L’hydroxychloroquine peut-elle guérir les patients atteints de Covid-19 ? L’hypothèse formulée par le Pr Didier Raoult est séduisante et prise au sérieux par les autorités qui tentent d’esquiver une polémique frontale au début de l’épidémie. Le Pr Raoult est convié à siéger au Conseil scientifique ; Emmanuel Macron lui rend visite à l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection.
L’HCQ est intégrée dans les grands essais cliniques, l'essai européen Discovery, porté par le consortium REACTing, puis l’essai Solidarity de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Dans les officines, l’HCQ est victime de sa notoriété.Un décret publié au « Journal officiel » le 26 mars vient encadrer les conditions de délivrance du Plaquenil pour éviter les risques de rupture, préjudiciables pour les patients qui en ont besoin en rhumatologie. L’HCQ peut être prescrite contre le Covid-19, mais seulement à l’hôpital dans le cadre d’un protocole strict.
Alors que la controverse scientifique autour de l’HCQ enfle au printemps à coups d’études contradictoires, la publication dans « The Lancet » de l’étude du Pr Mandeep Mehra le 22 mai fait l’effet d’un coup de tonnerre. L’hypothèse avancée d’une surmortalité chez les patients Covid traités par HCQ entraîne la suspension des essais cliniques français et internationaux. Le 27 mai, le gouvernement abroge le décret encadrant la prescription de l'HCQ dans le Covid. « Que ce soit en ville ou à l’hôpital, cette molécule ne doit pas être prescrite pour les patients atteints de Covid-19 », explicite le ministre de la Santé Olivier Véran.
Mais plus d'une centaine de scientifiques ne tardent pas à mettre en cause la méthodologie, jusqu'à ce que, second coup de tonnerre, le 4 juin, « The Lancet » annonce le retrait qui reposait sur des données frauduleuses fournies par Surgisphere, une start-up créée par… le quatrième auteur de l’étude. Triomphe à Marseille et chez les « partisans » de l’HCQ.
Résultats décevants
Mais le « Lancet Gate », s’il est un cas grossier de fraude scientifique dans le cadre d’une course à la publication, ne prouve pas pour autant l’efficacité de l’HCQ. Début juin, les Britanniques promoteurs de l'essai Recovery, le seul à ne pas avoir été interrompu lors de la publication du « Lancet », annoncent l’arrêt de l’inclusion dans le bras HCQ au motif que ce traitement ne montre « pas d’effet bénéfique » pour les patients atteints du Covid-19, ni pour la mortalité à 28 jours, ni pour la durée d’hospitalisation.
Puis après une première interruption, c’est au tour de l’OMS de cesser, au sein de Solidarity, les inclusions de patients dans les bras hydroxychloroquine le 18 juin. Le traitement n'a pas permis de réduire significativement la mortalité à 28 jours, ni d’améliorer l’instauration d’une ventilation et la durée d’hospitalisation.
En novembre, se clôture l’étude Hycovid lancée en avril au CHU d’Angers, au vu de l'absence d'effet de l’HCQ sur l’évolution clinique et l’évolution de l’excrétion virale chez les patients atteints de Covid-19 léger à modéré et présentant un risque plus élevé d’aggravation.
En prophylaxie, une étude randomisée publiée dans « The New England Journal of Medicine » semble montrer l’absence d’efficacité de l’HCQ en post-exposition, tandis qu’un second essai randomisé américain chez des professionnels de santé trouve des résultats semblables, cette fois en pré-exposition.
Ces déconvenues ne découragent pas les partisans de l’HCQ, qui défendent, au-delà de la molécule, une certaine vision de la médecine, de la science et de la liberté de prescrire. Quitte à croiser le fer devant les tribunaux. Le Pr Raoult a ainsi déposé plainte auprès du parquet de Paris pour « dénonciation calomnieuse » contre Martin Hirsch, directeur de l’AP-HP, qui l’avait accusé de faux témoignage, mais aussi contre l’Ordre des Bouches-du-Rhône, qui a lancé une procédure contre lui.
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