Une étude franco-canadienne publiée dans « Scientific Reports » vient de présenter des résultats contre-intuitifs concernant la maladie d’Alzheimer : les marqueurs synaptiques ne seraient pas corrélés avec le déclin cognitif au cours de la démence. Le point avec Stéphanie Daumas, chercheure en neurosciences à l’Université Pierre-et-Marie-Curie, et coauteure de l’article.
Dans cette étude, les auteurs ont évalué le statut en marqueurs synaptiques gutamatergiques, GABAergiques et cholinergiques d’échantillons du cortex préfrontal. Ces échantillons provenaient de 171 personnes âgées comprenant un groupe de 38 individus contrôles, et 133 personnes atteintes de maladie d’Alzheimer à différents stades. « Il y a quelques années, l’équipe avait publié sur ce même thème, cherchant des marqueurs synaptiques (les transporteurs vésiculaires du glutamate) dans le tissu préfrontal, sur environ 30 échantillons », rapporte Stéphanie Daumas au « Quotidien ». « Il semblait y avoir un lien entre le taux d’expression des transporteurs vésiculaires et le niveau de démence, mais le nombre d’échantillons était trop faible pour conclure. Nous avons par ailleurs constaté que toutes les études réalisées post-mortem et qui avaient recherché les taux de ces marqueurs avaient été réalisées sur de petites cohortes. »
Dans l’étude parue aujourd’hui dans « Scientific Reports », les chercheurs ont eu accès à une grande base de données, provenant de personnes en maisons de retraite dont le score de démence avait été évalué et qui avaient fait don de leur cerveau à la science. « C’était l’opportunité de pouvoir confirmer l’hypothèse sur un large échantillon », précise Stéphanie Daumas.
Des marqueurs synaptiques non corrélés à la progression de la démence
Les nouveaux résultats vont à l’opposé de l’ancienne étude : sur les 9 marqueurs synaptiques pris en compte (dont les transporteurs vésiculaires du glutamate VGLUT 1 & 2), deux ne sont pas du tout affectés par le stade de démence, et les sept autres voient leur taux d’expression diminuer, et ce tardivement, alors que les chercheurs attendaient plutôt de les voir augmenter avec la progression de la démence. « Nous étions les premiers surpris car nous pensions observer une corrélation, en particulier des taux de VGLUT1, avec la progression de la démence, mais l’ensemble des marqueurs chutent tardivement, à un score de démence déjà avancé », explique Stéphanie Daumas. « Nous attendions de voir ces marqueurs augmenter dans un premier temps pour compenser les pertes de récepteurs post-synaptiques avant de chuter, ce qui correspondrait à l’apparition des déficits cognitifs. Mais nous n’avons pas du tout mis en évidence cette cinétique. »
Des troubles cognitifs liés aux dysfonctionnements synaptiques
« Quand nous observons une expression des marqueurs synaptiques, cela ne signifie pas que ces synapses sont fonctionnelles », explique la chercheure. « Il y a donc sans doute une perte de fonctionnalité, à laquelle sont liés les troubles cognitifs ; et la perte de masse cellulaire ne survient que très tardivement dans la pathologie. »
Stéphanie Daumas souligne par ailleurs que si le cortex préfrontal constitue une région d’intérêt majeur dans la maladie d’Alzheimer, les zones hippocampiques pourraient aussi présenter un intérêt. Cependant, « il s’agirait encore d’une étude post-mortem et il pourrait plutôt être utile de développer une nouvelle approche, in vivo, pour suivre par imagerie (par IRM ou TEP) l’expression de marqueurs VGLUT au cours du déclin cognitif », propose-t-elle.
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