Pandémie et périnatalité : les décès évitables de mères et de bébés ont augmenté d’un tiers dans le monde

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Publié le 01/04/2021
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Crédit photo : PHANIE

Les taux de mortinatalité et de décès maternels ont augmenté d’environ un tiers au cours de la pandémie de Covid-19, principalement dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire, révèle une méta-analyse publiée dans « The Lancet Global Health ».

« La pandémie a eu un impact profond sur les systèmes de santé, commente la Pr Asma Khalil, obstétricienne à l’université St George de Londres, qui a codirigé l’étude. Les perturbations causées ont conduit à des décès évitables de mères et de bébés. »

Les auteurs se sont penchés sur 40 études publiées entre le 1er janvier 2020 et le 8 janvier 2021 dans 17 pays, regroupant les données sur plus de 6 millions de grossesses. Les études sur les femmes infectées par le SARS-CoV-2 n’ont pas été retenues pour se concentrer sur les impacts collatéraux de la pandémie.

Une dégradation de la santé mentale

À côté d’une augmentation globale des risques de mortinatalité et de décès maternel, l’analyse révèle une dégradation de la santé mentale des mères. Sur les 10 études abordant cet aspect, six mentionnent une hausse de la dépression postnatale et de l’anxiété maternelle, là aussi plus marquée dans les pays à plus faibles revenus.

Le taux de recours à la chirurgie pour le traitement des grossesses extra-utérines a lui aussi augmenté avec un niveau presque 6 fois plus élevé en raison d’une prise en charge plus tardive. Alors que la découverte précoce d’une grossesse extra-utérine limite la chirurgie, l’augmentation observée pourrait indiquer un recours plus tardif aux soins par les femmes. Aucun changement n’a en revanche été observé pour d’autres complications, comme le diabète gestationnel, les troubles de la grossesse liés à l’hypertension artérielle, les taux de césarienne ou d’accouchement vaginal spontané.

Si les taux de naissances prématurées sont restés globalement stables, cette évaluation globale masque une disparité selon les niveaux de revenu. Dans les pays à revenu élevé, le risque de naissance prématurée a diminué de près de 10 % pendant la pandémie. Selon les auteurs, cette tendance correspond à une baisse des naissances prématurées spontanées, plutôt que de celles nécessitant un déclenchement précoce du travail ou une césarienne. Des « leçons précieuses » sont ainsi à tirer, soulignent les auteurs, sur la prise en charge et l’adaptation des comportements pendant une grossesse.

Plaidoyer pour prioriser les maternités

Plus globalement, les auteurs estiment que la dégradation observée « pourrait être principalement due à l’inefficacité des systèmes de soins de santé et à leur incapacité à faire face à la pandémie, plutôt qu’à la rigueur des mesures d’atténuation de la pandémie ».

La lutte contre la pandémie s’est traduite par un accès réduit aux soins, avec un effet plus important parmi les populations les plus fragiles, quel que soit le pays. Dans les pays les plus pauvres, les consultations prénatales se sont interrompues. Dans les pays à revenu élevé, une partie de la prise en charge a rapidement été assurée via des téléconsultations, excluant les patientes sans accès à Internet.

Les auteurs s’alarment également du redéploiement des équipes soignantes des maternités en soutien à d’autres services au plus fort de la crise. Face aux effets délétères constatés, ils plaident, à l’instar du Collège royal des obstétriciens et gynécologues (Royaume-Uni), pour exclure des plans d’urgence les soignants des maternités. « Nous recommandons vivement de donner la priorité à une dotation sécurisée en personnel pour les services de maternité à toutes les phases de la riposte à une pandémie », écrivent-ils.


Source : lequotidiendumedecin.fr