« LA PRISE EN CHARGE thérapeutique nécessite de bien faire comprendre aux patients leur traitement et de leur expliquer l’importance de l’observance. » Une mission qui, selon Philippe Gaertner, est naturellement dévolue aux pharmaciens. « Spécialistes du médicament, les officinaux ont un rôle de premier plan à jouer dans l’accompagnement des patients souffrant de pathologies chroniques », explique le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Un point de vue partagé par Gilles Bonnefond. Le président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) considère en effet que « le pharmacien est le professionnel de santé le plus en contact avec le patient et donc le plus à même de le sensibiliser sur son traitement et d’en vérifier la bonne observance ».
Pharmacies pilotes.
Un constat qui a d’ailleurs incité Michel Rioli à proposer à l’agence régionale de santé (ARS) des Pays de la Loire de s’engager aux côtés des pharmaciens pour améliorer l’observance des patients chroniques. « D’ici à la fin de cette année, des pharmacies pilotes vont voir le jour afin d’une part, de développer des actions de prévention santé et de dépistage ; et d’autre part, de suivre les patients chroniques », explique l’auteur du rapport « Le rôle du pharmacien d’officine dans le parcours de soins ». Rien d’étonnant dès lors à ce que les pathologies prioritairement concernées soient le diabète, l’hypertension artérielle (HTA), la douleur, le sevrage tabagique et l’angine. Des pathologies prises en charge à l’officine et que devraient compléter, dans une deuxième phase, la cancérologie. La raison ? « Une évolution naturelle vers une prise en charge ambulatoire avec le développement des chimiothérapies per os », explique Michel Rioli.
Un fond fléché.
Une évolution qui nécessitera toutefois d’emporter préalablement la conviction des caisses primaires d’assurance-maladie. Car « la prise en charge dans un espace de confidentialité d’un patient souffrant d’une pathologie chronique nécessite de dégager du temps et donc de pouvoir embaucher un pharmacien assistant », ajoute Michel Rioli. Soit 60 000 euros par an auxquels s’ajoutent encore une dizaine de milliers d’euros. Un coût important que la prochaine loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pourrait toutefois contribuer à prendre en charge. « Un fond fléché sera proposé pour financer des expérimentations dans des pharmacies pilotes », précise encore Michel Rioli. À charge ensuite de faire correspondre le(s) projet(s) aux attentes de l’ARS pour qu’un protocole voie le jour. Les ARS ont en effet été dotées de budgets pour mettre en place les politiques de santé qu’elles ont décidé de promouvoir. Une avancée considérable de la loi HPST qui change la donne. Car le coût important consacré à l’amélioration de l’observance a sans doute contribué à geler certains projets ; voire à inciter l’assurance-maladie à s’appuyer sur d’autres professionnels de santé. Car les pharmaciens ne sont pas seuls à s’intéresser à l’observance. La place centrale qu’ils revendiquent leur est contestée, en particulier, par les infirmières. Proches également des patients, celles-ci présentent en outre l’avantage de la mobilité, puisqu’elles se déplacent au domicile du patient.
Sophia a ouvert la voie.
Un atout auquel n’a sans doute pas été insensible l’Assurance-maladie, lorsque Sophia a été mis en place. Lancé en 2008, dans le cadre du plan ministériel 2007-2011 pour les personnes atteintes de maladies chroniques, ce programme est entièrement gratuit. Financé par le fonds national de prévention d’éducation et d’information sanitaire (FNPEIS), qui a été créée en 1988, pour promouvoir des actions propres à améliorer l’état de santé des Français, Sophia propose aux diabétiques pris en charge dans le cadre d’une affection de longue durée (ALD) « des conseils et des informations adaptés à la situation de chaque personne, en relais des recommandations du médecin traitant ». L’objectif ? « Limiter les risques de complication liés au diabète ou leur aggravation ». Car l’adoption de bons réflexes, permet de mieux vivre au quotidien avec le diabète. Et la formule semble séduire les patients qui, dans les onze départements où il est expérimenté, sont déjà 53 000 à avoir adhéré au programme.
Un précédent qui doit inciter les pharmaciens à se mobiliser pour investir un domaine qui leur semblait naturellement promis. D’autant, précise Thierry Barthelmé, président des UTIP, qu’« avec le dossier pharmaceutique, l’officine dispose d’un atout considérable pour éviter l’iatrogénie et améliorer l’observance ». Dans cette optique, la FSPF, en collaboration avec les UTIP, a « mis au point un programme de suivi des pathologies cardiovasculaires qui devrait recevoir le soutien d’assurances complémentaires », explique ainsi Danielle Paoli.
Les complémentaires séduites.
Une évolution logique, puisque les complémentaires ont tout intérêt à occuper ce terrain encore en friche. Certaines s’y sont d’ailleurs déjà aventurées. La mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN) loue ainsi des locaux et octroie une subvention à la maison du diabète, de l’obésité et des risques cardiovasculaires (Maison DOC) qui conçoit et réalise des programmes d’éducation thérapeutique ouverts à tous les patients. Quant à la Mutualité Française, elle développe des actions similaires, à Paris et Saint-Étienne, pour ses propres adhérents. Autant d’exemples qui suffisent à illustrer l’intérêt porté par tous les acteurs à une optimisation de la prise en charge des patients chroniques.
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