Cela faisait plus d'un quart de siècle, avec les agonistes de la GnRH, qu'il n'y avait pas eu de nouveau médicament dans l'endométriose. Une équipe de la faculté de Yale avec le soutien des laboratoires Abbvie publie dans le « New England Journal of Medicine » des résultats encourageants pour l'elagolix, un antagoniste de la GnRH à prise orale.
Ce médicament oral, aux effets très proches des agonistes de la GnRH, s'est révélé efficace à 6 mois sur les dysménorrhées et les douleurs pelviennes non menstruelles, dans deux essais randomisés similaires contre placebo dans l'endométriose sévère. Elaris-I (n = 872) et Elaris-II (n = 817) ont testé chacun deux dosages différents, une dose faible avec 1 prise/jour à 150 mg et une forte dose avec 2 prises à 200 mg.
Les effets secondaires anti-oestrogéniques étaient fréquents, à type de bouffées de chaleur, d'hyperlipidémies et de diminution de la densité minérale osseuse, « comparables aux agonistes de la GnRH injectables, mais dont la magnitude pourrait être différente », notent les auteurs. Une évaluation de la balance bénéfices/risques est d'autant plus nécessaire, précisent-ils, que plusieurs cures seront vraisemblablement nécessaires au cours d'une vie.
Un arsenal thérapeutique assez restreint
Entre 6 et 10 % des femmes en âge de procréer sont touchées par l'endométriose. Si la physiopathologie reste mal connue, il est admis que l'œstrogène joue un rôle important. Néanmoins, rappellent les auteurs, une suppression totale des taux d'œstrogène ne serait pas nécessaire pour contrôler les douleurs d'endométriose selon l'hypothèse dite « du seuil d'œstrogène ». Il suffirait d'ajuster le taux d'œstrogène au niveau suffisant pour contrôler les douleurs en minimisant les effets secondaires.
Aujourd'hui, après échec des traitements de première ligne (AINS, contraceptifs progestatifs), il est recommandé de tester les agonistes de la GnRH par voie injectable, qui abaissent les taux d'œstrogènes au niveau de ceux de la ménopause mais dont l'utilisation est limitée à 6 mois en raison des effets secondaires (perte minérale osseuse, symptômes vasomoteurs). Les progestatifs peuvent être mal tolérés (saignements, prise de poids, labilité de l'humeur) et il peut exister une résistance à la progestérone au cours de l'endométriose. Les agents androgéniques sont associés à de l'acné, de l'hirsutisme et des troubles lipidiques. Quant à l'option de la chirurgie, elle est efficace mais le risque de récidive à 12 mois est important.
Une évaluation à long terme très attendue
Paradoxalement, les antagonistes de la GnRH au mécanisme d'action différent présentent des effets assez proches des agonistes de la GnRH par voie injectable. Comme l'expliquent les auteurs, elagolix inhibe les récepteurs de la GnRH au niveau de la glande pituitaire, ce qui se traduit par une rapide réduction des gonadotrophines et de l'œstradiol. Pour les agonistes de la GnRH, le scénario est différent, puisqu'après une phase initiale de stimulation, ces molécules désensibilisent les récepteurs de la GnRH, ce qui entraîne une déplétion en gonadotrophines et une suppression complète de l'œstradiol à des niveaux comparables à une ovariectomie bilatérale.
La réponse à l'elagolix est comparable dans les deux essais pour les deux dosages, avec une réponse nettement meilleure pour le fort dosage. Dans Elaris-I, le pourcentage de réponse à la dysménorrhée est de 46,4 % pour la faible dose et 75,8 % dans la forte dose, par rapport à 19,8 % ; dans Elaris-II, les chiffres sont très proches, respectivement de 43, 4 %, 72,4 % et 22,7 %.
Pour les douleurs pelviennes non menstruelles, les chiffres sont moins spectaculaires avec une réponse d'environ 50 % (50,4-49,8) pour la faible dose et environ 55 % (54,5-57,8) pour la forte dose (36,5 % dans les groupes placebo). Ce résultat ne semble pas surprendre les auteurs qui expliquent que le mécanisme de ces douleurs est plus complexe que les dysménorrhées, sous forte influence hormonale.
Les auteurs font remarquer que l'elagolix ne supprime pas totalement l'ovulation, pour les deux doses, car quelques grossesses ont été observées malgré la consigne d'avoir une contraception non hormonale double pendant la durée de l'essai.
Les auteurs attendent beaucoup du suivi des essais pour préciser la dose et mieux évaluer les bénéfices/risques à long terme, à savoir la persistance des effets antalgiques et l'évolution de la densité minérale osseuse et des hyperlipidémies. Dans un éditorial, le Dr Mark Hornstein, gynécologue à la faculté de médecine de Harvard, salue l'arrivée de la nouvelle molécule comme « une avancée considérable » mais souligne que le positionnement de cette nouvelle venue par les agences sanitaires ne sera pas évident, sachant qu'un essai randomisé a récemment conclu à l'efficacité comparable des contraceptifs en continu par rapport aux agonistes de GnRH, pour un coût et des effets secondaires moindres.
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