Médecins, hôpitaux, industriels, professionnels du grand âge : avec des nuances, les acteurs du secteur oscillent entre déception et colère après les annonces du gouvernement sur le PLFSS 2020.
Médecins libéraux : ardoise salée
En plein virage ambulatoire, la médecine libérale attendait des signaux clairs de soutien. Certes, sur le papier, le poste « soins de ville » hérite d'un taux d'évolution supérieur (2,4 %) à celui l'hôpital (+2,1 %). Mais l'ampleur des économies laisse un goût amer. Le SML a fait ses calculs : la ville supportera « près du quart des 4,2 milliards d’euros d’économies attendues, dont 600 millions d’euros au titre de la maîtrise médicalisée ». Et ce, alors que sont lancés « la diversification des modes de rémunération et la mise à jour de la nomenclature ». Pas en reste, la CSMF dénonce un plan d'économies « drastique », incluant 520 millions sur la pertinence et l'adaptation des tarifs (biologie, radiologie et autres actes). « Ce n'est pas acceptable », tonne son président Jean-Paul Ortiz. Du côté de Bercy et de Ségur, on assure pourtant vouloir « réinvestir sur les soins ambulatoires, point d’entrée dans le système de santé ».
Pas question pour les libéraux, qui ont rempli leur contrat, de porter le chapeau. « C’est la politique du gouvernement qui est à la base de l’augmentation du déficit de la Sécu », recadre l'UFML-Syndicat. « Pertinence, efficience, mots-valises dont la traduction réelle est : faire mieux pour moins cher », déplore l'organisation du Dr Jérôme Marty. Ciblés, les biologistes subiront 205 millions d'euros d'économies (dont 170 pour les libéraux). « Je tombe des nues », se désespère le Dr Jean-Claude Azoulay, vice-président du Syndicat national des médecins biologistes (SNMB). La profession pourrait s'unir dans une grève de grande ampleur. Du côté des généralistes, la tension monte sur la question de la valorisation des soins non programmés. MG France se dit prêt à la grève des gardes dès décembre s'il n'obtient pas l'extension des horaires de PDS-A (dès 18H et le samedi matin).
Hôpitaux, cliniques : un sous-objectif qui fait mal
Les représentants des établissements sont remontés. Lamine Gharbi, président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), estime que les efforts réclamés sont « irréalistes ». La fixation d'un sous-objectif hospitalier à 2,1 % serait même « un non-sens économique et social » avec des dépenses qui évoluent au rythme de 4,4 %.
Pour la Fédération hospitalière de France (FHF, hôpitaux publics), c'est « la douche froide ». « Je pensais que le gouvernement avait mesuré l’urgence d’apporter de l’oxygène aux établissements. Avec un ONDAM à 2,1 % et 800 millions d'euros d’économies, nous repartons sur une période de diète alors que c’est tout l’inverse qu’il aurait fallu pour sortir l’hôpital de la crise », assène Frédéric Valletoux, président de la FHF. Même constat des établissements privés non lucratifs (FEHAP) qui jugent le sous-objectif hospitalier « particulièrement sévère ». Dans l'entourage de la ministre, on assure que la prochaine campagne tarifaire sera « positive »...
La colère gronde aussi chez les PH. Le SNPHARe dénonce un « permis de tuer » de l'hôpital. Action praticiens hôpital (APH) et Jeunes médecins voient dans ces arbitrages « un acte de destruction massive ». Les urgentistes de l'AMUF jugent que l'« austérité » se traduira « par des suppressions de postes et des fermetures de lits ».
Médicaments et DM : le verrou
Pour les industriels, le médicament sert à nouveau de « variable d'ajustement ». Outre les économies exigées (1,3 milliard), le PLFSS prévoit des sanctions à l’encontre des labos inconséquents en cas de pénuries. Quant aux dispositifs médicaux innovants, ils héritent d'une clause de sauvegarde spécifique. « PLFSS après PLFSS, les pouvoirs publics appliquent les mêmes mécanismes de régulation qui sont difficilement compatibles avec les objectifs d’attractivité affichés (...) », déplore Philippe Lamoureux, directeur général du LEEM (Les Entreprises du médicament). Du côté du Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (SNITEM), l'effort est jugé « délirant ».
La dépendance : une amorce qui fait pschitt
En anticipation de la loi grand âge et autonomie, attendue pour la fin de l'année, le PLFSS programme 500 millions d'euros (fléchés principalement sur le recrutement d'aides soignants et d'infirmiers et la modernisation des EHPAD). Sans surprise, cette enveloppe est jugée très loin des enjeux actuels, aussi bien par les directeurs d'établissement au service des personnes âgées que par le secteur de l'aide à domicile. Le rapport Libault sur la dépendance a évalué les besoins à 6,2 milliards d'euros supplémentaires par an jusqu'en 2024...
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