Pour ou contre le tiers payant généralisé ? 19 médecins députés s’expliquent
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Contactés par « le Quotidien », les Drs Jean-Paul Bacquet, Jean-Michel Couve, Sauveur Gandolfi-Scheit, Denis Jacquat, Philippe Nauche et le Pr Jean-Louis Touraine n'ont pas été en mesure de répondre à nos sollicitations.

Dr Gérard Bapt (PS) : « Cela ne remet pas en cause l'exercice libéral »
POUR. Le député de Haute-Garonne, cardiologue de formation, s’est exprimé au cours des débats de la loi de santé. Conscient des difficultées posées aux médecins par le dispositif de généralisation, il n’y voit pas un reniement de la médecine libérale. « Je ne pense pas que la grande majorité des médecins soit, sur le principe, opposée au tiers payant généralisé, même si nous ne méconnaissons pas les problèmes d’ordre administratif, technique, ou même financier que sa mise en œuvre pourra poser – nous l’avons déjà noté et Mme la ministre elle-même le reconnaît. » « J’aimerais par ailleurs faire remarquer que de nombreux médecins libéraux travaillent déjà, soit comme vacataires, soit comme salariés à temps partiel d’un établissement de santé, sous le régime du tiers payant. En ce qui me concerne, pour avoir connu successivement l’exercice salarié, dans le cadre hospitalo-universitaire, et un exercice mixte, puisque j’y ai conservé des vacations lorsque j’ai ouvert mon cabinet de groupe spécialisé, je ne comprends pas l’argument selon lequel on toucherait, avec le tiers payant, au principe même de l’exercice libéral. »

Dr Jacqueline Fraysse (Front de gauche) : « Il faut dégager des moyens pour les médecins »
POUR. La députée des Hauts-de Seine est favorable à la généralisation du tiers payant qui va permettre « aux moins fortunés d’avoir un accès à des soins de qualité », même si, dit-elle, cela « risque de renforcer la place des complémentaires au détriment de la prise en charge par l’assurance maladie ». La cardiologue ne nie pas les difficultés pour les médecins. Elle a tenu à le dire devant les députés : « Aujourd’hui, alors que le tiers payant n’est pas généralisé, la télétransmission d’un dossier de patient nécessite non pas un seul clic, mais douze, et bien des dysfonctionnements sont à déplorer, obligeant les médecins à vérifier le récapitulatif de leurs actes et de leurs dédommagements. Ces tâches administratives prennent du temps, que les praticiens craignent de voir croître au détriment du temps médical consacré à leurs patients. Il y a donc lieu non pas de s’opposer au tiers payant, mais de dégager des moyens suffisants pour prendre des mesures concrètes, efficaces, et ce dans les délais annoncés. C’est ce que je demande à Mme la ministre et au Gouvernement de faire de manière extrêmement rigoureuse, si nous ne voulons pas que cette mesure soit inefficace et se retourne finalement contre l’objectif qu’elle s’est fixé. »

Dr Jean Leonetti (UMP) : « On apporte un remède à un mal qui n’existe pas »
CONTRE. Cardiologue, le député des Alpes-Maritimes a détaillé au « Quotidien » les raisons de son opposition au tiers payant généralisé : « L’argument du ministère, c’est de dire qu’il y a des gens qui, aujourd’hui, ne peuvent pas accéder aux soins et qui le pourront demain. C’est faux. Il existe des dispositifs comme l’AME et la CMU qui " protègent " déjà les plus démunis. La généralisation du tiers payant toucherait donc une autre population qui peut, elle, très bien faire une avance de frais partielle. En réalité, cette réforme ne bénéficiera pas à ceux qui en ont besoin, pour les frais optiques et dentaires. Le deuxième élément contre ce dispositif, c’est qu’il augmenterait encore la charge administrative sur le corps médical, en clinique, à l’hôpital ou en cabinet. Le généraliste isolé aura beaucoup de mal à s’en sortir sans empiéter sur son temps médical au détriment du soin. La ministre pense qu’il faut défendre les malades contre les médecins. Elle ne sait pas que les médecins continuent à faire des actes gratuits, qu’ils différent les encaissements d’honoraires et que ces pratiques sont plus que courantes. Avec le tiers payant généralisé, elle apporte un remède à un mal qui n’existe pas ! Elle le fait soit par méconnaissance, soit par idéologie, ce qui est plus grave. »

Dr Marc Laffineur (UMP) : « La déresponsabilisation du patient »
CONTRE. Anesthésiste-réanimateur, avant d'entamer une carrière politique, le député de Maine-et-Loire craint que les médecins ne soient à terme assimilés à des salariés des caisses... « La généralisation du tiers payant ne rendra service ni aux médecins ni aux patients, puisqu'elle contribuera à la banalisation de l'acte médical et à la déresponsabilisation du patient, alors même que les Français comptent déjà parmi les plus gros consommateurs de soins en Europe. Cette mesure dénaturera également le sens et l'exercice de la profession de médecin. Le temps médical disponible est, en effet, déjà largement amputé par des tâches administratives qui iront croissant et conduiront in fine les médecins à être assimilés à des salariés des caisses d'assurance maladie. Alors que les populations fragiles sont déjà bénéficiaires du tiers payant, il est plus que difficile de comprendre l'obstination du gouvernement à soutenir cette mesure qui coûtera cher et n'aura que très peu d'impact sur l'accès aux soins. »

