Depuis quatre semaines, le centre hospitalier de Mayotte (CMH) subit comme le reste de la population le blocus de l'île, mis en place par un mouvement de contestation populaire. Mardi matin, plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Mamoudzou, chef-lieu du département pour réclamer au gouvernement français des actions fortes contre l’insécurité chronique et l’immigration clandestine provenant des Comores.
La semaine dernière, la communauté médicale et l'Ordre départemental des médecins ont adressé une lettre aux tutelles sanitaires pour les alerter sur les risques sanitaires provoqués par cette situation sociale. Ce n'est pas la première fois que les professionnels de santé tirent la sonnette d'alarme. En attendant, l'hôpital s'organise comme il peut pour assurer l'accès aux soins. « On a des cellules de crise tous les jours à l'hôpital. Tous les services fonctionnent en sous-effectif », déplore le Dr Sophie Olivier, présidente de la commission médicale d'établissement du CHM.
S'organiser pour dormir à proximité
Chef du service gynécologie-obstétrique, le Dr Angaman Didia détaille au « Quotidien » les mesures prises pour assurer le suivi des parturientes : « Nous avons anticipé pour être en nombre suffisant en médecins pour assurer les consultations. Ceux qui habitent loin se sont organisés pour dormir à côté de l'hôpital afin d'être sur place et d'assurer les gardes et astreintes. C'est plus difficile pour les infirmiers, les aides-soignants ou les traducteurs qui nous aident à soigner les patients des Comores. »
Jusqu'à présent, selon le Dr Didia, le service parvient à assurer les urgences. « Tout ce qui est prévention ou gestion prénatale, c'est plus difficile, reconnaît néanmoins l'obstétricien. Nous pouvons encore tenir 48 heures. Au-delà, cela risque d'être compliqué car nous avons besoin de matériel, de médicaments même si la pharmacie a anticipé avec un stock. Le personnel est vraiment fatigué. »
Au SAMU, le Dr Ludovic Iche, praticien hospitalier urgentiste, partage le constat de son confrère : « Le manque de personnels lié aux barrages rend le fonctionnement des urgences difficiles. Mais pour le moment, nous arrivons toujours à trouver une solution pour répondre aux urgences vitales. Un réseau de maisons de santé ouvertes 24 heures sur 24 prend en charge les accouchements. Pas besoin de venir à l'hôpital de Mamoudzou. Nous pouvons aussi solliciter un hélicoptère pour transférer les patients. »
Un nouveau statut pour l'hôpital ?
Une délégation composée de représentants de l'hôpital, de l'Ordre départemental et du syndicat praticien hospitalier de Mayotte (SPHM) est reçue à la préfecture ce mardi après-midi. « Nous allons exposer toutes les difficultés d'exercice pour nos équipes ainsi que les conséquences sanitaires possibles. C'est à l'État de prendre ses responsabilités », assure le Dr Sophie Olivier.
Dépêchée sur place ce lundi, la ministre des Outre-mer Annick Girardin a d'ores et déjà fait plusieurs déclarations sur la situation sanitaire de l'île. Elle a notamment esquissé l'idée d'un statut d'exterritorialité pour l'hôpital. Avec ce statut, « les enfants de femmes comoriennes qui naîtraient [à Mayotte] pourraient être déclarés comme Comoriens au registre de l’État civil au lieu d'obtenir automatiquement la nationalité française », a déclaré Aurélien Taché, député LREM au journal « La Croix ». Avec près de 9 500 naissances en 2017, l'hôpital de Mayotte est en effet la plus grande maternité de France.
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