LE QUOTIDIEN – Comment accueillez-vous les projets affichés par le gouvernement pour la médecine de proximité ?
Dr JEAN-MARIE LE GUEN – J’ai l’impression que le président de la République essaie davantage de répondre à son propre malaise électoral qu’au malaise des professionnels de santé. Dans ses annonces, on ne perçoit ni une vision, ni un projet. Ce qui lui tient à cœur, c’est d’essayer d’apaiser quelques souffrances, de dissiper amertume et désillusion. Mais finalement, que propose-t-il ? Quelques zakouski de rémunération dont on ne saisit pas bien les raisons fondamentales.
Le rapport Hubert inspire en partie les décisions de Nicolas Sarkozy. Qu’avez-vous pensé de ce travail ?
Dans sa partie « constat », il est très intéressant. Il montre en particulier que la gravité de la situation va bien au-delà de ce qui était admis jusqu’à présent par les pouvoirs publics. Il montre l’ampleur des problèmes structurels (d’accès aux soins, par exemple), met en avant le malaise psychologique des médecins, leur perte de confiance…
Quant aux préconisations d’Élisabeth Hubert, certaines sont intéressantes, notamment sur le moyen et le long terme, en matière d’études médicales en particulier. Car il va falloir avoir un débat sérieux avec les doyens sur la nécessité de former des médecins qui vont être des médecins « soignants ». Et il va falloir dans le même temps muscler la compétitivité des facultés de médecine françaises en matière de recherche. Entre ces deux objectifs, un dégradé est à trouver.
Et l’urgente informatisation du système de santé ?
Élisabeth Hubert a, là aussi, parfaitement raison, il s’agit d’une clé fondamentale pour l’organisation de la santé. Je remarque toutefois que jusqu’à maintenant, ce dossier des systèmes d’information est une plaie douloureuse – pour ne pas dire un échec complet – de l’actuelle majorité…
Par ailleurs, je regrette que le rapport soit trop discret sur la question des transferts de compétences entre professionnels. Dans un même ordre d’idées, Élisabeth Hubert s’arrête également au bord de la rivière en matière de coopérations et de nouveaux modes d’exercice : il faut bouger et bouger vite car tout le monde souffre ! Mais ce ne sont pas les médecins, qui ont le nez dans le guidon et sont proches du burnout, qui vont préparer les choses ; c’est à nous de le faire. Là-dessus, le président de la République ne prend que la mousse des choses !
Nicolas Sarkozy a lancé pour 2011 le chantier de la rémunération des généralistes. L’architecture en plusieurs étages proposée par le rapport Hubert vous convient-elle ?
Je ne crois pas une seconde à cette histoire ! Telles qu’elles nous sont décrites, les nouvelles rémunérations sont d’un alambiqué… Les mettre en œuvre, c’est rentrer dans un cycle de complexification absolue, de contrôles ; ce n’est pas la solution. Il faut avoir le courage de passer progressivement à des formes de rémunérations forfaitaires.
Globalement, la philosophie de la droite n’est pas encore fixée : la majorité oscille entre un minimum de régulation – c’était la loi Bachelot – et le laisser-faire – c’est ce que l’on observe aujourd’hui. Le problème est que le laisser-faire débouche fatalement par des contrôles tandis que la régulation est forcément coercitive. Au Parti socialiste, nous préférons nous placer dans une perspective de refondation.
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