Entraves dans l’accès aux soins dénoncées à la prison de Bordeaux-Gradignan, le ministre de la Santé répond

Par
Publié le 13/07/2022

Crédit photo : AFP

Dans un rapport publié au « Journal officiel » (« JO ») du 13 juillet, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) dénonce les conditions de vie « particulièrement indignes » des détenus du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan (Gironde).

Au cours de leur visite, réalisée du 30 mai au 10 juin 2022, la Contrôleure générale Dominique Simonnot et 11 contrôleurs ont constaté « un nombre important de dysfonctionnements entraînant des atteintes graves à la dignité et aux droits fondamentaux des personnes détenues », est-il relevé. À côté de la surpopulation, de l’insalubrité et des violences, « de graves carences affectent l’accès aux soins des détenus ».

Une unité sanitaire sous-dimensionnée

Le rapport pointe plusieurs facteurs conduisant à ces « entraves » dans l’accès aux soins de la population carcérale. L’équipe de l’unité sanitaire apparaît sous-dimensionnée au regard du taux d’occupation de 235 % observé dans l'ensemble des quartiers des hommes. Prévue pour assurer les soins d’une population « théorique » de 430 détenus, l’épique soignante « doit en réalité prendre en charge plus du double, à effectif constant », est-il souligné.

Les agents de surveillance sont par ailleurs « trop peu nombreux et trop peu disponibles pour accompagner les détenus vers l’unité médicale », poursuit le rapport. De même, « la suppression de l’équipe dédiée aux extractions médicales et son remplacement par une équipe locale de sécurité pénitentiaire sous-dimensionnée ont entraîné une augmentation du nombre des annulations d’extractions médicales », lit-on. La réorganisation des promenades a par ailleurs « profondément bouleversé la planification des consultations, contraignant régulièrement les détenus ne bénéficiant plus que d’une promenade quotidienne à choisir entre accès à l’air libre et accès aux soins ».

Enfin, des cas « d’ingérence inacceptable » de l’administration pénitentiaire dans les décisions médicales ont été rapportés aux contrôleurs. « La gravité de situations cliniques jugées urgentes par le personnel de l’unité sanitaire a ainsi pu être minimisée, et des extractions médicales retardées ou annulées d’autorité », alerte le rapport, rappelant que « les conséquences de ce type d’interventions sont susceptibles d’engager la responsabilité de l’État ».

Un problème « structurel et massif »

Conséquence de ces dysfonctionnements, la CGLPL estime que chaque jour, 10 à 15 patients programmés en consultation à l’unité sanitaire « ne s’y présentent pas » et « de nombreux rendez-vous sont reportés ». Le problème est ainsi « structurel et massif », s'inquiète la Contrôleure, soulignant que le service médico-psychologique rencontre des difficultés similaires.

En réponse à ce rapport assorti de recommandations d’urgence, le ministre de la Santé a apporté ses observations, également publiées au « JO ». L’unité sanitaire, dotée pour 430 détenus d’un effectif « théorique » de 24,04 ETP, a bénéficié de crédits non reconductibles supplémentaires à la fin de l’année 2020, à hauteur de 120 000 euros (pour un budget annuel de plus de 2 millions). Ces crédits sont destinés « à renforcer l’équipe d’un ETP de médecin assistant devant rejoindre l’équipe au mois d’août et d’un infirmier permettant de développer des actions de prévention et de promotion de la santé », indique le Dr François Braun.

Il souligne également qu’après des difficultés de recrutement avant la crise sanitaire, l’unité sanitaire disposait, au décours de l’épidémie de Covid-19, d’un « effectif médical satisfaisant », une situation mise à mal par la reprise de l’activité judiciaire et l’augmentation progressive de la population carcérale.

Sur la question des extractions médicales, des discussions sont en cours entre l’unité, l’administration pénitentiaire et l’agence régionale de santé (ARS) pour « adapter le fonctionnement et améliorer conjointement la réponse aux besoins de santé », annonce le ministre, listant par ailleurs les démarches engagées par l’ARS Nouvelle-Aquitaine pour « faire le point » sur la situation et estimer les besoins, alors qu’un nouveau centre pénitentiaire est à l’étude.


Source : lequotidiendumedecin.fr