Dr Nicolas Dhuicq (UMP) : « Vers une médecine purement salariée »
CONTRE. Pour le psychiatre, le gouvernement socialiste remet en cause les fondements même de la médecine libérale. Il explique au « Quotidien » les raisons de sa farouche opposition à cette réforme. « J’y suis fermement opposé et c’est ce que j’ai dit durant les débats à l’Assemblée. Le socialistes sont en train de faire ce que les travaillistes anglais ont fait au début des années 60, c’est à dire sectoriser la médecine, tuer la liberté de choix du patient et l’indépendance du médecin. C’est catastrophique pour la médecine française. On s’attaque à ses principes fondamentaux d’organisation. Il y a derrière cela l’idée d’une médecine purement salariée. À terme, c’est l’indépendance du corps médical dans son ensemble qui est remise en cause. »

Dr Fernand Siré (UMP) : « Des médecins placés sous tutelle des caisses »
CONTRE. Généraliste, le député des Pyrenées-Orientales a eu un avant-goût du tiers payant généralisé dans sa région. Il s'en est expliqué au « Quotidien » : « J’ai été généraliste pendant 40 ans et j’ai eu l’expérience d’un tel dispositif. Il y a 20 ans, avec la caisse de Perpignan, nous avions mis en place un tiers payant pour les personnes défavorisées et les patients en longue maladie, sous forme d’une convention avec les médecins locaux. Le système s’est avéré très complexe. Au final, ma secrétaire travaillait à quart-temps pour récupérer l’argent des mutuelles qui ne payaient pas, les patients qui ne payaient pas leurs mutuelles… Je me suis aussi aperçu que cela cassait le contrat moral médecin-patient. Avec le tiers payant, les patients deviennent de simples consommateurs de soins et les médecins sont placés sous la tutelle directe des caisses. En pratique, cela remet en cause l’indépendance de leur prescription et de leurs pratiques médicale. Il aurait été plus important de se préoccuper de l'accès aux soins dentaires et optiques. C'est là que sont les vrais problèmes. »

CONTRE. Fin connaisseur des questions de santé, ce genéraliste de formation a défendu son point de vue dans l’hémicycle. Il a invité la ministre à mettre en place le volontariat, faute de renoncer à cette réforme. « La mesure du tiers payant généralisé n’est pas aussi sociale qu’il y paraît : ce n’est pas la médecine gratuite, mais c’est une mesure démagogique et idéologique. Le tiers payant généralisé pose de nombreuses questions techniques qui font douter de sa faisabilité pour 2017, malgré vos annonces. […] Cette mesure est chronophage pour les médecins, qui devront vérifier les documents et les droits des patients, la réalité de la carte Vitale, les éventuelles complémentaires, à chercher au sein de quelque cinq cents mutuelles. L’exemple des pharmaciens est d’ailleurs frappant : coût par acte, retards, taux d’erreur… alors qu’ils ont, eux, du personnel à disposition ! Votre annonce de pénaliser l’assurance maladie si le délai de sept jours est dépassé n’est véritablement pas crédible : personne n’y croit sérieusement. Enfin, les conséquences inflationnistes sur notre système de santé sont une évidence, alors pourquoi les nier ? [...] Aussi, madame la ministre, basez au moins votre proposition sur le volontariat ! Avec ce tiers payant généralisé, vous changez le paradigme de la médecine libérale française et vous la placez sous la coupe des organismes payeurs. »
Crédit photo : S. Toubon

Dr Christian Hutin (DVG) : « Des garanties pour les médecins »
POUR. Généraliste pendant plus de 20 ans à Saint-Pol-sur-Mer. Dans un communiqué, le Mouvement républicain et citoyen, dont Christian Hutin est le vice-président, a rappelé son attachement au tiers payant généralisé, une mesure de justice et de bon sens : « La ministre a su tenir compte des inquiétudes des médecins. Le nouveau dispositif lève les obstacles à la mise en œuvre du tiers payant généralisé en prévoyant une entrée en vigueur progressive d’ici 2017 et en introduisant une garantie de paiement sous sept jours. Il appartient à présent à la ministre de rester à l’écoute des professionnels durant le processus de mise en œuvre. »

Dr Elie Aboud (UMP) : « Une médecine transformée en " produit " »
CONTRE. S’adressant à la ministre de la Santé, marisol Touraine, le cardiologue, député de l'Hérault, a défendu son opposition au tiers ayant généralisé le 9 avril, lors des débats sur l’article 18 : « Avec beaucoup de respect, j’ai envie de vous dire que cette justice sociale, votre justice sociale, créera très certainement à terme une injustice fiscale. Nous allons en effet " consommer " une médecine transformée en " produit ". Nous allons susciter le nomadisme des patients : si un médecin ne leur plaît pas, ils iront voir ailleurs ! Cette justice sociale que vous défendez provoquera une injustice médicale. Madame la ministre, un tiers des médecins généralistes ou spécialistes accomplissent aujourd’hui des actes administratifs et non des soins. Nous sommes en train de leur envoyer un très mauvais signal. Cette justice sociale de court terme créera très certainement à long terme une injustice sociale. Je vous donne rendez-vous dans dix ans, madame la ministre : nous discuterons à nouveau de ce problème, comme nous discutons aujourd’hui des 35 heures, que nous ne savons d’ailleurs pas comment supprimer. Il en sera de même pour le tiers payant généralisé ! »

