Les résultats définitifs de l'essai marseillais de phase II sur le candidat vaccin anti-VIH développé par la firme Biosantech ont été publiés vendredi 1er avril dans la revue « Retrovirology ». Comme l'avait estimé le Pr Jean-François Delfraissy, il ne s'agit pas encore de la révolution thérapeutique annoncée par la firme. « Le but de cette étude n'a jamais été de prouver l'efficacité de ce vaccin mais de déterminer la dose la plus prometteuse et la plus sûre », explique le Dr Isabelle Ravaux, du service des Maladies infectieuses de l'hôpital de la Conception (AP-HM), qui a dirigé les travaux, chagrinée par « l’emballement » autour de la communication de Biosantech.
Le vaccin contenant la protéine virale Tat Oyi (isolés chez des virus identifiés femmes gabonaises capables d'éliminer les cellules infectées par le VIH) a été administré à 48 patients volontaires sous trithérapie et chez qui la charge virale était indétectable depuis plusieurs années. « Il fallait des patients avec une charge virale indétectable depuis longtemps si l'on voulait se risquer à faire des arrêts de traitements suite à l'injection du vaccin », explique au « Quotidien » le Dr Ravaux. Aucun des volontaires n'était descendu en dessous de 200 CD4 par mm3 au cours des 12 mois qui précédaient le début de l'étude.
Ils ont été randomisés en 4 groupes correspondant à quatre doses : 0 µg, 11 µg, 33 µg ont 99 µg de Tat Oyi ont été injectés à trois reprises sur une période de 3 mois. Les volontaires acceptaient d'arrêter leur traitement pendant 2 mois, 5 mois après la première injection.
Une dose optimum de 33 µg
Un mois après l'arrêt du traitement, seulement 10 volontaires, dont 4 du groupe 33 µg, avaient toujours plus de 100 CD4 par mm3 et n'avaient donc pas repris leur trithérapie. L'analyse a confirmé que la dose de 33 µg procurait le meilleur contrôle contre le rebond de la virémie. Seul le groupe 33 µg avait des volontaires, au nombre de 5, qui avait moins de 20 copies du virus par mm3 un mois après la fin de leur traitement. Au bout d'un an, 4 volontaires du groupe 33 µg et 3 volontaires du groupe 99 µg avaient toujours moins de 20 copies du virus par mm3.
En ce qui concerne la sécurité, le vaccin présente un profil satisfaisant puisqu'un seul volontaire, du groupe 11 µg, a souffert d'un effet secondaire sérieux considéré comme possiblement lié au vaccin : un épisode de névralgie faciale survenu 11 mois après la première injection. « La sécurité des patients a été très contrôlée puisque notre centre d'investigation clinique a été audité deux fois par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé », précise le Dr Ravaux.
« Ce vaccin ne permettra jamais de se passer de trithérapie », estime le Dr Ravaux qui contredit l'affirmation d'un des auteurs initiateurs du projet, le controversé Erwann Loret (CNRS, université Aix-Marseille) qui avait déclaré à la presse être en mesure de faire « gagner 70 ans de trithérapie aux patients ». Pour le Dr Ravaux, le vaccin peut être envisagé en accompagnement de la trithérapie, afin de permettre des arrêts prolongés du traitement sans rebond de la virémie.
Maintenant que la dose la plus prometteuse a été identifiée, une nouvelle phase 2 sur 80 volontaires doit maintenant avoir lieu, mais sans le Dr Ravaux, brouillée avec les promoteurs de l'étude. « C'est dommage, j'aurais bien aimé continuer à travailler sur cette piste », regrette-t-elle.
Suite à la publication de cet article, la présidente-directrice générale de Biosantech, Corinne Treger, a tenu à réagir (lire sa réaction).
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