Après avoir fortement milité pour un changement de législation sur l’homéopathie et les pseudosciences, le collectif « No fake med », qui lutte contre la désinformation en santé, se positionne contre les pratiques non conventionnelles ou pseudo-thérapeutiques dans le champ de la périnatalité.
Dans une tribune publiée ce dimanche, le collectif met en garde contre les « risques importants » et les dérives liées à la montée en puissance de plusieurs « fakemeds » (au sens de « pratiques présentées comme apportant un bénéfice pour la santé en dépit de preuves absentes, voire contraires ») : l’ostéopathie, la section du frein de langue, l’aromathérapie et les colliers d'ambre.
Avis médical
Interpellé par certains de ses membres, « No fake med » a constitué à cet effet en novembre 2021 un groupe de réflexion sur la périnatalité. Contacté par « Le Quotidien », son président, le Dr Pierre de Bremond d’Ars, se souvient d’une personne « choquée de voir que l’on proposait de l’ostéopathie quasiment à chaque consultation, avant et après la naissance de son enfant ». En cas de refus, « on la regardait très mal, elle se sentait jugée ». Pour le généraliste francilien, les « fakemeds » citées par la tribune « semblent alarmantes et dangereuses, car elles sont, soit totalement inutiles, soit illégales ».
Sur l'ostéopathie, jugée « omniprésente », un décret de 2007 cadre les actes et les conditions d'exercice. Il précise qu’un ostéopathe « peut uniquement prendre en charge les troubles fonctionnels, il ne peut donc pas intervenir quand il y a une pathologie sous-jacente », insiste le Dr Bremond d’Ars. Et pour les enfants de moins de six mois, la profession « n’est pas censée les toucher sans avoir un avis médical et un certificat de non-contre-indication médical pour la manipulation du crâne, de la face et du rachis », poursuit le médecin.
Le recours à l'ostéopathie du nouveau-né et du nourrisson doit donc être « banni », estime la tribune, qui milite contre cette prise en charge « de plus en plus systématique au sein des maternités et lors du retour à domicile ». Et de citer un syndrome « inventé de toutes pièces » pour justifier des manipulations : le « syndrome de Kiss ». Or, celui-ci « n'existe pas et ne repose sur aucune base diagnostique ni scientifique ».
Complications locales
La section du frein de langue est également épinglée par la tribune qui constate une explosion des frénotomies linguales (voire labiale et buccale). Les difficultés d'allaitement sont de plus en plus « abusivement rattachées à un frein de langue trop court et un geste médical précoce est proposé », observe le collectif qui rappelle qu’il n’y a pas de consensus scientifique international sur le sujet.
La section du frein de langue ne prévient pas les troubles du langage et « n'a pas prouvé son efficacité sur les problèmes d'apnée du sommeil, de reflux gastro-œsophagien ou de diversification alimentaire, y compris de manière préventive », énumère « No fake med ». D’autre part, ce geste peut entraîner des « complications locales en termes de cicatrisation voire d'hémorragie » et interférer avec l'allaitement maternel et l'alimentation de l’enfant.
Huiles essentielles à gogo
Le collectif constate aussi une augmentation de l’utilisation des huiles essentielles à toutes les étapes de la maternité pour doper la fertilité, « soulager les maux de la grossesse » ou soigner les viroses banales. Or, ses bénéfices sont « plus souvent prétendus que prouvés ». Certaines huiles essentielles contiennent même des composés neurotoxiques (cétones, terpènes) qui peuvent provoquer « des fausses couches, interfèrent avec le système hormonal et avec le développement du fœtus », avertit le collectif. La plupart sont contre-indiquées pendant la grossesse, l'allaitement et chez le jeune enfant jusqu'à 6 ans.
Pour le collectif, ces exemples montrent que la plupart de ces « fakemeds » sont « inutiles » et « coûteuses » pour les familles, quand elles n’ont pas une répercussion négative sur la prise en charge des enfants. Il appelle les Ordres professionnels et les autorités de santé à être « véritablement acteurs dans cette lutte pour la sécurité des patients », en s’inspirant de ses propositions.
Faire le tri
« No fake med » réclame en revanche le renforcement le réseau autour de la périnatalité mais aussi des actions de prévention, d'écoute ou d'accueil en PMI. Autres préconisations : encadrer strictement le recours à l'ostéopathie avec une information « claire et loyale » délivrée aux parents, ou faire un tri dans les formations en santé qui font « trop souvent la part belle à des pratiques illusoires ». Enfin, le collectif milite pour la réalisation d’un audit, « face à l'augmentation inquiétante des frénotomies linguales ».
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