La quasi-totalité des femmes (90 %) en situation de précarité ou de vulnérabilité cumulent des facteurs de risque cardiovasculaires, sans pour autant être correctement suivies, met en lumière une enquête de terrain conduite par le Fonds de dotation Agir pour le cœur des femmes.
En 2021, le Bus du cœur a offert à 1 065 femmes de 15 à 90 ans (52 ans en moyenne) un dépistage cardiovasculaire, métabolique et gynécologique, dans le cadre d'une opération de prévention itinérante dans cinq villes : Lille, Marseille, Avignon, La Rochelle et Saint-Étienne. Leurs données anonymisées ont ensuite été analysées par une équipe de chercheurs du CHU de Lille, pilotée par le statisticien Patrick Devos, et la Pr Claire Mounier-Véhier, cofondatrice d'Agir pour le cœur des femmes.
Hypertension artérielle non contrôlée
Parmi les femmes reçues par le Bus du cœur, 43 % ont une hypertension non contrôlée, supérieure à 140/90. Plus d'un tiers d'entre elles la découvrent lors du dépistage ; chez les autres déjà traitées pour cette maladie, 72 % ne sont pas contrôlées. En outre, une sur cinq présente une hypertension artérielle sévère de grade 2 ou 3, facteur de risque critique de l'accident cardiovasculaire. Même lorsqu'elles cumulent deux facteurs de risque (ce qui est le cas de 90 % d'entre elles), la majorité des femmes (70 %) ne sont pas suivies par un cardiologue ou un médecin vasculaire. Et 11 % n'ont plus de médecin traitant.
De même, le suivi gynécologique de ces femmes est défaillant pour 30 % d'entre elles (qui n'en ont pas depuis trois ans) ; 22 % ne sont pas à jour dans leur suivi mammographique. Parmi celles qui prennent une contraception avec œstrogène de synthèse, 76 % présentent au moins une contre-indication (âge supérieur à 35 ans, IMC supérieur à 30 kg/m2, tabagisme). Inquiétant, 43 % des femmes reçues par le Bus cumulent deux facteurs de risque cardiovasculaires et deux facteurs gynéco-obstétricaux, synonyme d’une entrée certaine dans la maladie cardiovasculaire à moyen ou long terme.
Enfin, 68 % des patientes dépistées sont en surpoids ou en obésité, et 73 % souffrent d'une obésité abdominale ; 67 % déclarent se sentir en état de stress, et 26 % ont un syndrome dépressif, autant de risques majeurs d'accident cardiovasculaire, qui ont pu être aggravés par la pandémie et ses confinements. « Le Covid-19 a joué un rôle d'accélérateur d'entrée dans la maladie cardiovasculaire en retardant le diagnostic et en accentuant la vulnérabilité de ces femmes », lit-on dans l'étude.
Une nouvelle tournée dans 20 villes en 2022
Dès le 9 mars prochain, le Bus du cœur repart pour une tournée de 20 villes en commençant par Cannes, avec l'objectif de toucher 4 000 femmes vulnérables. « Quand on sait que chez les femmes, les facteurs de risque classiques comme le poids, l'hypertension artérielle, le cholestérol, le tabac et le stress ont un impact plus délétère sur leurs artères, on comprend l'urgence de développer des campagnes prioritairement vers les femmes en situation de vulnérabilité », commente la Pr Mounier-Véhier.
L'équipe du Bus espère en outre faire tache d'huile : chacune des femmes dépistées devient un relais de la prévention ; et les professionnels de santé locaux qui les reçoivent dans chaque ville peuvent les inscrire dans un parcours de santé, avec des rendez-vous planifiés. « Notre ambition n'est pas de proposer un dépistage ponctuel, mais bien d'inciter à la pérennité d'une prise en charge adaptée », poursuit la cardiologue du CHU de Lille.
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