien soin de se défausser sur le conseil de l’Ordre qui selon lui était mieux placé pour réagir. Réponse agacée, mardi, de Philippe Biclet, secrétaire général adjoint du conseil de l’Ordre de Paris dans les années 1990 : « Le Pr Frydman n’a pas contacté le conseil de l’Ordre pour dénoncer des faits. Je pense que si nous avions été informés par quelqu’un de sa notoriété qu’il y avait dans son service quelqu’un dont le comportement n’était pas irréprochable, je pense que là, on aurait sévi... »
Malaise et amnésie...
Ce mardi ont défilé à la barre trois secrétaires généraux de l’instance départementale, ainsi que Jean-Luc Thomas, à ce poste depuis 2008 après la spectaculaire dissolution du conseil ordinal de Paris en 2007 en raison de dissensions internes et d’une gestion controversée. Bien que simples témoins ou partie civile, les médecins semblaient en position d’accusé. Pourquoi aucune suite n’a-t-elle été donnée aux plaintes d’ordre sexuel déposées contre le Dr Hazout en 1988, 1990 et 1996, les a interrogés le président ?
Mal à l’aise, Hervé Boissin et Jean-Luc Mot se sont réfugiés dans une amnésie bienvenue, préférant rappeler que, depuis 2007, le traitement des plaintes avait été profondément amélioré, et surtout systématisé. « Ce dossier n’a pas soulevé l’inquiétude qu’il aurait dû », a fini par admettre Hervé Boissin. Un détachement stigmatisé par l’avocate générale. « Ça a été mal géré depuis des années avec des personnes qui font des lettres stéréotypées sans aller voir ce qu’il y a dans les dossiers. C’est "Responsable mais pas coupable", on a déjà entendu ça... »
En dépit des justifications laborieuses des anciens membres du conseil et de l’acte de pénitence tardif du conseil actuel de Paris, Me Holleaux a signé la paix avec la communauté médicale. « Au début, j’ai été très inquiet de la position du conseil de l’Ordre qui semblait rester sur une ligne de déni de ses manquements et de son inertie fautive qui a duré 15 ans », mais « aujourd’hui, et c’est sans précédent, le représentant du conseil de l’Ordre de Paris a reconnu que de graves dysfonctionnements avaient été commis, que le traitement des patientes avait été catastrophique et il a présenté ses excuses. Ma cliente les a entendues et elle en a été émue. »
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