Très sollicités par la stratégie de dépistage du Covid-19, les laboratoires de biologie médicale commencent juste à sortir la tête de l'eau, affirme le président du Syndicat des jeunes biologistes médicaux (SJBM). Il alerte sur la nécessité de bien respecter les recommandations scientifiques en matière de tests et de ne pas verser dans une politique consumériste.
Les demandes de tests RT-PCR n'ont cessé d'augmenter. À ce jour, quelle est la situation dans les laboratoires ?
Dr LIONEL BARRAND : Il y a eu une montée en charge extrêmement rapide depuis début juillet, où on est passé de 300 000 tests par semaine à 1,45 million à la mi-septembre. Nous avons eu de grosses difficultés en termes de ressources humaines (secrétaires, techniciens, infirmiers), au niveau des capacités analytiques totales mais également en approvisionnement en réactifs! Ces problèmes sont devenus criants au mois de septembre, quand nous avons appelé à cibler et à prioriser les patients.
Début octobre, il y a eu une légère décrue et nous sommes redescendus à 1,1 million de tests hebdomadaires réalisés. On a l'impression que les recommandations ont été mieux respectées. Il y avait moins de demandes fantasques, on ne testait plus les cas contacts de cas contacts par exemple... Cela nous a permis de souffler.
Les territoires qui avaient des rendus de résultats très longs pour des cas symptomatiques, comme le bassin lyonnais, l'Ile-de-France ou Toulouse et Marseille, ont pu rattraper leur retard et revenir sur des résultats en 24 à 48 heures, avec une moyenne nationale d'1,2 jour.
Cela dit, il ne faudrait pas que les demandes ré-augmentent trop car on risque d'avoir à nouveau des problèmes de réactifs. On a toujours 20 à 30 % de demandes de dépistage qui ne sont pas dans les recommandations. Il faut cibler et utiliser au mieux la PCR auprès des personnes qui en ont réellement besoin.
Le président de la République souhaite généraliser les tests rapides antigéniques, salivaires, ou encore les autotests. Qu'en pensez-vous ?
Pourquoi pas, mais pour l'instant ces tests ont des performances bien moindres par rapport à la PCR. Concernant les tests antigéniques, c'est de l'ordre de 60 %, selon une étude de l'AP-HP. C'est pourquoi, là encore, il faut bien rester dans les recommandations émises par la Haute Autorité de santé (HAS) et la Société française de microbiologie et les réserver aux personnes symptomatiques depuis moins de 4 jours, dont le test RT-PCR n'est pas disponible assez rapidement. Ils pourront être utilisés dans les campagnes de dépistage de masse, pour détecter des clusters quand il n'y a pas de risques particuliers, par exemple dans les universités, quitte à tester ensuite avec un RT-PCR.
Si on utilise ces tests rapides par facilité, dans le cadre d'une politique consumériste, ce sera catastrophique. Soit l'État suit les recos de la HAS, soit il sort de ce cadre scientifique, et alors c'est une décision basée uniquement sur la communication politique dont il faudra assumer la responsabilité.
Vous avez demandé à prendre part à la vaccination antigrippale. Est-ce faisable pour les biologistes dans le contexte actuel ?
Oui, car ce n'est pas la même activité que celle de dépistage par RT-PCR. Dans certains territoires ou régions, comme le Grand Est, nous étions tout à fait capables ces derniers jours de prendre quelques patients en plus pour les vacciner.
Les 4 000 sites de biologie médicale répartis sur tout le territoire ont les compétences nécessaires et les locaux adaptés en termes de sécurité, de traçabilité ou de confidentialité. Les techniciens peuvent aider à des prélèvements pendant que le biologiste vaccine. Cela peut être fait au moment d'une prise de sang, par exemple.
Évidemment, il n'est pas question de solliciter des laboratoires qui sont déjà sur les rotules et en manque d'effectifs. Mais chaque personne vaccinée en plus est un investissement : plus on vaccine, moins on aura de confusion entre grippe et Covid, et donc moins de dépistage à faire pour des personnes symptomatiques (pour lesquelles on va chercher le Covid en premier). Les cinq minutes qu'on passe aujourd'hui nous feront gagner une heure demain.
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