Dr Valérie Fourneyron (PS) : « Ne pas surcharger les médecins »
POUR. Membre du gouvernement jusqu’en juin 2014, la généraliste soutient le tiers payant généralisé, une mesure de justice sociale, mais qui ne doit pas se faire au détriment des médecins. Elle s'en est expliquée au « Quotidien » : « Il serait absurde de nier le fait que de nombreux Français renoncent à des soins faute d’argent. Je suis donc favorable à une réforme sociale qui attaque les inégalités à la racine et renforce les droits des patients. Cependant, je n’oublie pas que nous sommes dans un contexte où 50% des généralistes n’ont pas de secrétariats et ont des charges administratives très élevées. Je serai donc attentive à ce que les modalités techniques de la mise en œuvre du TPG soient à la hauteur des objectifs politiques, sans « surcharger » les médecins. »

Dr Dominique Orliac (RDG) : « Il y avait bien d’autres moyens pour mettre en place ce tiers payant généralisé »
CONTRE. Ophtalmologue, élue de gauche, la député du Lot a pourtant voté contre la généralisation du tiers payant. Sans être opposée au principe, elle regrette les modalités de mise en œuvre du dispositif et rappelle les craintes légitimes des médecins à son égard (déclarations à l'Assemblée nationale) : « De facto, les médecins pratiquent déjà un tiers payant social. Ils nourrissent tout de même quelques inquiétudes techniques et financières quant à sa généralisation. Comment, par exemple, procéderont ceux qui ne disposent pas de l’ADSL et de la fibre optique ? Il faudra résoudre ces problèmes. Ils sont aussi inquiets que cette mesure supprime du temps médical au profit du temps administratif, au seul préjudice des patients. En outre, certains médecins pressentent que derrière la généralisation du tiers payant se profile peut-être la fin programmée de notre Sécurité sociale, sa privatisation, par le transfert progressif de la protection sociale vers l’assurance privée, tous les Français ne pouvant plus dès lors accéder à des soins de proximité et de qualité. Les médecins ont également conscience que c’est l’accès aux équipements optiques et auditifs, aux soins dentaires, aux délais pour obtenir des rendez-vous chez les spécialistes qui soulève le plus de problèmes. Globalement, les médecins libéraux ne sont donc pas vraiment hostiles à la généralisation du tiers payant. Nous aurions quant à nous souhaité être entendus : nous avions proposé que cette généralisation soit précédée d’une expérimentation régionale et qu’une modulation en fonction des revenus s’opère, comme ce fut le cas avec les allocations familiales. Nous n’avons donc pas été entendus mais il y avait bien d’autres moyens pour mettre en place ce tiers payant généralisé. »

Dr Michèle Delaunay (PS) : « Une mesure de simplification très utile »
POUR. La député de Gironde, cancérologue de formation, a expliqué sa position à travers un billet publié sur son blog. « J’ai proposé, dans un but d’apaisement, de généraliser ce tiers payant en 2 temps législatifs, le second en novembre 2016, après un bilan de l’application du 1er temps. Ce premier temps, lui même échelonné selon l’agenda prévu, aurait compris toutes les situtations sociales (ex CMU) pour que ceux qui ont de faibles revenus puissent benéficier immédiatement du tiers payant. Il aurait compris aussi toutes les affections de longue durée (ALD) , y compris "la dernière maladie" (de la liste) qui réunit les grands âgés poly-pathologiques pour lesquels le tiers payant est, quel que soient les revenus, une mesure de simplification très utile. J’avais annoncé dans mon intervention que je voterais même si la ministre ne retenait pas cette solutions de compromis avec les professionnels de la santé, ce qui fut le cas. »

Dr Gérard Sebaoun (PS) : « Le libre choix du médecin n'est pas remis en cause »
POUR. Membre de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée, le député du Val-d’OIse a défendu la généralisation du tiers payant en séance publique le 31 mars : « Le tiers payant généralisé, dont je ne nie pas les difficultés techniques en raison notamment de l’éparpillement des mutuelles, signe-t-il, comme l’affirment les tenants d’un libéralisme désuet, la mort de la médecine libérale ? Arrêtons-nous quelques instants sur les quatre principes de la charte de la médecine libérale édictée en 1927, il y a près de quatre-vingt-dix ans. Le premier principe, c’est le libre choix du médecin par le patient. Il n’est nulle part remis en cause dans le texte. Le deuxième, la liberté de prescription, n’est pas davantage abordé. Le troisième, c’est la liberté tarifaire. Convenons ensemble qu’elle a depuis longtemps laissé place à la négociation conventionnelle, les honoraires libres du secteur 2 étant encadrés et par le code de déontologie et par la convention médicale. Quant au quatrième principe, le sacro-saint paiement à l’acte, il est défendu par les détracteurs du tiers payant avec une obstination à mes yeux déraisonnable. »

Dr Bernard Accoyer (UMP) : « Le système de soins va être étatisé »
Crédit photo : S. Toubon

