Comme toujours, les députés ont eu le dernier mot. L'Assemblée nationale a adopté en ultime lecture – par 95 voix contre 42 – la proposition de loi visant à « améliorer le système de santé par la confiance et la simplification ». Quelques semaines auparavant, la majorité de droite au Sénat avait rejeté le texte en bloc.
Porté par la députée (LREM) du Loiret et rhumatologue Stéphanie Rist, le texte visait à traduire dans la loi les mesures « non financières » du Ségur de la santé de juillet – c'est-à-dire hors revalorisations salariales et hors investissements en santé.
Si Olivier Véran a salué un « travail remarquable », la version adoptée à l'issue d'une navette agitée entre les deux chambres n'aura guère convaincu. À droite, le député (LR) Jean-Pierre Door a jugé le texte « disparate, au goût d'inachevé », « en décalage par rapport aux enseignements de la crise ». Adrien Quatennens (LFI) le qualifie de « réparation insuffisante » au regard du choc de l'épidémie.
La profession intermédiaire aux oubliettes mais…
Le tout premier article du texte a vu son contenu vidé de sa substance, signe des frictions sur un sujet hautement sensible. Exit la création d'une nouvelle profession médicale intermédiaire entre l'infirmière et le médecin, réforme imaginée initialement par l'exécutif. Le tollé soulevé par ce changement à la hussarde a contraint les élus à revoir leur copie. À la place, il a été demandé au gouvernement un… rapport sous six mois afin de faire un « un état des lieux de la mise en place des auxiliaires médicaux en pratique avancée et des protocoles de coopération ».
La loi fait néanmoins bouger les lignes sur les délégation de tâches et les compétences. Les sages-femmes sont autorisées à adresser une patiente à un spécialiste sans passer par le médecin traitant et à prescrire désormais des arrêts de travail de plus de 15 jours. Leur droit à prescrire des médicaments est élargi. « Le texte confère aux sages-femmes une nouvelle compétence pour la prescription de bilans et le traitement des IST (...), une mesure attendue et cohérente qui va donner une nouvelle dimension à la prévention », a salué l'Ordre de cette profession. Feu vert également au statut de sage-femme référente, coordonnatrice de la prise en charge périnatale. D'autres professionnels comme les masseurs-kinésithérapeutes, les orthophonistes ou les ergothérapeutes voient leurs compétences amplifiées.
Le service réhabilité
Conformément aux recommandations du rapport du Pr Claris, la loi accorde aux établissements davantage de marge de manœuvre et de souplesse pour s'organiser en interne et s'emploie à replacer les médecins au centre de la gouvernance hospitalière.
La place et le rôle du service hospitalier sont d'abord réaffirmés. Celui-ci est redéfini comme « l'échelon de référence en matière d'organisation, de pertinence, de qualité et de sécurité des soins, d'encadrement de proximité des équipes médicales et paramédicales, d'encadrement des internes et des étudiants en santé ainsi qu'en matière de qualité de vie au travail ». Une façon de signer en creux l'échec de la dissolution des services au sein de vastes pôles…
La loi introduit le projet de management et de gouvernance – l'objectif étant de mieux associer les soignants aux décisions et d'assurer les co-désignations des responsables médicaux, par le directeur de l’établissement et par le président de la commission médicale d’établissement (CME). Au-delà, le texte donne la possibilité à un représentant des soignants, des étudiants et des usagers de siéger au directoire des hôpitaux publics. Côté gouvernance encore, le texte autorise le directeur à fusionner la CME avec celle des soins infirmiers, de rééducation et médico‑techniques (CSIRMT).
Le SAS dans le marbre
Concernant le désengorgement des urgences hospitalières, le service d'accès aux soins universel (SAS, censé répondre à la demande de soins vitaux, urgents et non programmés partout et à toute heure) est désormais inscrit dans la loi. Malgré la tentative du député (LREM) et médecin urgentiste Thomas Mesnier, la question du numéro unique n'est toujours pas tranchée. Mais plusieurs expérimentations ont débuté en janvier avant généralisation de cette plateforme.
Enfin – et c'était déjà un cheval de bataille du député Olivier Véran avant son entrée au gouvernement – la lutte contre les dérives de l'intérim médical est renforcée. Les directeurs d'agence régionale de santé (ARS) sont autorisés à saisir le tribunal administratif lorsqu'ils constatent « l'irrégularité d'actes juridiques conclus par un établissement public de santé avec une entreprise de travail temporaire ». Le comptable public devra de son côté rejeter les paiements des rémunérations qui dépassent les plafonds réglementaires de l'intérim médical. Une façon de stopper plus nettement le mercenariat qui désorganise les équipes et obère les finances des hôpitaux.
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