Il n'est pas 8 heures du matin, et les couloirs de l'hôpital Tenon sont presque déserts. Seuls résonnent les pas hésitants des premiers patients venus pour un diagnostic suite à une suspicion de cancer bronchique.
Depuis mai 2016, le nouveau centre de diagnostic rapide du cancer du poumon de l'hôpital Tenon propose deux demi-journées par semaine consacrées au diagnostic, à partir desquelles les patients suivront un planning réglé comme du papier à musique : fibroscopie, épreuves fonctionnelles respiratoires, scanner, TEP-FDG, biopsie et IRM, moins de 7 jours après que leur médecin généraliste a contacté le service de pneumologie. Ces examens sont regroupés en une, deux voir trois journées passées en hôpital de jour. Il restera ensuite quelques jours à attendre, le temps d'obtenir les résultats de la biopsie avant l’annonce diagnostique. Dans un second temps rapide un bilan préopératoire approfondi sera réalisé si un traitement chirurgical est envisagé. À l’inverse, un traitement médical (chimiothérapie, thérapie ciblée ou radiothérapie) peut être démarré immédiatement.
Au cours de l'entretien d'admission, destiné à renseigner la taille, le poids, et les éventuelles allergies, les patients ont des réactions parfois mixtes. S'ils sont soulagés d'avoir une réponse rapide à leurs angoisses, ils éprouvent aussi parfois une forme de sidération face à une telle avalanche d'examens.
C'est là qu'intervient « l'ange gardien » du service, l'infirmière de coordination, Solène Guegan, chargée de faire le lien entre patient et équipe soignante. « Je les rassure, leur explique le déroulement des examens, détaille-t-elle. Malgré notre nouvelle organisation, les examens et l'attente de l'annonce restent très anxiogènes, mais ils peuvent me contacter : je suis leur point de chute, un référant permanent. » Solène Guegan tient en outre un véritable journal de bord où chaque patient est répertorié, tout comme le sont les détails concernant sa famille et ses éventuels problèmes sociaux.
Une première en France
Si l'organisation des examens sur une seule journée se faisait déjà dans d'autres services, pour d'autres pathologies, l'expérience de l'hôpital Tenon est une première en France dans le domaine du cancer bronchique. L'électrochoc est venu de la thèse d'une interne du service qui analysait le parcours de soins des patients.
Un premier constat a montré que 30 % des patients diagnostiqués à Tenon entraient par les urgences et qu'une partie des patients programmés ne transitaient par l'hôpital de jour. Tenon n'était pas un cas isolé : « Une étude a montré que les délais en France ne respectent pas du tout les recommandations de l’INCa qui veulent qu'il s’écoule moins d'un mois entre la suspicion et le début du traitement », explique le Pr Marie Wislez, coordinatrice du projet. Le deuxième constat est celui de l'accès difficile entre la ville et l'hôpital. « Paris bénéficie d'une offre tellement importante qu'elle devient illisible pour nos collègues de la ville », explique le Dr Armelle Lavole.
La solution a résidé dans la création d'un numéro de téléphone et d'une adresse mail uniques pour les médecins généralistes et les pneumologues de ville, qui se voient proposer un créneau de consultation dès le premier appel. Le service dispose de 6 consultations par semaine, dédiées aux nouveaux cancers, 3 le mardi et 3 autres le vendredi.
Combattre l'anxiété
La période entre la prise de rendez-vous et l'annonce est très anxiogène, comme nous le confie ce patient croisé dans les couloirs, en train d'attendre l'annonce des résultats. « J'ai peur du résultat bien sûr, mais je gère plus facilement ma peur que celle de mes enfants à qui je n'ai pas de réponse à donner tant que je n'ai pas fait mes examens, confie-t-il. Au moins j'aurais des choses à leur dire. »
L'entrée dans le circuit du diagnostic se fait au même étage que les chimiothérapies en hospitalisation de jour, ce qui a nécessité quelques aménagements, comme nous le confirme une des infirmières du service : « Nous nous efforçons de séparer les patients qui viennent pour un diagnostic de ceux qui viennent pour une chimiothérapie et dont l'état est une source d'angoisse supplémentaire. »
Quel bilan ?
« Notre objectif est qu'il y ait moins de 7 jours d'attente entre la prise de contact par le médecin généraliste et la prise en charge en ambulatoire. Pour l'instant, nous avons une médiane de 4 jours », se réjouit le Dr Lavole. Les patients qui ont franchi les portes du service sont en outre bien sélectionnés, puisque, selon le Pr Wislez, « un cancer bronchique a été confirmé dans 70 % des cas ; dans 6 % des cas il s’agissait des métastases d’autres cancers ».
Une évaluation du dispositif doit intervenir en début d'année pour vérifier l'impact de cette nouvelle organisation sur le service, et l'utilisation effective des places réservées, surtout en médecine nucléaire où chaque rendez-vous non respecté entraîne le gaspillage de plusieurs centaines d'euros en produit radioactif commandé à l'avance.
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