Dr Pierre Morange (UMP) : « Un mécanisme de double peine administrative et financière »
CONTRE. Généraliste, le député des Yvelines dénonce un mécanisme de dopuble peine : « J’y suis totalement opposé. C’est un texte qui vise à une étatisation de la santé et qui n’est que le reflet d’une idéologie socialiste calcifiée. C’est un mécanisme de double peine administrative et financière pour les médecins mais aussi pour les patients. Administrative parce que cela va représenter un surcroît de travail qui va devenir insupportable pour les médecins, qui ne sera pas rémunérée et qui se fera au détriment des patients. Financière parce que cela entraînera une perte de recettes pour le cabinet, même si on nous promet des délais de paiement théoriques dont on sait qu’ils ne sont pas toujours respectés en pratique. C’est aussi une pénalité financière pour les concitoyens qui se verront ponctionner les franchises sur leur compte en banque et qui devront financer la mise en place de ce dispositif qui coûtera très cher à la Sécurité sociale. Si la ministre avait une volonté de justice sociale et sanitaire, elle s’occuperait d’abord du remboursement des frais d’optique et dentaire et du reste à charge pour les retraités. Là sont les véritables inégalités. »

Dr Philippe Vitel (UMP) : « Une nouvelle dévalorisation de l'acte »
CONTRE. Le chirurgien, député du Var, réfute les arguments de marisol Touraine concernant les difficultés d'accès aux soin et dénone l'étatisation de la médecine. « En tant qu’ancien médecin, j’y suis radicalement opposé. On m’a éduqué avec la notion de " tout ce qui ne coûtait rien ne valait rien ". L’acte est déjà mal valorisé, le tiers payant généralisé représente un recul de plus. Transformer les médecins en prestataires de service est totalement contraire au serment d’Hippocrate. Quant aux difficultés d’accès aux soins, c’est une ineptie. Dire qu’en France, on peut ne pas être soigné, c’est faux. J’ai été médecin pendant des années, je n’ai jamais vu un hôpital refuser un patient ni un médecin refuser de soigner quelqu’un quand il y avait un caractère d’urgence. L’objectif derrière la généralisation du tiers payant, c’est une étatisation de la médecine et d’amener les médecins à devenir des fonctionnaires. »

Pr Bernard Debré (UMP) : « Une mesure démagogique et inflationniste »
CONTRE. L'urologue ne croit pas aux vertus de la généralisation du tiers payant avancées par Marisol Touraine. Extrait de son argumumentaire développé dans l'hémicycle : « J’y suis très opposé : à mon sens, cette mesure est démagogique et inflationniste. Et ne dites surtout pas qu’elle ne poussera pas les malades à consulter davantage : ce sera évidemment le cas, nous le savons ! Vous avez raison sur un point : on ne peut pas faire de parallèle entre les pharmaciens et les médecins. Les pharmaciens ne prescrivent pas, ils ne font que remettre aux patients les médicaments qui ont été prescrits par les médecins. En revanche, vous affirmez que certains malades ne peuvent pas accéder aux soins. Mais de quels types de soins s’agit-il ? Des lunettes, des soins dentaires, des consultations ORL ! En somme, il s’agit de la médecine spécialisée, et non de la médecine générale. Je n’ai pas besoin de prendre d’autres exemples : le tiers payant ne permettra plus au patient de voir ce qu’il paie. Et ce serait, madame la ministre, une avancée ? Mais à ce compte-là, il faudrait aussi de ne pas faire payer le gaz, l’électricité ou les loyers, et tout rendre gratuit ! »

Dr Éric Alauzet (EELV) : « Une mesure légitime mais peu crédible dans sa mise en œuvre »

Dr Alain Marty (UMP) : « Une réforme qui n'apporte pas de réponse aux inégalités les plus criantes »
CONTRE. Gynécologue-obstétricien, le député de Moselle explique que le tiers payant ne résoudra pas les problèmes d'accès aux soins et qu'il créera une surconsommation médicale. Il s'en est expliqué au « Quotidien » : « Cette réforme aurait pour effet d'aboutir à une surcharge de travail administratif pour les médecins alors que leur agenda quotidien est déjà saturé. Elle est donc techniquement inapplicable. Ensuite, si la raison principale de cette réforme découle de la difficulté d'accès au soin de certains Français, elle n’apporte pas de réponse aux inégalités les plus criantes, celles qui amènent de très nombreuses personnes issues de la classe moyenne, encore et toujours oubliée du gouvernement socialiste, à refuser les soins dentaires ou optiques parce qu’elles sont exclues de la couverture maladie universelle. Cette généralisation du tiers payant ne devrait créer qu'une forme de surconsommation médicale, contre laquelle la sécurité sociale ne cesse paradoxalement de se battre, directement liée à une déresponsabilisation des patients. En effet, le reste à charge étant supprimé, il est craindre que ces derniers aient un sentiment de " gratuité ". Enfin, la réforme a été décidée sans aucun dialogue avec les principaux concernés, les médecins, alors qu’en France le prix de la consultation chez le généraliste est l’un des moins élevés d’Europe et que ce dispositif n’était réclamé par personne. »

