C’ÉTAIT TROP BEAU : une affaire rondement menée, avalisée par l’ONU et qui, comme l’a rappelé Alain Juppé, a permis d’éviter un bain de sang à Benghazi. L’encre de la résolution 1 973 n’était pas encore sèche que tout le monde se ravisait ; d’abord la Chine et la Russie, toutes étonnées de n’avoir pas utilisé leur veto et qui trouvent aujourd’hui toutes sortes de défauts à l’intervention. Le comble du culot, c’est un représentant de la Tchétchénie (soumise par la force à Moscou), qui dénonce une bataille contre l’islam ; ensuite, l’Italie, tiraillée entre un Berlusconi plutôt favorable aux opérations aériennes et un Franco Frattini, ministre des Affaires étrangères, très ombrageux depuis que la France a pris le leadership de l’opération ; puis, en Grande-Bretagne, le Parlement qui critique le Premier ministre David Cameron tout en admettant qu’il y a bel et bien une dimension humanitaire dans l’intervention ; ici, en France, Martine Aubry approuve l’initiative de Nicolas Sarkozy mais lui reproche « d’avoir perdu trois semaines ». S’il avait envoyé les avions français dans l’espace aérien libyen sans l’aval de l’ONU, elle lui aurait reproché l’illégalité de son action ; enfin, Barack Obama lui-même, soumis à un tir de barrage du Congrès qui rappelle fièrement qu’il est le seul à pouvoir déclarer la guerre à un pays étranger. Alors, Obama en fait trop ? Non, pas assez : il a eu l’audace de programmer un périple en Amérique latine alors que les pilotes américains risquaient leur vie dans le ciel de Tripoli. Du coup, le malheureux président fait diffuser des photos le montrant en conciliabule avec ses conseillers pendant son séjour au Brésil.
Ego froissés et intérêts bousculés.
La plupart de ces critiques sont dérisoires dans la mesure où elles révèlent seulement des ego froissés, des intérêts bousculés, de la jalousie pure et simple face à une opération dont personne ne peut nier le succès technique et militaire. Le secrétaire général de la Ligue arabe, l’Égyptien Amr Moussa détient la palme de la mauvaise foi : il a affirmé que les raids occidentaux dépassaient le mandat de l’ONU. Mais il a dû se raviser quand le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki Moon, est allé lui rendre visite au Caire pour lui demander de prendre ses responsabilités et de ne pas raconter d’histoires. C’est cet homme-là, dont on peut discuter le sérieux, qui souhaite devenir président de l’Égypte (mais ne semble pas avoir une chance). Pour la Chine et la Russie, chacun sait que leur cynique diplomatie est axée sur le respect des régimes en place avec qui ont peut faire de bonnes affaires et qu’elles se moquent comme d’une guigne des droits de l’homme, fût-il russe ou chinois.
L’affaire se complique quand on cherche à savoir qui dirige cette machine d’une incroyable précision dont les tâches sont parfaitement assignées et dont les actions sont d’une cohérence absolue. Dimanche dernier,on a cru comprendre que les Américains avaient pris la direction des raids, mais ce n’est pas aussi clair. S’il est évident qu’il y une cohésion entre commandements français et britannique, l’ensemble de la stratégie ne semble pas avoir été défini avec une très grande précision. La France affirme qu’il n’est pas question de déposer Mouammar Kadhafi, M. Obama dit, non sans réalisme, qu’il faut en finir avec le dictateur. D’ailleurs l’aviation américaine se concentre sur les palais de Kadhafi à Tripoli, avec le vain espoir d’en faire une victime collatérale.
L’OPÉRATION CESSERA QUAND LES PRINCIPAUX OBJECTIFS AURONT ÉTÉ DÉTRUITS
L’autre aspect ennuyeux de l’opération, c’est le temps qu’elle va durer. Nicolas Sarkozy, qui allé rendre visite aux pilotes français à Solenzara (Corse), garde son sang-froid et les frappes se succèdent aux frappes. Le cours de la guerre civile en est-il inversé ? M. Obama a indiqué que l’intervention des États-Unis cesserait quand les cibles structurelles auront été détruites, ce qui est en contradiction avec la disparition souhaitée de Kadhafi. Certes, les rebelles, armés par les Occidentaux, s’organisent pour livrer de dures batailles à Misrata et à Ajdabiya. Mais les forces loyalistes forment des boucliers humains, et se battent avec une cruauté rare. L’objectif de l’intervention est donc le suivant : permettre aux insurgés de lutter à armes égales avec les soldats de Kadhafi, après avoir supprimé l’artillerie, les chars et les avions du dictateur. La révolution libyenne n’est pas au bout ses peines.
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