États-Unis, Italie

Le comble de l’irresponsabilité

Publié le 03/10/2013
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Crédit photo : AFP

LA RÉFORME, qui consiste à prévoir une assurance-maladie pour la totalité des citoyens américains et les oblige tous à cotiser modérément, a été votée par le Congrès, et a franchi les obstacles juridiques que le Tea Party avait érigés, y compris par un recours devant la Cour suprême, laquelle l’a entérinée. Les élus républicains les plus hostiles à la réforme se livrent donc à une sorte de baroud d’honneur, d’ultime offensive désespérée pour contraindre M. Obama à reculer. Il a refusé de négocier avec eux parce qu’il n’y a aucun rapport entre une loi adoptée conformément à toutes les règles en vigueur et l’adoption du budget. Le résultat de ce bras-de-der, qui n’est pas sans rappeler celui qui avait opposé Bill Clinton aux républicains pendant plusieurs mois en 1995, c’est la mise au chômage technique de 800 000 fonctionnaires et l’arrêt pur et simple de diverses prestations de services fournies par l’administration fédérale. Bien entendu, la sécurité intérieure et extérieure, le contrôle aérien et les services de base sont assurés. Si le blocage durait plusieurs semaines, l’Amérique entrerait dans une nouvelle crise économique, sociale et morale.

LE TEA PARTY N’EST PLUS CYNIQUE IL DEVIENT IDIOT

L’agression républicaine contre M. Obama est due au fait que, lors des dernières élections législatives, le Tea Party a réussi à faire élire de nombreux élus à la chambre, de sorte que la nouvelle majorité veut défaire ce qu’a fait l’ancienne. Pour autant, on ne peut pas changer un texte qui a été adopté et validé par les plus hautes instances juridiques. En outre, le Tea Party, loin de soulever l’enthousiasme des Américains, leur inspire inquiétude et aversion. Il y a longtemps que la classe politique fait l’objet du scepticisme ou de l’hostilité populaires et, à terme, les électeurs démocrates ou républicains modérés vont exiger qu’il soit mis un terme à cette pantalonnade indigne d’un grand pays. C’est la « fermeture » des services fédéraux en 1995 et la colère consécutive du peuple qui ont assuré sa réélection à Bill Clinton en 1996. Non sans courage, M. Obama, dans un discours prononcé lundi soir, s’est montré inébranlable, ce qui, à notre avis, se traduira par une nouvelle perte de popularité de l’opposition républicaine. Le Tea Party voudrait que les démocrates gagnent les législatives de novembre 2014 qu’il ne s’y prendrait pas mieux.

Il y a aussi le fond de l’affaire : le Tea Party n’a aucun bon argument à apporter à la défense de son point de vue, sinon un libéralisme économique absurde en l’occurrence, qui consiste à nier aux gens le droit d’être protégés contre la maladie (et la mort) même s’ils sont pauvres. Déjà, dans la polémique sur la circulation des armes aux États-Unis, les partisans du port d’armes pour tous en sont à dire que ce ne sont pas les pistolets ou les fusils qui tuent mais ceux qui en ont. On n’a jamais rien entendu de plus spécieux, sauf dans les pays à régime autoritaire. De la même manière, le Tea Party estime que la maladie est une affaire privée et que si un citoyen souffre d’un cancer, c’est son problème, pas celui de son voisin. Il n’est plus cynique, il devient idiot.

Le cas de l’Italie.

Au moment où nous nous plaignons beaucoup de la gouvernance en France, nous serions moins désolés si nous regardions ce qui se passe ailleurs. L’Italie, par exemple. Silvio Berlusconi, 76 ans, condamné par la justice, se venge d’elle en retirant du gouvernement Letta les cinq ministres de son parti, « Il Popolo della Libertà ». Enrico Letta, Premier ministre de centre-droit n’a donc plus de majorité. L’Italie souffre d’une crise sans précédent. Sa dette atteint des sommets, des mesures de redressement doivent être adoptées pour poursuivre et achever le travail commencé par Mario Monti. Les élections qui ont permis la constitution d’une coalition sont récentes, il serait donc très difficile de dissoudre l’Assemblée et de retourner aux urnes. Le parti « 5 Stelle », dirigé par un autre irresponsable, Beppe Grillo, qui a réuni 25 % des voix, refuse de participer au gouvernement. Dans ces conditions, que faire ? Il serait bon que la justice italienne applique d’abord la peine subie par Berlusconi, inéligibilité et prison ferme. Et que les députés « grillistes », largement déçus par leur leader, proposent leurs services à M. Letta.

RICHARD LISCIA

Source : Le Quotidien du Médecin: 9268