Dr Gérard Bapt (PS) : « Cela ne remet pas en cause l'exercice libéral »
POUR. Le député de Haute-Garonne, cardiologue de formation, s’est exprimé au cours des débats de la loi de santé. Conscient des difficultées posées aux médecins par le dispositif de généralisation, il n’y voit pas un reniement de la médecine libérale. « Je ne pense pas que la grande majorité des médecins soit, sur le principe, opposée au tiers payant généralisé, même si nous ne méconnaissons pas les problèmes d’ordre administratif, technique, ou même financier que sa mise en œuvre pourra poser – nous l’avons déjà noté et Mme la ministre elle-même le reconnaît. » « J’aimerais par ailleurs faire remarquer que de nombreux médecins libéraux travaillent déjà, soit comme vacataires, soit comme salariés à temps partiel d’un établissement de santé, sous le régime du tiers payant. En ce qui me concerne, pour avoir connu successivement l’exercice salarié, dans le cadre hospitalo-universitaire, et un exercice mixte, puisque j’y ai conservé des vacations lorsque j’ai ouvert mon cabinet de groupe spécialisé, je ne comprends pas l’argument selon lequel on toucherait, avec le tiers payant, au principe même de l’exercice libéral. »

Dr Jacqueline Fraysse (Front de gauche) : « Il faut dégager des moyens pour les médecins »
POUR. La députée des Hauts-de Seine est favorable à la généralisation du tiers payant qui va permettre « aux moins fortunés d’avoir un accès à des soins de qualité », même si, dit-elle, cela « risque de renforcer la place des complémentaires au détriment de la prise en charge par l’assurance maladie ». La cardiologue ne nie pas les difficultés pour les médecins. Elle a tenu à le dire devant les députés : « Aujourd’hui, alors que le tiers payant n’est pas généralisé, la télétransmission d’un dossier de patient nécessite non pas un seul clic, mais douze, et bien des dysfonctionnements sont à déplorer, obligeant les médecins à vérifier le récapitulatif de leurs actes et de leurs dédommagements. Ces tâches administratives prennent du temps, que les praticiens craignent de voir croître au détriment du temps médical consacré à leurs patients. Il y a donc lieu non pas de s’opposer au tiers payant, mais de dégager des moyens suffisants pour prendre des mesures concrètes, efficaces, et ce dans les délais annoncés. C’est ce que je demande à Mme la ministre et au Gouvernement de faire de manière extrêmement rigoureuse, si nous ne voulons pas que cette mesure soit inefficace et se retourne finalement contre l’objectif qu’elle s’est fixé. »

Dr Jean Leonetti (UMP) : « On apporte un remède à un mal qui n’existe pas »
CONTRE. Cardiologue, le député des Alpes-Maritimes a détaillé au « Quotidien » les raisons de son opposition au tiers payant généralisé : « L’argument du ministère, c’est de dire qu’il y a des gens qui, aujourd’hui, ne peuvent pas accéder aux soins et qui le pourront demain. C’est faux. Il existe des dispositifs comme l’AME et la CMU qui " protègent " déjà les plus démunis. La généralisation du tiers payant toucherait donc une autre population qui peut, elle, très bien faire une avance de frais partielle. En réalité, cette réforme ne bénéficiera pas à ceux qui en ont besoin, pour les frais optiques et dentaires. Le deuxième élément contre ce dispositif, c’est qu’il augmenterait encore la charge administrative sur le corps médical, en clinique, à l’hôpital ou en cabinet. Le généraliste isolé aura beaucoup de mal à s’en sortir sans empiéter sur son temps médical au détriment du soin. La ministre pense qu’il faut défendre les malades contre les médecins. Elle ne sait pas que les médecins continuent à faire des actes gratuits, qu’ils différent les encaissements d’honoraires et que ces pratiques sont plus que courantes. Avec le tiers payant généralisé, elle apporte un remède à un mal qui n’existe pas ! Elle le fait soit par méconnaissance, soit par idéologie, ce qui est plus grave. »

Dr Marc Laffineur (UMP) : « La déresponsabilisation du patient »
CONTRE. Anesthésiste-réanimateur, avant d'entamer une carrière politique, le député de Maine-et-Loire craint que les médecins ne soient à terme assimilés à des salariés des caisses... « La généralisation du tiers payant ne rendra service ni aux médecins ni aux patients, puisqu'elle contribuera à la banalisation de l'acte médical et à la déresponsabilisation du patient, alors même que les Français comptent déjà parmi les plus gros consommateurs de soins en Europe. Cette mesure dénaturera également le sens et l'exercice de la profession de médecin. Le temps médical disponible est, en effet, déjà largement amputé par des tâches administratives qui iront croissant et conduiront in fine les médecins à être assimilés à des salariés des caisses d'assurance maladie. Alors que les populations fragiles sont déjà bénéficiaires du tiers payant, il est plus que difficile de comprendre l'obstination du gouvernement à soutenir cette mesure qui coûtera cher et n'aura que très peu d'impact sur l'accès aux soins. »

Dr Nicolas Dhuicq (UMP) : « Vers une médecine purement salariée »
CONTRE. Pour le psychiatre, le gouvernement socialiste remet en cause les fondements même de la médecine libérale. Il explique au « Quotidien » les raisons de sa farouche opposition à cette réforme. « J’y suis fermement opposé et c’est ce que j’ai dit durant les débats à l’Assemblée. Le socialistes sont en train de faire ce que les travaillistes anglais ont fait au début des années 60, c’est à dire sectoriser la médecine, tuer la liberté de choix du patient et l’indépendance du médecin. C’est catastrophique pour la médecine française. On s’attaque à ses principes fondamentaux d’organisation. Il y a derrière cela l’idée d’une médecine purement salariée. À terme, c’est l’indépendance du corps médical dans son ensemble qui est remise en cause. »

