Le rapporteur de la commission d'enquête parlementaire sur l'affaire Lactalis, Grégory Besson-Moreau, a attaqué le géant laitier mercredi, indiquant que ses explications sur la contamination « ne coll(aient) pas ». Il a aussi souligné un déraillement de l'ensemble de la chaîne durant cette crise, au cours de laquelle 36 nourrissons ont été atteints de salmonellose fin 2017 après avoir consommé un produit pour enfant fabriqué par Lactalis.
« Lors de son audition, Lactalis nous a expliqué que si des salmonelles sont retrouvées dans des boîtes pour bébé, c'est parce qu'ils en ont retrouvé sur un manche à balai et qu'ils avaient cassé du carrelage. Déjà l'explication ne colle pas », a déclaré mercredi Grégory Besson-Moreau lors de la remise du rapport de la commission.
Le propriétaire et PDG de l'entreprise Emmanuel Besnier, s'était attiré les foudres de la commission en ne se rendant pas, dans un premier temps, à l'audition organisée par la commission. Lorsqu'il s'est finalement rendu à l'Assemblée Nationale en juin dernier, l'industriel s'est vu reprocher un manque de responsabilité : « Ne devons-nous pas plus vous responsabiliser avec des sanctions pénales et financières lourdes ? » avait questionné Grégory Besson-Moreau. La commission s'était également interrogée sur l'absence d'alerte sur les produits finis et l'aspect « chaotique » du rappel des produits incriminés, en cinq vagues successives.
Carrelage et manche à balai
Après l'éclatement de l'affaire de contamination des laits pour bébés en décembre, Lactalis avait reconnu avoir détecté la présence de salmonelles en août 2017 sur un manche à balai et en septembre sur du carrelage mais jamais dans l'appareil de production.
Dans les conclusions de son rapport, la commission propose de responsabiliser les entreprises agroalimentaires par des sanctions pénales et financières, chiffrées en pourcentage de chiffre d'affaires et non plus en montants fixes et qui seront donc « bien plus importantes que les sanctions actuelles », assure Grégory Besson-Moreau.
Cependant, les travaux de la commission ont montré que le problème dépassait le niveau industriel. « Au début de cette audition on pensait que la responsabilité (incombait) uniquement à Lactalis, la réalité c'est que c'est la chaîne de production qui a déraillé », selon le député. Il explique par exemple qu'aucune crèche « n'a été mise au courant de problèmes de salmonelles dans les boîtes de lait en provenance de Lactalis », durant la crise.
Le rapport entend aussi renforcer les services de l'État grâce à une redevance, votée au niveau européen, prélevée sur les industriels et dont le produit de 270 millions sera transféré à la Direction générale de la sécurité alimentaire. Cette somme pourrait, selon le rapporteur, permettre la création de « 800 emplois équivalents temps plein ».
L'indépendance des laboratoires en question
Lors d'une interview diffusée par Europe 1 mercredi matin, le président de la commission d'enquête Christian Hutin a ajouté qu'il fallait vérifier l'indépendance des contrôleurs, car « quand un laboratoire a 90 % de son chiffre d'affaires qui est lié à une seule entreprise », comme ce fut le cas dans l'affaire Lactalis, « ça peut poser un problème », a-t-il assuré. Pour éviter les problèmes sanitaires, « l'auto-contrôle n'est pas suffisant », a-t-il déclaré, assurant qu'il fallait « contrôler les contrôleurs, et contrôler les contrôlés ».
D'après M. Hutin, la commission va aussi demander que l'État mette fin à la « guerre des polices » et crée une autorité unique dans le domaine de la sécurité alimentaire. Le 14 juin dernier, lors de son audition devant la commission d'enquête, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire avait, lui, défendu le principe de séparation des pouvoirs de contrôle entre la Direction générale de l'alimentation (DGAL) et celle de la répression des fraudes (DGCCRF).
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