LE QUOTIDIEN – Un groupe de travail va étudier la faisabilité de la vente de certains médicaments sur Internet, quelle est la position du LEEM sur ce projet ?
PHILIPPE LAMOUREUX – Nous n’avons pas à proprement parler de religion sur ce sujet. Mais il y a l’arrêt DocMorris, une jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes, qui date de décembre 2003, qui pose un certain nombre de règles qui sont valides pour l’ensemble de l’Union européenne, comme le fait que les États ne peuvent interdire la vente de médicaments non soumis à prescription sur Internet. Simplement, il n’y a pas de réglementation spécifique en France sur le sujet, nous sommes dans une situation de flou juridique, et il est vrai qu’une réglementation viendrait mettre fin à ce flou.
Mieux vaut autoriser la vente en l’encadrant que ne rien faire du tout ?
Une chose est certaine, c’est que la vente doit être encadrée. Le problème de la vente de médicaments sur Internet est aussi un problème de politique de santé, car si le dispositif doit être mis en place, il est clair qu’il doit être totalement sécurisé, compte tenu de la montée de la contrefaçon. Donc pourquoi pas la vente sur internet ? Mais à condition qu’elle soit sécurisée. Enfin, il est bien clair que le projet se limite aux médicaments vendus sans prescription.
Les pharmaciens d’officine sont a priori opposés à ce projet. Comprenez-vous leurs réticences ?
En France, la vente de médicaments sur Internet ne peut être conçue que comme le prolongement d’une pharmacie d’officine à laquelle elle est nécessairement adossée. Dans ces conditions, le risque de voir la grande distribution débarquer sur ce marché n’est pas avéré. Quant aux risques de contrefaçon, je dirais que rien n’est pire que le flou. Mais dès lors qu’on met en place un dispositif par lequel des sites sont labellisés par les autorités – et on parle à ce sujet de l’Ordre des pharmaciens –, cela signifie que le consommateur saura qu’en se rendant sur un site labellisé il aura accès à des médicaments de qualité. Ce dispositif envisagé va donc plutôt dans le sens d’une clarification. Nous en sommes pour le moment au stade exploratoire, un groupe de travail se met en place, c’est tout. Et avant tout démarrage, il faudra modifier la législation en vigueur puisqu’on touche au droit de la distribution. Ce n’est donc pas pour demain, car le calendrier des discussions va s’étaler dans le temps.
Qui va acheter de l’aspirine ou un sirop pour la toux sur Internet ? Quand on veut acheter ce type de produit, c’est pour tout de suite, pas pour être livré trois jours après...
Il y a aussi des gens qui ont un stock de médicaments de base dans leur armoire à pharmacie et qui peuvent être tentés de renouveler leur stock par internet. Moi je ne vois pas un développement fulgurant de la vente de médicaments par Internet, mais Internet fait partie de la vie, c’est un vecteur extrêmement utilisé, et on ne peut pas ne pas s’y adapter. On peut continuer à faire du feu en frappant deux silex, on peut tenter de deviner le temps qu’il va faire dans les entrailles d’un poulet, mais on ne va pas ainsi dans le sens de l’histoire.
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