Dr Fernand Siré (UMP) : « Des médecins placés sous tutelle des caisses »
CONTRE. Généraliste, le député des Pyrenées-Orientales a eu un avant-goût du tiers payant généralisé dans sa région. Il s'en est expliqué au « Quotidien » : « J’ai été généraliste pendant 40 ans et j’ai eu l’expérience d’un tel dispositif. Il y a 20 ans, avec la caisse de Perpignan, nous avions mis en place un tiers payant pour les personnes défavorisées et les patients en longue maladie, sous forme d’une convention avec les médecins locaux. Le système s’est avéré très complexe. Au final, ma secrétaire travaillait à quart-temps pour récupérer l’argent des mutuelles qui ne payaient pas, les patients qui ne payaient pas leurs mutuelles… Je me suis aussi aperçu que cela cassait le contrat moral médecin-patient. Avec le tiers payant, les patients deviennent de simples consommateurs de soins et les médecins sont placés sous la tutelle directe des caisses. En pratique, cela remet en cause l’indépendance de leur prescription et de leurs pratiques médicale. Il aurait été plus important de se préoccuper de l'accès aux soins dentaires et optiques. C'est là que sont les vrais problèmes. »

CONTRE. Fin connaisseur des questions de santé, ce genéraliste de formation a défendu son point de vue dans l’hémicycle. Il a invité la ministre à mettre en place le volontariat, faute de renoncer à cette réforme. « La mesure du tiers payant généralisé n’est pas aussi sociale qu’il y paraît : ce n’est pas la médecine gratuite, mais c’est une mesure démagogique et idéologique. Le tiers payant généralisé pose de nombreuses questions techniques qui font douter de sa faisabilité pour 2017, malgré vos annonces. […] Cette mesure est chronophage pour les médecins, qui devront vérifier les documents et les droits des patients, la réalité de la carte Vitale, les éventuelles complémentaires, à chercher au sein de quelque cinq cents mutuelles. L’exemple des pharmaciens est d’ailleurs frappant : coût par acte, retards, taux d’erreur… alors qu’ils ont, eux, du personnel à disposition ! Votre annonce de pénaliser l’assurance maladie si le délai de sept jours est dépassé n’est véritablement pas crédible : personne n’y croit sérieusement. Enfin, les conséquences inflationnistes sur notre système de santé sont une évidence, alors pourquoi les nier ? [...] Aussi, madame la ministre, basez au moins votre proposition sur le volontariat ! Avec ce tiers payant généralisé, vous changez le paradigme de la médecine libérale française et vous la placez sous la coupe des organismes payeurs. »
Crédit photo : S. Toubon

Dr Christian Hutin (DVG) : « Des garanties pour les médecins »
POUR. Généraliste pendant plus de 20 ans à Saint-Pol-sur-Mer. Dans un communiqué, le Mouvement républicain et citoyen, dont Christian Hutin est le vice-président, a rappelé son attachement au tiers payant généralisé, une mesure de justice et de bon sens : « La ministre a su tenir compte des inquiétudes des médecins. Le nouveau dispositif lève les obstacles à la mise en œuvre du tiers payant généralisé en prévoyant une entrée en vigueur progressive d’ici 2017 et en introduisant une garantie de paiement sous sept jours. Il appartient à présent à la ministre de rester à l’écoute des professionnels durant le processus de mise en œuvre. »

Dr Elie Aboud (UMP) : « Une médecine transformée en " produit " »
CONTRE. S’adressant à la ministre de la Santé, marisol Touraine, le cardiologue, député de l'Hérault, a défendu son opposition au tiers ayant généralisé le 9 avril, lors des débats sur l’article 18 : « Avec beaucoup de respect, j’ai envie de vous dire que cette justice sociale, votre justice sociale, créera très certainement à terme une injustice fiscale. Nous allons en effet " consommer " une médecine transformée en " produit ". Nous allons susciter le nomadisme des patients : si un médecin ne leur plaît pas, ils iront voir ailleurs ! Cette justice sociale que vous défendez provoquera une injustice médicale. Madame la ministre, un tiers des médecins généralistes ou spécialistes accomplissent aujourd’hui des actes administratifs et non des soins. Nous sommes en train de leur envoyer un très mauvais signal. Cette justice sociale de court terme créera très certainement à long terme une injustice sociale. Je vous donne rendez-vous dans dix ans, madame la ministre : nous discuterons à nouveau de ce problème, comme nous discutons aujourd’hui des 35 heures, que nous ne savons d’ailleurs pas comment supprimer. Il en sera de même pour le tiers payant généralisé ! »

Dr Valérie Fourneyron (PS) : « Ne pas surcharger les médecins »
POUR. Membre du gouvernement jusqu’en juin 2014, la généraliste soutient le tiers payant généralisé, une mesure de justice sociale, mais qui ne doit pas se faire au détriment des médecins. Elle s'en est expliquée au « Quotidien » : « Il serait absurde de nier le fait que de nombreux Français renoncent à des soins faute d’argent. Je suis donc favorable à une réforme sociale qui attaque les inégalités à la racine et renforce les droits des patients. Cependant, je n’oublie pas que nous sommes dans un contexte où 50% des généralistes n’ont pas de secrétariats et ont des charges administratives très élevées. Je serai donc attentive à ce que les modalités techniques de la mise en œuvre du TPG soient à la hauteur des objectifs politiques, sans « surcharger » les médecins. »

