Yves Charpak, épidémiologiste

« Non au Chinese bashing »

Publié le 10/02/2020
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LE QUOTIDIEN : La Chine en fait-elle assez pour protéger les soignants face au coronavirus ?

Pr YVES CHARPAK : Je ne comprends pas le «Chinese bashing». Alors qu’en France, seul un faible nombre des masques stockés depuis l’épidémie de H1N1 ont été renouvelés et que la plupart des masques disponibles dans les réserves sont périmés (bien que cette notion soit assez subjective), on peut constater que les chinois ont pris à bras de corps cette épidémie d’une façon collective, impressionnante et brutale qui peut s’expliquer par cette situation d’incertitude. Il semble que le pays ait été doté de protocoles sanitaires et de stocks de masques en prévention d’une épidémie débutante de ce type, selon les règles du Règlement Sanitaire International (RSI). On ne sait pas si la mise en quarantaine de villes entières, si l’arrêt de certains transports, si la construction d’hôpitaux géants est l’outil idéal de prise en charge épidémique, mais on ne dispose pas de tous les paramètres. On peut espérer que l’épidémie ne va pas exploser dans le monde grâce à ces mesures, mais actuellement on est en phase croissante.

La mise en place de mesures de protection des populations et en premier lieu des soignants dans la population chinoise semble avoir été effective. Sera-t-elle efficace ? Toujours est-il que les mesures d’hygiène – même si elles ne font pas l’objet de recherches dont les publications pourraient être acceptées par des revues prestigieuses – sont essentielles pour la prévention de la diffusion des maladies respiratoires telles que la grippe ou le 2019-nCoV.

Rapatrier nos concitoyens est une forme de négation des capacités de prise en charge du système sanitaire chinois et donc de ses médecins. Il s’agit d’une mesure de santé publique qui pourrait être contre-productive puisque de potentiels malades sont rapatriés sur le sol français.

Propos recueillis par le Dr I.C.

Source : Le Quotidien du médecin