« Patient aisé américain, australien ou en provenance des pays du Golfe nécessitant opération chirurgicale cherche médecin et hôpital français disponibles. Pour tout renseignement, contacter Indigomed.net. »
Fantaisiste, cette petite annonce aurait pu trouver sa place sur le site Internet d'Indigomed, surprenant « Airbnb » médical fondé par un entrepreneur et une médecin généraliste reconvertie dans l'assurance. Sur le papier, le principe est simple : faciliter le lien entre une patientèle étrangère en demande de soins lourds et la crème de la médecine européenne, à des prix compétitifs (par rapport au pays de résidence, surtout les États-Unis). Une cinquantaine de cliniques, hôpitaux et établissements privés à but non lucratif, principalement français mais aussi allemands et italiens, sont déjà partenaires.
En préparation depuis 2015, cette initiative privée concrétise en partie les propositions de l'économiste Jean de Kervasdoué, missionné en 2014 par le Quai d'Orsay et le ministère de la Santé pour valoriser l'accueil dans les hôpitaux français de patients étrangers. À la clé : un potentiel de deux milliards d'euros sur cinq ans.
L'AP-HP plébiscitée
Dans l'Hexagone, le site, qui se positionne clairement sur des interventions lourdes, met en avant Necker, Robert-Debré, la Pitié-Salpétrière et Cochin, soit les « grands hôpitaux universitaires parisiens » de l'Assistance publique – hôpitaux de Paris (APHP). La Fondation Rothschild, l'Institut Curie, Montsouris, Les Diaconesses, Saint-Joseph et les Nouvelles cliniques Nantaises sont également cités. Tous bénéficient d'une fiche d'identité détaillée. Question « renommée », le classement du magazine « Le Point » côtoie le degré de certification de la Haute autorité de Santé (HAS). Photos de qualité et plan cartographique complètent l'offre.
Comment ça marche ? Indigomed se présente comme un service de deuxième avis médical en ligne proposé par les assurances à leurs adhérents (patients internationaux). Exemple type : une Américaine dans l'attente d'une mastectomie totale. Le site va lui faire une proposition de soins dans un hôpital européen partenaire assortie d'un devis forfaitaire : dans cet exemple, 25 000 euros iront à l'établissement qui prendra en charge l'opération dans les deux à trois semaines après ouverture du dossier. Dans ce cas figure, Indigomed se partage 750 euros avec le médecin traitant du patient étranger, rémunéré pour le suivi postopératoire. Le trajet, l'hôtel, la traduction du dossier médical et les frais de visa sont facturés en option.
12 000 médecins, 180 procédures chirurgicales
Depuis l'ouverture du site il y a un mois, seuls sept patients ont utilisé Indigomed : trois Australiens, deux Américains, un Dubaïote et un dernier en provenance du Maghreb. L'expertise française en urologie, en chirurgie reconstructrice après un cancer du sein et en cardiologie les a convaincus.
Avec ses établissements partenaires, Indigomed affiche un tableau de chasse de 12 000 spécialistes européens de 250 maladies, susceptibles de prescrire 180 interventions chirurgicales ou traitements médicaux. Indigomed affirme que l'accueil de cette clientèle étrangère « pourrait permettre une augmentation de ressources de 20 % voire 30 % pour certains hôpitaux, sans pour autant porter préjudice aux patients français en termes de disponibilité et d'accès aux soins ».
PDG et fondateur de la plateforme, Massimo di Cicilia insiste : pas question de parler de tourisme médical ou de filière « VIP » pour riches patients étrangers. « Nous visons la classe moyenne qui cherche des soins de qualité sans payer une fortune, assure-t-il au « Quotidien ».
Le site se contente de connecter les patients internationaux, leurs médecins traitants et les établissements partenaires (et de transférer les dossiers médicaux). « Nous n'avons pas notre mot à dire sur la façon dont les hôpitaux rémunèrent ensuite les praticiens. Ce n'est pas de notre ressort. » Contactée par le « Quotidien », l'AP-HP n'a pas été en mesure de répondre à nos questions.
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