Dr Dominique Orliac (RDG) : « Il y avait bien d’autres moyens pour mettre en place ce tiers payant généralisé »
CONTRE. Ophtalmologue, élue de gauche, la député du Lot a pourtant voté contre la généralisation du tiers payant. Sans être opposée au principe, elle regrette les modalités de mise en œuvre du dispositif et rappelle les craintes légitimes des médecins à son égard (déclarations à l'Assemblée nationale) : « De facto, les médecins pratiquent déjà un tiers payant social. Ils nourrissent tout de même quelques inquiétudes techniques et financières quant à sa généralisation. Comment, par exemple, procéderont ceux qui ne disposent pas de l’ADSL et de la fibre optique ? Il faudra résoudre ces problèmes. Ils sont aussi inquiets que cette mesure supprime du temps médical au profit du temps administratif, au seul préjudice des patients. En outre, certains médecins pressentent que derrière la généralisation du tiers payant se profile peut-être la fin programmée de notre Sécurité sociale, sa privatisation, par le transfert progressif de la protection sociale vers l’assurance privée, tous les Français ne pouvant plus dès lors accéder à des soins de proximité et de qualité. Les médecins ont également conscience que c’est l’accès aux équipements optiques et auditifs, aux soins dentaires, aux délais pour obtenir des rendez-vous chez les spécialistes qui soulève le plus de problèmes. Globalement, les médecins libéraux ne sont donc pas vraiment hostiles à la généralisation du tiers payant. Nous aurions quant à nous souhaité être entendus : nous avions proposé que cette généralisation soit précédée d’une expérimentation régionale et qu’une modulation en fonction des revenus s’opère, comme ce fut le cas avec les allocations familiales. Nous n’avons donc pas été entendus mais il y avait bien d’autres moyens pour mettre en place ce tiers payant généralisé. »

Dr Michèle Delaunay (PS) : « Une mesure de simplification très utile »
POUR. La député de Gironde, cancérologue de formation, a expliqué sa position à travers un billet publié sur son blog. « J’ai proposé, dans un but d’apaisement, de généraliser ce tiers payant en 2 temps législatifs, le second en novembre 2016, après un bilan de l’application du 1er temps. Ce premier temps, lui même échelonné selon l’agenda prévu, aurait compris toutes les situtations sociales (ex CMU) pour que ceux qui ont de faibles revenus puissent benéficier immédiatement du tiers payant. Il aurait compris aussi toutes les affections de longue durée (ALD) , y compris "la dernière maladie" (de la liste) qui réunit les grands âgés poly-pathologiques pour lesquels le tiers payant est, quel que soient les revenus, une mesure de simplification très utile. J’avais annoncé dans mon intervention que je voterais même si la ministre ne retenait pas cette solutions de compromis avec les professionnels de la santé, ce qui fut le cas. »

Dr Gérard Sebaoun (PS) : « Le libre choix du médecin n'est pas remis en cause »
POUR. Membre de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée, le député du Val-d’OIse a défendu la généralisation du tiers payant en séance publique le 31 mars : « Le tiers payant généralisé, dont je ne nie pas les difficultés techniques en raison notamment de l’éparpillement des mutuelles, signe-t-il, comme l’affirment les tenants d’un libéralisme désuet, la mort de la médecine libérale ? Arrêtons-nous quelques instants sur les quatre principes de la charte de la médecine libérale édictée en 1927, il y a près de quatre-vingt-dix ans. Le premier principe, c’est le libre choix du médecin par le patient. Il n’est nulle part remis en cause dans le texte. Le deuxième, la liberté de prescription, n’est pas davantage abordé. Le troisième, c’est la liberté tarifaire. Convenons ensemble qu’elle a depuis longtemps laissé place à la négociation conventionnelle, les honoraires libres du secteur 2 étant encadrés et par le code de déontologie et par la convention médicale. Quant au quatrième principe, le sacro-saint paiement à l’acte, il est défendu par les détracteurs du tiers payant avec une obstination à mes yeux déraisonnable. »

Dr Bernard Accoyer (UMP) : « Le système de soins va être étatisé »
Crédit photo : S. Toubon

Dr Pierre Morange (UMP) : « Un mécanisme de double peine administrative et financière »
CONTRE. Généraliste, le député des Yvelines dénonce un mécanisme de dopuble peine : « J’y suis totalement opposé. C’est un texte qui vise à une étatisation de la santé et qui n’est que le reflet d’une idéologie socialiste calcifiée. C’est un mécanisme de double peine administrative et financière pour les médecins mais aussi pour les patients. Administrative parce que cela va représenter un surcroît de travail qui va devenir insupportable pour les médecins, qui ne sera pas rémunérée et qui se fera au détriment des patients. Financière parce que cela entraînera une perte de recettes pour le cabinet, même si on nous promet des délais de paiement théoriques dont on sait qu’ils ne sont pas toujours respectés en pratique. C’est aussi une pénalité financière pour les concitoyens qui se verront ponctionner les franchises sur leur compte en banque et qui devront financer la mise en place de ce dispositif qui coûtera très cher à la Sécurité sociale. Si la ministre avait une volonté de justice sociale et sanitaire, elle s’occuperait d’abord du remboursement des frais d’optique et dentaire et du reste à charge pour les retraités. Là sont les véritables inégalités. »

