Allié de la majorité, le groupe parlementaire du MoDem veut toutefois faire entendre sa petite musique sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) que l'Assemblée nationale examine depuis ce jeudi. « C'est un bon budget qui comporte de nombreuses avancées, résume le député du Rhône, Cyrille Isaac-Sibille. Il y a juste quelques trous dans la raquette que nous voulons combler. »
Haro sur la bière et le tabac
Contrairement à la tradition, ce budget de la Sécu ne comporte, en effet, aucune mesure de taxation en faveur de la santé publique. Le MoDem en propose deux visant les jeunes. « Il y a un amendement qui me tient particulièrement à cœur et que j'appelle l'amendement Axel Kahn car nous l'avions travaillé pendant trois ans avec lui, indique Cyrille Isaac-Sibille. Nous proposons de taxer beaucoup plus fortement les bières dépassant les 11 degrés d'alcool afin de dissuader les brasseurs d'en produire et les jeunes d'en consommer ». Ces bières titrant parfois jusqu'à… 16 degrés, vendues à prix attractifs dans les supermarchés, constituent un « véritable attentat contre la jeunesse », estime le député, ORL libéral de métier.
Autre produit de plus en plus consommé par les jeunes : le tabac à chauffer que les députés MoDem veulent taxer au même niveau que les cigarettes classiques. « Ce produit est peut-être un peu moins nocif pour les poumons mais il l'est tout autant pour le risque cardio-vasculaire » alerte le député d'Eure-et-Loir, Philippe Vigier, pharmacien biologiste.
Ce dernier est également – depuis trois législatures – un obsédé de la lutte contre la désertification médicale, au risque de braquer le corps médical. Pour ce dernier budget de la Sécu de la législature, il avait proposé, avec plusieurs députés d'autres groupes, un amendement visant à « instaurer une obligation de négocier, dans le cadre de la convention médicale, sur la contribution des médecins à la réduction des inégalités territoriales dans l'accès aux soins ». Celui-ci a cependant été déclaré irrecevable.
Déserts médicaux
Désormais, le MoDem met en avant des mesures non contraignantes pour lutter contre les déserts médicaux.
Il a notamment mis la puce à l'oreille du gouvernement sur la limite d'âge d'exercice des médecins. La possibilité du cumul emploi/retraite dans les établissements de santé publics a été rendue possible jusqu'à l'âge 72 ans jusqu'au 31 décembre 2022, depuis la loi Touraine de 2016. Les députés proposent de prolonger cette dérogation jusqu'au 31 décembre 2030 « afin d'atténuer le choc de la démographie médicale attendue dans les 5 à 10 prochaines années ».
Par ailleurs, ils affirment leur soutien aux amendements d'expérimentation de l'accès direct aux orthophonistes et aux kinés dans le cadre de structures de soins coordonnés. S'agissant du très contesté article sur la primo-prescription des orthoptistes, Cyrille Isaac-Sibille fait une sous-proposition de compromis : octroyer ces nouvelles compétences aux orthoptistes libéraux qui s'installeraient dans les zones sous-dotées.
Grande Sécu
Dernier sujet dans l'air du temps : la redéfinition des rôles entre le régime obligatoire (AMO) et les complémentaires santé (AMC), un dossier très sensible sur lequel planche le Haut conseil pour l'avenir de l'Assurance-maladie (HCAAM) – dont Cyrille Isaac-Sibille est membre. Dans un amendement, le député MoDem prend l'exemple extrême des montures de lunettes remboursées 9 centimes la paire par l'AMO et propose d'en déléguer le remboursement intégral aux AMC sous forme expérimentale. En échange, il serait demandé aux complémentaires un rapport annuel exhaustif sur l'évolution de ces remboursements, ce qui permettrait de mieux cerner le reste à charge réel des assurés. « Cette imbrication entre l'AMO et les AMC est source de complexité, de coût et parfois d'inefficience » souligne le parlementaire. Un diagnostic qui fait écho à celui du gouvernement qui a commandé ce rapport au HCAAM.
« La France est le 2e pays au monde, après les États-Unis, où les frais de gestion d'Assurance-maladie sont les plus élevés, dont 40 % proviennent des complémentaires » a reconnu ce jeudi matin le ministre de la Santé dans son discours de présentation du PLFSS à l'Assemblée nationale. « Réflexion n'est pas proposition » a ajouté Olivier Véran. Une manière à peine voilée de préparer le terrain au débat qui s'ouvre sur une éventuelle « grande Sécu ».
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