Si le phénomène reste encore très marginal, des patients français commencent à se fournir à leurs frais en génériques des nouveaux traitements de l'hépatite C auprès de firmes étrangères, selon un nombre croissant de témoignages reçus par l'association SOS Hépatite. « Je n’ai plus qu’une solution, tenter de me procurer un générique avec les risques que cela suppose par rapport à sa fiabilité », affirme une certaine Karine. « Je viens de terminer le traitement avec Ledifos (générique de Harvoni), 12 semaines, [...] Il me reste maintenant 3 mois d’attente pour confirmer que le virus ne revient pas », précise un autre patient anonyme qui affirme être suivi dans un CHU.
Ces témoignages ont été mis en avant à l'occasion d'une conférence de presse organisée par Médecin du Monde, SOS Hépatites et la Fédération Addiction, et illustrent les difficultés d'accès des patients aux nouveaux traitements de l'hépatite C. À une semaine de la Journée mondiale de lutte contre les hépatites du 25 mai, les associations estiment que l'importation de génériques pourrait être une solution si les pouvoirs publics, persistent à n'autoriser les coûteux nouveaux traitements (Sovaldi, Harvoni, Viekirax et Exviera) qu'aux patients les plus graves, aux stades de fibrose F4, F3 et F2 sévères.
14 500 patients traités en 2015
En 2015, 14 500 personnes seulement ont été traitées en 2015 selon la Caisse nationale d'assurance-maladie. « Dans le même temps, les réunions de concertation pluridisciplinaires ont refusé le traitement à 50 000 personnes, sans compter les patients précarisés qui n'arrivent pas jusqu'à la RCP », affirme Yann Mazens directeur de SOS Hépatites.
En France, un particulier peut importer ses médicaments, moyennant plusieurs conditions synthétisées dans une fiche pratique publiée par l'Agence nationale du médicament et des produits de santé (les formulaires à remplir sont disponibles sur cette page, à la rubrique importation). Une autorisation d'importation est nécessaire si le médicament fait l'objet d’une AMM ou d’un enregistrement dans l’État de provenance mais pas dans l’Espace économique européen, ou quand le médicament n’est pas autorisé dans le pays tiers de provenance.
Les associations démarchées par les génériqueurs
SOS Hépatites et TRT5 ont déjà été approchés par des entreprises proposant des contrats d'importation de génériques. « On nous propose des boîtes de Myhep, un générique du sofosbuvir, fabriqué en Inde par Mylan, au prix de 250 euros la boîte, précise détaille Yann Mazens, directeur de SOS Hépatites, une cure de 12 semaines de sofosbuvir produit en Inde et de daclatasvir produit au Bangladesh coûte 550 euros, contre 66 500 euros avec les princeps. » Les courtiers et laboratoires qui s'engagent sur de tels tarifs réclament de gros volumes de génériques. Une autre proposition émanant d'une entreprise américaine spécialisée dans l'importation de génériques indiens aux États-Unis, fixe le coût de la cure de 12 semaines entre 3 000 à 4 000 euros.
Suite à ces sollicitations, la Direction générale de la santé (DGS) a réagi dans une lettre adressée aux professionnels de santé. « Les médicaments proposés par ces industriels hors Union européenne (UE) sont peut-être des médicaments falsifiés et peuvent entraîner des risques chez les patients qui les utiliseraient. En conséquence, il convient de ne pas donner suite à ces sollicitations et de les signaler aux autorités compétentes afin qu'elles prennent les mesures pour faire cesser ces pratiques », insiste l'institution.
La tentation des génériques est d'autant plus forte qu'une étude récente a montré la non-infériorité des génériques sur les princeps de sofosbuvir/lédipasvir avec ou de sofosbuvir/daclatasvir. Les associations comptent jouer la carte des génériques si les annonces de la ministre de la Santé prévues pour le 25 mai ne contiennent pas l'élargissement des nouveaux traitements à tous les stades de fibrose.
Une renégociation pour la fin de l'année
Dans les coulisses, « la ministre est d'accord pour dire qu'il y a une réflexion politique à mener sur la manière dont les prix sont fixés en France, note le Dr Pascal Melin, président de SOS Hépatites. Elle nous a expliqué que l'ouverture ne pouvait pas se faire sans une renégociation sur les prix qui sera amorcée à la fin de l'année. On ne peut pas se contenter d'une promesse de changement pour 2017. On sait qu'elle ne sera plus aux manettes en 2017. »
La possibilité d'une licence d'office saisie par le gouvernement français est également envisagée depuis longtemps par les associations. Un tel dispositif a été sollicité par des pays comme le Canada, la Malaisie, l'Italie, la Thaïlande, le Mozambique, le Ghana, le Zimbabwe ou le Brésil pour d'autres traitements. Marisol Touraine n'est pas favorable à cette proposition.
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