C’EST UN CABINET de recrutement un peu particulier. « Nous sommes très spécialisés », confie son président, le Dr Ludovic Jubé. De fait, Altigapharma chasse les têtes pour les industries de santé – et principalement pour l’industrie du médicament. Dans ce périmètre, une partie de son activité consiste à chercher… des médecins. Et tous, a priori, l’intéressent. « Ils peuvent être déjà dans le circuit ou bien débutants, venir de la ville ou de l’hôpital, vouloir un temps plein ou bien préférer des missions ponctuelles… », fait valoir le Dr Jubé. Pas de profil type, donc. D’autant moins que, à l’instar des hôpitaux, des cliniques, de la médecine scolaire ou de la médecine du travail…, « l’industrie pharmaceutique manque cruellement de médecins » : les trous de la démographie professionnelle valent aussi pour les laboratoires. Résultat, la traque n’a rien d’évident. Les praticiens qui sonnent d’eux-mêmes à la porte d’Altigapharma sont, pour l’essentiel, des médecins d’origine étrangère (Algérie, pays de l’Est) : « Ils ne peuvent pas s’installer en libéral et ne veulent plus jouer les FFI [faisant fonction d’internes] à l’hôpital. »
Les autres recrues, il faut aller les chercher. Et c’est de plus en plus dur. « Quand on passait une annonce dans la presse il y a vingt ans, on avait aussitôt 190 candidats, se souvient Ludovic Jubé. Aujourd’hui, avec la même annonce, on obtient dix réponses. » Le cabinet compose avec un handicap que n’ont pas d’autres secteurs : les médecins ne pensent pas à l’industrie comme à un employeur potentiel. Les recruter, c’est d’abord leur dire que des postes existent, ensuite leur expliquer en quoi ils consistent. « Le défaut d’information est un problème majeur », concède Valérie Charlon, directeur associé. Approcher les médecins n’est pas toujours facile… On se souvient en particulier à Altigapharma d’une intervention légèrement mouvementée dans une faculté de médecine – « Le collège de médecine générale considérait que nous étions un peu les marchands du Temple », raconte le Dr Jubé.
Une autre planète.
Malgré les obstacles, alors que l’industrie, tous métiers confondus, emploie autour de 1 500 médecins (sur les 100 000 personnes qu’elle fait travailler en France), son cabinet recrute quelque 200 médecins par an. Des jeunes « qui se rendent compte qu’ils n’ont pas envie d’exercer la médecine », des praticiens chevronnés qui sont déjà dans le circuit de l’industrie ou « qui ont envie d’évoluer » – ceux-ci peuvent « en avoir assez de l’exercice solitaire ou du côté répétitif » de leur métier s’ils viennent de la ville, explique Valérie Charlon, ou bien considérer leurs perspectives de carrière bouchées s’ils viennent de l’hôpital. À tous, il est tenu un langage clair. « Quand ils arrivent, si on leur dit " business development " ou " market research " , ils se demandent sur quelle planète ils sont tombés. Les médecins ont besoin d’être accompagnés », explique Ludovic Jubé. Qui concède : « Ce n’est pas facile, surtout quand on vient du libéral, de faire ce choix de rentrer dans une entreprise où on a une hiérarchie, des objectifs sur lesquels on est évalué… » Parfois d’ailleurs, ça ne colle pas – 5 % environ des médecins faisant le choix de l’industrie n’y restent pas. Mais à l’inverse, insiste le président d’Altigapharma, beaucoup « s’y épanouissent ».
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