LA COHORTE ELFE (elfe-france.fr) a été lancée le 1er avril, rencontrant un bon accueil auprès des familles approchées : une famille sur deux a accepté de faire partie de l’étude qui les implique, en principe, pendant 20 ans. Sur les 20 000 enfants attendus, 7 400 ont déjà été recrutés dans différentes maternités, tirées au sort en tenant compte de leur activité « pour pouvoir pondérer l’échantillon de naissances » (360 maternités au total).
« Il était temps de constituer une grande cohorte en France », se félicite Chantal Cases, directrice de l’Institut national d’études démographiques (INED). L’étude, pilotée par l’INED avec l’INSERM et l’établissement Français du sang, est largement interdisciplinaire. Une soixantaine d’équipes de chercheurs y sont associés pour des premiers résultats attendus dès 2013. Mais il faudra toutefois être plus patients pour bénéficier des enseignements d’ELFE, en espérant qu’il y ait le moins de déperdition possible. Les parents savent déjà ce qui les attend : il y a les questions à la maternité (certains échantillons biologiques sont également prélevés), le premier entretien 6 à 8 semaines après l’accouchement, les rendez-vous annuels jusqu’aux 4 ans de l’enfant, avec des entretiens plus espacés ensuite. L’originalité d’ELFE est aussi d’impliquer le père même si, par la suite, le couple se sépare, précise Bertrand Geay, directeur adjoint de l’étude et sociologue (université de Picardie).
Orienter les politiques.
« Le panel longitudinal est l’instrument le plus riche pour analyser ce qui se passe à l’école », explique Christian Baudelot, membre du conseil scientifique d’ELFE. La première enquête longitudinale de grande ampleur, menée en 1962 par l’INED, avait déjà « bouleversé le regard » sur l’école, se souvient le sociologue (ENS). Elle avait montré que, dès la fin du CM2, « les jeux étaient faits, puisque 76 % des enfants de cadres étaient à l’heure tandis que 64 % des enfants d’ouvriers accusaient déjà une ou plusieurs années de retard ». À l’époque, le niveau d’instruction des parents, et de la mère en particulier, constituait « le facteur le plus explicatif des écarts observés ». Qu’en est-il aujourd’hui ? Certes, les panels de l’éducation ont pris le relais, mais ils ne concernent que les élèves à partir de la sixième. En déplaçant « la chaîne de causalités vers l’amont », ELFE va permettre d’aller plus loin, promet Christian Baudelot : « On va pouvoir reconstituer les parcours et les cheminements dès la naissance. »
Delphine Chauffaut, responsable du département recherche à la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), attend également beaucoup de l’étude. « Ainsi, si nous connaissons l’offre d’accueil des jeunes enfants, nous ne savons pas quels sont les parcours de garde des enfants : une fois dans un mode d’accueil, y restent-ils trois ans », s’interroge la chercheuse. Pourquoi les centres de loisirs, appréciés des jeunes enfants, sont-ils délaissés par les adolescents ? ELFE devrait apporter, autre exemple, des informations sur les dispositifs de soutien à la fonction parentale : qui les fréquente, pourquoi, combien de temps ?
Agnès Florin, professeur de psychologie de l’enfant et de l’éducation (université de Nantes), présente plutôt ce qui pourrait se rapporter aux différents aspects de l’évolution de l’enfant. « ELFE permettra de mettre en évidence à la fois les facteurs de risques et de protection pour le développement des enfants, avec des applications possibles dans des programmes d’éducation, de santé publique, de formation des professionnels de l’enfance et de l’adolescence », souhaite la spécialiste. L’étude sera aussi l’occasion de croiser le regard des adultes qui s’occupent de l’enfant et le point de vue de l’enfant lui-même sur sa propre vie, dès lors qu’il pourra s’exprimer (et s’il continue à vouloir poursuivre l’aventure).
Les enseignements de l’étude ELFE, qui s’appuie sur les travaux de recherche précédents, promettent donc d’être riches et devraient orienter, à terme, les politiques sociales et scolaires. Et alors que les bébés de fin d’année finissent d’être recrutés, ceux du printemps livrent déjà les premières informations sur la diversification alimentaire.
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