Les Français font-ils plus attention à leur santé avec la pandémie ? Certaines enquêtes le suggèrent. Mais pour l’heure, le Covid a fait prendre du retard à l’accès aux soins. Le dépistage des cancers a été impacté, alors qu’il n’avait pas besoin de ça. Ces dernières années, les chiffres stagnent, bien en dessous des objectifs et de la moyenne européenne. Et le dispositif mis en place pour le cancer du sein est emblématique de cette situation. Avec près de 60 000 nouveaux cas chaque année, c’est le cancer le plus répandu chez les femmes. Et c’est aussi le plus ancien programme de dépistage dans le pays. Pourtant, près de 20 ans après son démarrage, seule une Française éligible sur deux s'y soumet (en tout cas dans le parcours organisé). Le volontarisme n’est pas en cause. Depuis deux semaines avec Octobre rose, pouvoirs publics, établissements spécialisés et associations mobilisent l’opinion et braquent les projecteurs sur la maladie. La nouvelle campagne TV de l'Inca sensibilise le grand public tout le mois. Et depuis le début l'intendance suit : gratuité des mammographies, implication des généralistes via la Rosp (rémunération sur objectifs de santé publique), radiologues proactifs…
À l’évidence, cela ne suffit pas pour convaincre les femmes concernées et qui, trop nombreuses, s’abstiennent. Pourquoi ? C’est la question que se posent experts et décideurs depuis des années. La démarche se heurte d'abord aux difficultés d’accès aux soins, alors que les déserts médicaux se multiplient, occasionnant délais rallongés de prise de rendez-vous chez le spécialiste et pénurie de médecins traitants. Et le dossier est emblématique aussi des inégalités sociales qui affectent les indicateurs de santé dans l’hexagone. Un rapport de la Drees montre que les femmes de 50 à 74 ans qui n’ont jamais effectué de mammographies sont beaucoup plus nombreuses parmi les plus précaires (39 %) que dans les classes aisées (24 %)… Autant dire que « l’aller vers » dont on a tant parlé pendant la crise sanitaire doit devenir une philosophie d’action. La médiation sur le terrain pouvant se révéler aussi efficace en la matière qu’une avalanche de campagnes de com'.
Au-delà, le dépistage pose aussi la question de la démocratie sanitaire. Ces dernières années, on a assisté à une controverse sur l’utilité, voire la dangerosité des mammographies. Avec une contestation forte chez certaines femmes, relayée par une partie du corps médical. En face, la défense des experts arguant que le diagnostic précoce est indispensable n’a pas suffi pour l’heure à convaincre les plus méfiantes. Et la refonte du programme lancée par l'avenue de Ségur il y a quelques années n’est pas parvenue non plus à lever les réticences. Sans doute, le ciblage du dépistage en direction des femmes les plus à risque permettrait-il de relancer la dynamique. Beaucoup l'attendent. Et une vaste étude (My PeBs) est en cours. Mais elle ne devrait pas déboucher sur des résultats avant 2026.
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