Alors que la recherche dans le domaine du VIH s'intensifie autour de la notion de rémission (« HIV cure »), le collectif TRT-5 CHV attire l'attention sur les questions éthiques que soulèvent les interruptions analytiques de traitement (IAT).
Ces IAT sont « un outil indispensable » à la recherche sur la rémission du VIH : elles consistent, pour le participant à un essai clinique, à arrêter un temps son traitement antirétroviral, sous contrôle médical rapproché. Les chercheurs étudient les critères cliniques, virologiques, et immunologiques, jusqu'à une éventuelle remontée de la charge virale.
Deux principaux modèles d'IAT existent : le « time to rebound », dont le but est de retarder la remontée de la charge virale pour évaluer l'efficacité du traitement expérimental étudié ; et le « rebound set point study », dont l'objectif est le contrôle du virus après le rebond viral. Pour rappel, l'objectif des recherches HIV cure est d'atteindre une rémission, c'est-à-dire vivre sans traitement avec une charge virale indétectable ou très basse, sans risque de transmission, ni effets négatifs sur sa santé (comorbidités).
Consentement éclairé, information sur les risques
Aussi indispensables soient-ils, les essais impliquant des IAT ne sont pas sans risques, considère le collectif TRT-5 : perte des bénéfices du traitement antirétroviral sur la santé, apparition de résistances, extension des réservoirs viraux latents, risque de transmission du VIH en l'absence de moyen de protection complémentaire (préservatif, prophylaxie pré-exposition dite Prep, traitement post-exposition ou TPE)…
Aussi le collectif insiste sur la nécessité d'une « information complète et sincère pour un consentement éclairé ». Il propose notamment que l'équipe investigatrice ait à sa disposition une liste de points spécifiques à aborder avec les participants (impact potentiel sur la santé physique, mentale, vie familiale et intime, résultats attendus, etc.). Les participants du bras placebo/contrôle doivent aussi recevoir une information spécifique, afin de comprendre les arguments scientifiques justifiant le design de l'essai.
Le suivi proposé pendant l'IAT doit être « rapproché » et « raisonnable ». « La fréquence et l’exhaustivité des analyses réalisées, complétées par des études virologiques et immunologiques nous paraissent un gage de sécurité. Néanmoins, nous recommandons de minimiser les contraintes », en développant les visites à domicile, les prélèvements en ville et les auto-tests.
Discussion autour des critères de reprise des antirétroviraux
La fixation des critères de reprise du traitement antiviral après une pause est un point d'attention délicat, alerte le collectif, d'autant que les conséquences d'une remontée de la charge virale sont difficiles à évaluer.
D'un côté, une reprise de la réplication du virus pourrait être dommageable et aller à l'encontre des efforts pour limiter la constitution de réservoirs cellulaires. De l'autre, reprendre trop rapidement le traitement, sur des critères liés à la charge virale*, pourrait masquer certains profils de personnes « contrôleuses post-traitement ». Un premier rebond de la charge virale n’est pas forcément significatif d’un échec de la stratégie visée, est-il expliqué. Une hausse transitoire de la charge virale peut être observée, même chez des personnes dont l'organisme arrive à contrôler naturellement le virus (ce qui a aussi été observé chez des primates).
« Dans l’attente d’une meilleure compréhension des mécanismes en œuvre, nous engageons les équipes de recherche à faire preuve de lucidité et de responsabilité dans la détermination de ces seuils », écrit le TRT-5. Le collectif insiste sur la nécessité d'identifier des biomarqueurs prédictifs d’activation des réservoirs et de l’échec de certaines stratégies, pour améliorer la prise en charge des personnes vivant avec le VIH (PVVIH).
Protection et représentativité
Le collectif TRT-5 insiste sur l'importance d'expliquer le risque potentiel de transmissions pendant une IAT, et de rappeler les moyens de protection existants, dont la Prep pour le(s) partenaire(s).
Il appelle enfin à mieux inclure les femmes (seulement 11 % des participants aux essais HIV cure en 2015) et les trans dans l'élaboration des recherches.
*Les avis sur les seuils de charges virales amenant une reprise du traitement antirétroviral varient en fonction des essais. Il semble y avoir néanmoins un consensus pour que l’IAT soit interrompue après une remontée de la charge virale à 100 000 copies/ml sans condition de durée ou après 4 mesures hebdomadaires consécutives de charges virales supérieures à 1 000 copies/ml sans signe de baisse. Il y a aussi consensus pour dire que toute mesure élevée de charge virale doit être confirmée par une deuxième mesure.
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