L’usage de drogues (opioïdes, tabac, alcool, cocaïne, cannabis) augmenterait le risque d’infection au Covid-19 ainsi que celui d’une forme sévère (hospitalisation, décès). Ce constat est issu d’une étude américaine, publiée dans « Molecular Psychiatry », qui s’est penchée sur les dossiers de santé électroniques (non identifiables) de plus de 73 millions de patients, parmi lesquels plus de 7,5 millions signalaient un diagnostic d’usage (dont plus de 700 000 dans la dernière année).
Dans cette cohorte, un peu plus de 12 000 patients ont reçu un diagnostic de Covid-19, dont environ 1 880 avaient consommé des drogues au cours de la dernière année. Cette population est ainsi surreprésentée parmi les patients atteints par la pandémie : ils représentent 10,3 % du panel, mais 15,6 % des cas de Covid-19.
L’effet constaté était plus marqué chez les consommateurs d’opioïdes (OR ajusté à 10,244), suivi par les fumeurs (OR ajusté à 8,222). Les patients consommateurs atteints de Covid-19 avaient également un moins bon pronostic : 41 % d’entre eux ont été hospitalisés, contre 30 % dans l’ensemble, et 9,6 % sont décédés, contre 6,6 %.
Des facteurs médicaux, mais aussi comportementaux et socio-économiques
Le constat est particulièrement exacerbé chez les Afro-américains avec un usage de drogue récent, qui souffrent en moyenne, plus que leurs homologues blancs, d’hypertension, de diabète et maladies cardiovasculaire ou rénale. Ils avaient ainsi quatre fois plus de risque que les Blancs (également consommateurs) d’avoir le Covid et avaient également un pronostic moins bon en cas d’infection (hospitalisation à 50,7 %, contre 35,2 %, et décès à 13,0 %, contre 8,6 %).
« Les poumons et le système cardiovasculaire sont souvent compromis chez les usagers de drogue, ce qui peut expliquer en partie leur sensibilité accrue au Covid-19 », explique la Dr Nora Volkow, co-auteure de l’étude et Directrice du National Institute on Drug Abuse (NIDA). Les résultats suggèrent également que « des effets pharmacologiques spécifiques de l'abus de drogues (par exemple, une dépression respiratoire induite par les opioïdes) » et des facteurs comportementaux et socio-économiques pourraient faciliter l'infection au Covid-19 et augmenter le risque de complications.
« Un autre facteur contributif est la marginalisation des personnes atteintes de toxicomanie, qui rend plus complexe l’accès aux services de santé, avance la Dr Nora Volkow. Il incombe aux cliniciens de relever les défis uniques de la prise en charge de cette population vulnérable, comme ils le feraient pour tout autre groupe à haut risque ». Les auteurs invitent également à prendre en compte ce constat dans la stratégie qui sera définie lorsqu’un vaccin ou des traitements seront disponibles.
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