Alors que la fondation de coopération scientifique PremUp ouvre ce mardi matin ses 8es assises sur le thème de « la femme enceinte et son environnement professionnel », un sondage réalisé pour la fondation sur 1 477 adultes, dont 1 000 femmes, montre que le travail au cours la grossesse représente un moment difficile pour 43 % des femmes interrogées.
Ce taux montait à 70 % chez les femmes de 25 à 34 ans. De plus 12 % des femmes, et 21 % de celles de 25 à 34 ans ont retardé au maximum l’annonce de leur grossesse à leur employeur, par crainte des conséquences.
Pour Marie-Josèphe Saurel-Cubizolle, chercheur INSERM de l’équipe EPOPé (maternité Port-Royal), ce fossé intergénérationnel s’explique de plusieurs manières : « d’une part, les mères ont tendance à oublier les aspects désagréables de la grossesse au fil du temps, et d’autre part, nous assistons à une précarisation de l’emploi des jeunes femmes. Pour beaucoup de travailleuses précaires, tomber enceinte signifie courir le risque de voir son contrat non renouvelé ».
La perception de la femme dans l’entreprise est également en cause dans leurs difficultés : 40 % des hommes interrogés et des 31 % des femmes pensent que les femmes enceintes « ont moins la tête au travail », 42 % des hommes et 36 % des femmes déclarent qu’on « ne sait jamais si elles reviendront bien après la grossesse ».
Le rôle du médecin du travail
Pour Marie-Josèphe Saurel-Cubizolle et pour le Dr Philippe Deruelle, professeur de gynécologie-obstetrique, un autre aspect du problème réside dans le manque de souplesse et d’alternatives proposées au classique congé maternité. « L’activité professionnelle expose la femme enceinte, selon les cas, à des trajets longs, au port de charges lourdes ou encore aux rayonnements ionisants, rappelle le Dr Deruelle. En consultation, les femmes se plaignent de fatigues et d’une pression plus importante, car on leur demande de finir leurs dossiers avant de partir en congés maternités alors qu’un aménagement de la charge de travail pourrait être envisagé ».
En théorie, la loi prévoit un poste pivot au médecin du travail pour ces aménagements, « mais il y a une grosse marge de progression en France où son rôle est encore mineur », remarque Marie-Josèphe Saurel-Cubizolle. « La question de l’environnement professionnel de la femme enceinte n’a été inscrite aux ECN qu’en 2013, il faut encore l’enseigner aux étudiants, aux médecins, et aux sages femmes », renchérit le Dr Deruelle.
Informer sur les risques et leur prévention
Selon l’enquête de la fondation PremUp des aménagements du temps de travail n’était proposé que dans les entreprises de 42 % des répondants, une information sur la prévention des risques liés à la grossesse n’était délivrée que dans 13 % des cas et le télétravail n’était une option que dans 9 % des cas.
La France rassemble toutes les conditions pour que la grossesse entre en conflit avec la vie professionnelle puisqu’elle « conjugue un taux d’activité des femmes et un taux de fécondité important », explique Marie-Josèphe Saurel-Cubizolle. Par ailleurs, « l’age de la première grossesse est en train de reculer, les femmes font maintenant leur premier enfant vers 35 ans, soit à un moment qui est souvent clé dans leur carrière », analyse pour sa part Muriel de Saint Sauveur directrice de la diversité au sein du groupe d’audits Mazars.
Les grossesses des Françaises entrent donc plus fréquemment en conflit avec leurs vies professionnelles que celles des Russes qui ont des enfants plus tôt, celles des Italiennes qui ont moins d’enfants ou que celles des allemandes qui s’arrêtent souvent de travailler après la naissance du premier enfant.
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