« On ne paiera bientôt plus chez le médecin ». Le titre faisait la Une du Parisien mercredi, avant la présentation hier, du projet de loi de la santé qui prévoit la généralisation du tiers payant à l’horizon 2017. La mesure avait été dévoilée en septembre 2013, provoquant déjà la colère des médecins. Rebelote aujourd’hui. Les syndicats multiplient les interventions dans les médias et les communiqués de presse pour dire tout le mal qu’ils pensent de ce dispositif. Morceaux choisis.
« Il ne faut pas que la carte vitale devienne une carte de paiement »
Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français)
« Un tiers payant social, oui. Obligatoire, non. » Le président de la CSMF a déroulé son argumentaire sur Europe 1 jeudi matin. Il ne veut pas que « l’acte médical devienne un service, un dû », que « la carte vitale devienne une carte de paiement ». Le médecin met en garde les pouvoirs publics sur le risque de déresponsabiliser les patients, « d’amplifier l’attitude consumériste ». « Ce qui est gratuit est dévalorisé » martelle le Dr Ortiz.
Jean-Paul Ortiz, sur Europe 1.
Il pointe également du doigt les obstacles techniques à la généralisation du tiers payant. Comment le médecin va-t-il récupérer les paiements auprès des plus de 400 complémentaires santé qui existent en France ? Comment récupérer les 1 euro de franchise médicale ? « Il est hors de question que je mette un cochon tirelire sur mon bureau » ironise le président de la CSMF qui rappelle que les pharmaciens font souvent appel à un temps plein pour assurer la gestion administrative du tiers payant.
Le syndicat promet d’entrer en conflit avec le ministère de la Santé s’il persévère dans son action. Comment ? Les modalités d’action sont remises à plus tard…
« Les médecins ne veulent pas d’une corde au cou »
Jean-Paul Hamon, président de la FMF (Fédération des médecins de France)
« On a une ministre qui est totalement sourde, qui n’écoute personne, qui est dogmatique. » Sur RTL, jeudi matin, Jean-Paul Hamon s’en est pris à Marisol Touraine qu’il accuse de détruire la médecin libérale. « Les médecins sont d’accord pour pratiquer le tiers payant aux personnes qui en ont besoin, rappelle le syndicaliste. On le fait déjà pour les CMU, les aides médicales d’État, là on s’apprête à le faire pour ceux qui n’ont pas les moyens de se payer une mutuelle. » Mais pas question de généraliser cette mesure « à des personnes qui n’en n’ont pas besoin ».
La mesure pourrait coûter cher aux médecins, plus de « 3 euros par consultation » estime le Dr Hamon, en rappelant les chiffres avancés par les centres de santé qui appliquent déjà la mesure. « Les pharmaciens se sont mis la corde au cou [en appliquant le tiers payant généralisé] et les médecins ne veulent pas » vitupère Jean-Paul Hamon qui entrevoit toutefois une lueur d’espoir… : « Si on décide de confier à l’ASIP Santé [en charge du DMP] la gestion du tiers payant, on se dit qu’on a peut-être la chance de mourir avant que le tiers payant généralisé soit appliqué. »
Jean-Paul Hamon, sur RTL.
« Une mesure toxique pour les finances publiques et pour celles des médecins généralistes »
UNOF-CSMF
Le syndicat a réagi dans un communiqué de presse dans lequel il dénonce les dérives du tiers payant généralisé. « Sachant que moins de 40% des médecins généralistes sont pourvus d’un secrétariat, il sera impossible à l’immense majorité d’entre eux de contrôler leurs encaissements » constate l'UNOF-CSMF qui craint une multiplication des impayés.
« La bureaucratisation de la médecine libérale que signifierait la généralisation du tiers payant en imposant une gestion et un contrôle des paiements représente un coût chiffré à 3,50 € par acte par la Fédération des centres de santé mutualistes, dont évidemment le Gouvernement ne propose pas la prise en charge. » Autrement dit, cette mesure équivaut à une baisse tarifaire « totalement inacceptable », à une « mise sous tutelle des médecins généralistes libéraux par l’État » . Le syndicat préconise à la place le recours à une carte de paiement à débit différé santé.
« Une médecine caporalisée »
Jérôme Marty, Union française pour une médecine libre (UFML)
L’association de médecins rejoint les syndicats dans leur combat contre le tiers payant généralisé (TPG). Son président, le Dr Jérôme Marty, craint une nouvelle baisse des tarifs, en raison d’un coût de gestion estimé à 3,50 euros par acte. « La mise en place du TPG va aggraver encore la crise de vocation pour la médecine de ville », une médecine qui deviendra « caporalisée » anticipe le généraliste.
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