Dr Philippe Vitel (UMP) : « Une nouvelle dévalorisation de l'acte »
CONTRE. Le chirurgien, député du Var, réfute les arguments de marisol Touraine concernant les difficultés d'accès aux soin et dénone l'étatisation de la médecine. « En tant qu’ancien médecin, j’y suis radicalement opposé. On m’a éduqué avec la notion de " tout ce qui ne coûtait rien ne valait rien ". L’acte est déjà mal valorisé, le tiers payant généralisé représente un recul de plus. Transformer les médecins en prestataires de service est totalement contraire au serment d’Hippocrate. Quant aux difficultés d’accès aux soins, c’est une ineptie. Dire qu’en France, on peut ne pas être soigné, c’est faux. J’ai été médecin pendant des années, je n’ai jamais vu un hôpital refuser un patient ni un médecin refuser de soigner quelqu’un quand il y avait un caractère d’urgence. L’objectif derrière la généralisation du tiers payant, c’est une étatisation de la médecine et d’amener les médecins à devenir des fonctionnaires. »

Pr Bernard Debré (UMP) : « Une mesure démagogique et inflationniste »
CONTRE. L'urologue ne croit pas aux vertus de la généralisation du tiers payant avancées par Marisol Touraine. Extrait de son argumumentaire développé dans l'hémicycle : « J’y suis très opposé : à mon sens, cette mesure est démagogique et inflationniste. Et ne dites surtout pas qu’elle ne poussera pas les malades à consulter davantage : ce sera évidemment le cas, nous le savons ! Vous avez raison sur un point : on ne peut pas faire de parallèle entre les pharmaciens et les médecins. Les pharmaciens ne prescrivent pas, ils ne font que remettre aux patients les médicaments qui ont été prescrits par les médecins. En revanche, vous affirmez que certains malades ne peuvent pas accéder aux soins. Mais de quels types de soins s’agit-il ? Des lunettes, des soins dentaires, des consultations ORL ! En somme, il s’agit de la médecine spécialisée, et non de la médecine générale. Je n’ai pas besoin de prendre d’autres exemples : le tiers payant ne permettra plus au patient de voir ce qu’il paie. Et ce serait, madame la ministre, une avancée ? Mais à ce compte-là, il faudrait aussi de ne pas faire payer le gaz, l’électricité ou les loyers, et tout rendre gratuit ! »

Dr Éric Alauzet (EELV) : « Une mesure légitime mais peu crédible dans sa mise en œuvre »

Dr Alain Marty (UMP) : « Une réforme qui n'apporte pas de réponse aux inégalités les plus criantes »
CONTRE. Gynécologue-obstétricien, le député de Moselle explique que le tiers payant ne résoudra pas les problèmes d'accès aux soins et qu'il créera une surconsommation médicale. Il s'en est expliqué au « Quotidien » : « Cette réforme aurait pour effet d'aboutir à une surcharge de travail administratif pour les médecins alors que leur agenda quotidien est déjà saturé. Elle est donc techniquement inapplicable. Ensuite, si la raison principale de cette réforme découle de la difficulté d'accès au soin de certains Français, elle n’apporte pas de réponse aux inégalités les plus criantes, celles qui amènent de très nombreuses personnes issues de la classe moyenne, encore et toujours oubliée du gouvernement socialiste, à refuser les soins dentaires ou optiques parce qu’elles sont exclues de la couverture maladie universelle. Cette généralisation du tiers payant ne devrait créer qu'une forme de surconsommation médicale, contre laquelle la sécurité sociale ne cesse paradoxalement de se battre, directement liée à une déresponsabilisation des patients. En effet, le reste à charge étant supprimé, il est craindre que ces derniers aient un sentiment de " gratuité ". Enfin, la réforme a été décidée sans aucun dialogue avec les principaux concernés, les médecins, alors qu’en France le prix de la consultation chez le généraliste est l’un des moins élevés d’Europe et que ce dispositif n’était réclamé par personne. »

Dr Gérard Bapt (PS) : « Cela ne remet pas en cause l'exercice libéral »
POUR. Le député de Haute-Garonne, cardiologue de formation, s’est exprimé au cours des débats de la loi de santé. Conscient des difficultées posées aux médecins par le dispositif de généralisation, il n’y voit pas un reniement de la médecine libérale. « Je ne pense pas que la grande majorité des médecins soit, sur le principe, opposée au tiers payant généralisé, même si nous ne méconnaissons pas les problèmes d’ordre administratif, technique, ou même financier que sa mise en œuvre pourra poser – nous l’avons déjà noté et Mme la ministre elle-même le reconnaît. » « J’aimerais par ailleurs faire remarquer que de nombreux médecins libéraux travaillent déjà, soit comme vacataires, soit comme salariés à temps partiel d’un établissement de santé, sous le régime du tiers payant. En ce qui me concerne, pour avoir connu successivement l’exercice salarié, dans le cadre hospitalo-universitaire, et un exercice mixte, puisque j’y ai conservé des vacations lorsque j’ai ouvert mon cabinet de groupe spécialisé, je ne comprends pas l’argument selon lequel on toucherait, avec le tiers payant, au principe même de l’exercice libéral. »