LE GOUVERNEMENT constate que l’extension du mariage aux homosexuels fait l’objet d’une contestation de plus en plus nourrie et, parfois, violente. Que l’affaire Cahuzac a affaibli l’autorité du président de la République et du Premier ministre. Et que le risque existe d’une manifestation d’une telle ampleur qu’elle remetrrait en question le projet, comme ce fut le cas pour l’école libre en 1984 : devant l’hostilité des opposants catholiques à une réduction des avantages accordés aux écoles religieuses et privées, François Mitterrand renonça à sa loi.
Un tour inquiétant.
Bien que la question du mariage des homosexuels n’ait pas soulevé dans le pays une opposition comparable à celle d’il y a 29 ans, les remous qu’elle soulève dans un pays déjà déchiré par la crise économique et par les affaires risquent de devenir rapidement incontrôlables. La lutte contre le mariage homo a d’ailleurs pris un tour inquiétant. D’abord, elle commence à échapper aux organismes ou associations qui, jusqu’à présent, la contrôlaient. Ensuite, elle permet aux homophobes de s’exprimer avec une intolérance pour les homosexuels dont les amis de Frigide Barjot se défendaient. Non seulement, elle leur nie aux quelques droits civiques élémentaires, mais elle s’accompagne d’opérations de harcèlement qui portent atteinte à la vie privée.
La sénatrice Chantal Jouanno (UDI), le député Vert François de Rugy, la journaliste et essayiste Caroline Fourest ont été victimes d’un harcèlement de la foule à leur domicile et, dans le cas de Mme Fourest, d’incidents violents où son intégrité physique était menacée. Tout ça parce qu’ils sont en faveur de la loi.
Jean-Pierre Raffarin estime que le gouvernement n’est pas innocent dans l’escalade de la violence. Il aurait pu, estime-t-il, recourir au référendum et tenir compte d’une opposition nombreuse au projet de loi. Mais peut-on se servir à tout bout de champ de la consultation populaire alors que l’Assemblée et le Sénat sont là pour légiférer ? Le projet a été adopté par un Sénat qui semblait plutôt divisé en la matière. Il y a bel et bien une majorité parlementaire en faveur du mariage pour tous ; elle épouse une autre majorité populaire apparue dans les sondages. Non seulement l’opposition de droite a voulu, mais en vain, en faire un os à ronger pour le peuple, mais l’idée que, en temps de crise aiguë, la France pouvait différer ce débat de société sera vaincue par un vote solennel qui nous permettra de passer à autre chose. Car il est vrai que, promesse électorale ou non, nous avons d’autres priorités.
Vous n’avez qu’à abroger.
Ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, dans un souci apparent d’apaisement, suggère à la droite d’abroger la loi quand elle sera au pouvoir, un peu comme M. Hollande s’est employé depuis près d’un an, à « désarkozyser » le pays. M. Vidalies est peut-être optimiste et croit au fond de lui-même que François Hollande sera réélu. Mais, même s’il ne l’est pas, une loi qui serait en vigueur en France après avoir été adoptée par d’autres pays, qui correspondrait en outre à un progrès contre tous les conservatismes, qui apporterait à une partie de la population la tolérance dont elle a besoin au même titre que d’autres minorités ne saurait être tout à fait mauvaise. Il n’est pas sûr du tout qu’après avoir fait l’objet d’une si vigoureuse opposition, le mariage pour tous ne passe pas dans les mœurs. Il ne faut pas oublier que l’abolition de la peine de mort a été prononcée contre une majorité de Français, lesquels, aujourd’hui, s’en accommodent fort bien, en dépit d’une résurgence regrettable de la criminalité.
C’est dans les réformes de société que les socialistes excellent, bien plus que dans la gestion économique et sociale du pays. Nous avons reçu beaucoup de courrier pour contester notre prise de position en faveur du mariage gay et, tout en respectant le point de vue de nos correspondants, nous ne pouvons pas nous résigner à écarter une liberté qui figurera, il est vrai, parmi celles que le PS a apportées au pays. Nous ne sommes pas dans l’opposition automatique, celle que dicte l’engagement partisan. Surtout si elle combat des acquis auxquels les gens de droite ou de gauche se sont tous habitués.
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