Tiers payant généralisé, cliniques : Touraine souffle le chaud et le froid

Publié le 12/12/2014
TouraineS.Toubon

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Crédit photo : S. Toubon

Marisol Touraine s’efforce à nouveau de lâcher un peu de lest alors que la contestation médicale contre la loi de santé ne faiblit pas – tous les syndicats ont confirmé leur appel à la fermeture des cabinets libéraux et à la grève de la permanence des soins la dernière semaine de décembre.

Dans un entretien à « Libération » publié ce vendredi, la ministre de la Santé promet encore une fois des « garanties » aux médecins sur la généralisation du tiers payant afin d’assurer un « paiement rapide et simple aux médecins ». Elle propose de définir ces garanties dans le cadre d’un groupe de travail en janvier (le chantier technique est au point mort depuis des mois...). « La généralisation du tiers payant, c’est le choix de la justice, dit la ministre. Elle se mettra en place par étapes avant 2017. La première, en juillet 2015, concernera les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé. Je suis prête à voir si d’autres étapes, avant sa généralisation, sont nécessaires ». Peu probable que ces propos généraux suffisent dès lors que la profession récuse le principe même de l’obligation de la dispense d’avance des frais à tous les patients.

« Beurre et argent du beurre » : les cliniques épinglées

En revanche, sur France Info cette fois, Marisol Touraine s’en prend vertement aux cliniques privées qui, selon la ministre, « veulent le beurre et l’argent du beurre » en souhaitant rester dans le service public hospitalier sans en assumer toutes les contreparties (notamment à ses yeux les tarifs opposables).

« Ce qu’ils demandent [les établissements privés], c’est pouvoir pratiquer leur exercice dans les conditions qu’ils souhaitent et en même temps bénéficier d’une étiquette service public hospitalier », a tancé la ministre. « Ce que je veux moi, c’est que les patients, lorsqu’ils poussent la porte d’un établissement de santé, connaissent les conditions dans lesquelles ils vont être soignés (...) Si c’est le service public hospitalier, ils savent qu’il n’y aura pas de dépassements d’honoraires, s’ils poussent la porte d’une clinique, ils savent qu’ils doivent discuter avec les médecins, pour savoir à quelles conditions ils doivent être soignés », a-t-elle détaillé.

Ce « recadrage » ministériel intervient alors que la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) lance une campagne de communication « choc » contre la loi de santé en dramatisant les conséquences de cette réforme. Intitulée « Tous privés de santé : le pire est annoncé » cette campagne nationale montre une femme enceinte prête à accoucher dans la rue, ou encore un homme allongé en train de recevoir un massage cardiaque (ci-dessous).

Cette campagne s’est attiré les foudres de la Fédération hospitalière de France (FHF). Son président Frédéric Valletoux « prend acte, avec une certaine consternation, des caricatures auxquelles se livrent depuis plusieurs jours, et une fois de plus, les représentants de l’hospitalisation privée à travers une campagne de communication irresponsable. Pourquoi faire croire aux Français qu’ils ne pourront plus être soignés correctement sous prétexte que la future loi de santé, certes imparfaite et insuffisante sur bien des points, ne convient pas aux cliniques ? Les raccourcis de cette campagne sont indignes d’acteurs qui, dans le même temps, réclament d’exercer une part de missions de service public ».

« Consternés » par les choix de communication de la FHP, les établissements privés non lucratifs (FEHAP) et les centres de lutte contre le cancer (UNICANCER) ont fustigé de leur côté des « images aussi violentes qu'excessives »

Cyrille Dupuis

Source : lequotidiendumedecin.fr