Chargé par le président de la République Emmanuel Macron, fin 2017, de proposer un plan de bataille pour les banlieues, Jean-Louis Borloo, ancien ministre de l'Écologie de Nicolas Sarkozy et ministre délégué à la Ville de Jacques Chirac, a rendu ce jeudi 26 avril son rapport au premier ministre Édouard Philippe.
Dans un document de plus de 150 pages, il consacre un volet à la santé. Son but : rompre l'isolement médical des quartiers prioritaires de la ville (QPL) et garantir à tous la protection et l'accès aux soins.
Les quartiers prioritaires de la ville présentent un « déficit de l'offre de soins », constate-t-il. La densité en professionnels de santé de proximité – généralistes, dentistes, infirmiers, kinésithérapeutes, sages-femmes – y est « deux fois inférieure à ce qu'elle est dans les unités urbaines englobantes ». Les praticiens spécialistes y sont « 3,2 fois moins présents ». Le déséquilibre est encore « plus marqué pour les psychiatres, gastro-entérologues et les ophtalmologues », note Jean-Louis Borloo. Des chiffres cohérents avec ceux publiés par l'Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) en 2016.
Dans ces quartiers, les médecins « évoquent des pathologies liées à la précarité, des habitudes alimentaires déséquilibrées, le recours trop tardif aux soins ou des conduites à risques », peut-on lire.
Aides à l'installation et stages d'internat
Avec une démographie médicale délicate et un problème d'accès aux soins majeur, Jean-Louis Borloo estime que la création de 200 centres de santé et maisons pluridisciplinaires dans ces quartiers ou à proximité est indispensable. Pour ce faire, l'investissement devra être « entre 0,3 et trois millions d'euros pour un coût moyen de l'ordre de deux millions d'euros », calcule-t-il. Le financement reviendrait aux agences régionales de santé (ARS), les collectivités et la caisse des dépôts et consignations. Le loyer serait « symbolique ». L'ancien maire de Valenciennes préconise également le financement de postes de médiation médicale pour informer les patients sur leur droit en matière de santé. Il propose aussi de soutenir financièrement le secrétariat des maisons de santé.
Enfin pour éviter de faire de ces structures des coquilles vides, il conseille d'avoir des conditions d'accès relativement souple : activité médicale sur des temps non complets, aides à l’installation, proposition de stages d'internat dans ces quartiers.
L'auteur recommande des formations spécifiques aux étudiants en médecine et à la réserve sanitaire sur la gestion des conflits, l'approche communautaire et interculturelle car l'exercice dans les quartiers prioritaires « fait appel à des compétences très particulières au regard du contexte culturel et social ».
Cabine de téléconsultation
Parmi les autres pistes avancées, Jean-Louis Borloo propose la mise en place de maisons numériques des services publics pour répondre à l'absence de médecins. Afin de « lutter contre le manque de médecins et de personnels
médicaux », les habitants auraient accès à la cabine de télémédecine consult station, déjà mise en place en Alsace ou dans le Var. Ils consulteraient ainsi un médecin à distance par visioconférence « avec un coach formé sur place », peut-on lire. Le développement de la téléconsultation paraît être un autre levier. L'ex-président de l'UDI cite la possibilité de consultation de « SOS médecin à distance » 24 heures/24 et dans plusieurs langues.
La maison numérique permettrait aussi de faire de la rééducation à la dyslexie grâce au logiciel Dialogo de sémiophonie. D'autres propositions visent à former les habitants aux applications mobiles de prévention de la santé (suivi de l'activité physique, prévention des cancers, entretien de la mémoire, etc.).
Pour lutter contre la saturation des urgences, Jean-Louis Borloo souhaite créer à proximité des services hospitaliers un service dédié aux consultations de soins non programmés. Il espère ainsi que les patients dont les besoins relèvent de la médecine générale qui n'ont pas de médecin traitant ou disponible rapidement s'y présentent.
Enfin, il suggère de transférer la médecine scolaire aux départements. « La médecine scolaire est aujourd’hui dans l’incapacité d’assumer réellement ses missions, faute de moyens humains et matériels : au niveau national, elle est passée en dix ans de 1400 à 1000 médecins », rappelle-t-il. En Seine-Saint-Denis, on ne compte que 29 médecins scolaires, soit un pour 12 000 élèves.
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