Fin de vie : la relaxe d'un vétérinaire après une prescription létale relance le débat

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Publié le 06/05/2022

Crédit photo : PHANIE

Le 2 mai, le tribunal correctionnel d’Angers a relaxé un vétérinaire, poursuivi pour « faux et usage de faux » après la prescription de médicaments létaux (normalement dédiés aux animaux) à un ami atteint de la maladie de Charcot. « Son geste n’a rien de militant. Il a simplement été face à une situation humaine tragique à laquelle il a décidé de répondre », précise son avocat, Me Antoine Barret, cité par « Libération ». Le juge a ainsi décidé de retenir « l’état de nécessité » dans lequel se trouvait le mis en cause pour justifier la relaxe.

Pour l’heure, les motivations de cette décision de justice ne sont pas encore rédigées. Et, si le parquet a annoncé faire appel de la relaxe, l’affaire relance néanmoins, une nouvelle fois, le débat politique sur la fin de vie, en mettant en lumière un angle mort de la loi Claeys-Leonetti, adoptée en 2016.

Des cas non pris en compte par la loi

« Ce cas illustre une fois de plus la nécessité de compléter la législation française qui n’a rien prévu pour un certain nombre de patients, comme les malades incurables. Malgré d’indéniables bénéfices, la loi Claeys-Leonetti laisse de grandes lacunes », estime auprès du « Quotidien » le Pr Jean-Louis Touraine, député et rapporteur de la loi de bioéthique.

Les textes actuels ont mis en place les directives anticipées, permettant aux malades de préciser leurs souhaits concernant leur fin de vie, et la possibilité d’engager une sédation profonde et continue jusqu’au décès, si ce dernier est imminent et inévitable. Mais, ces dispositions « ne répondent pas aux besoins d’une partie des patients, comme les patients atteints de la maladie de Charcot, plongés dans une extrême souffrance physique et mentale et qui veulent mourir », poursuit le Pr Touraine.

Selon lui, la question de la fin de vie de ces patients, dont « la survie est insupportable », devient « prégnante, car les progrès de la médecine ont pour conséquences de prolonger l’agonie de ces malades. Nous sommes face à un nouveau défi, un nouvel enjeu de santé ». Au milieu du XXe siècle, « les médecins abrégeaient les souffrances de leurs malades en injectant ce qu’on appelait le "cocktail lytique" (Dolosal, Largactil et Phénergan). Mais c’était pratiqué sans l’accord du malade, dans une forme de paternalisme médical », rappelle l’immunologiste.

La fin de vie au menu du quinquennat

Celui qui a présidé, à la demande du président Emmanuel Macron, une commission permanente sur la fin de vie à l’Assemblée nationale insiste sur l’urgence de légiférer sur cette question, au moment où « 92 à 96 % des Français sont favorables à une aide active à mourir dans certaines conditions ».

Alors qu'en mars, le président, alors candidat à sa réélection, a évoqué lors d’un déplacement à Aubervilliers un nouveau débat politique sur la fin de vie, le Pr Touraine se dit « convaincu que cela va avancer pendant ce nouveau mandat », après une « consultation large » et sans provoquer de « défilés dans la rue », car « on laisse à chacun, malades et médecins, la liberté de choisir ». Si le Pr Touraine n’est pas candidat au renouvellement de son mandat de député lors des prochaines élections législatives, il entend « continuer à agir en dehors de l’Assemblée ».


Source : lequotidiendumedecin.fr