Au terme de dix années d'expérimentations inabouties et de financements dérogatoires, un cadre commun et pérenne pour la télémédecine a été posé avec la signature de l’avenant conventionnel n°6 par la CNAM et quatre syndicats de médecins libéraux (CSMF, MG France, SML et Le Bloc), la FMF devant délibérer avant la fin du mois.
Fruit de 5 mois de négociations, ce texte encadre deux types d'actes, la téléconsultation et la télé-expertise, il précise les tarifs remboursés par la Sécu et le calendrier de déploiement. Dans un contexte de démographie médicale déclinante, la montée en puissance de la télémédecine constitue un levier majeur pour faciliter l’accès aux soins, en premier lieu dans les zones déficitaires. Il s'agit aussi de simplifier la prise en charge et le suivi des patients, notamment les 12 millions en ALD.
Quel cadre général ?
La téléconsultation implique une consultation à distance entre un médecin et un patient. Le dispositif retenu est ouvert à tous les médecins, quelle que soit leur spécialité, et à toute situation médicale compatible, y compris pour les consultations psychiatriques. Le praticien qui souhaite recourir à cette pratique engage sa responsabilité, c'est à lui de déterminer si la consultation peut être réalisée à distance. La téléconsultation ne peut pas être préconisée pour certains actes complexes ou très complexes nécessitant l'examen physique du patient. L’avis ponctuel du consultant est également hors du cadre.
La télé-expertise doit permettre à un médecin de consulter l'avis d'un confrère face à une situation médicale. Le recours est apprécié au cas par cas par le médecin requérant, et l’opportunité de sa réalisation relève de la responsabilité du médecin sollicité par son confrère. Quel que soit l'acte concerné, il devra donner lieu à la réalisation d'un compte rendu transmis au médecin demandeur.
Quelles conditions ?
La téléconsultation doit s'inscrire dans le respect du parcours des soins, avec une orientation initiale par le médecin traitant. Ce principe ne concerne pas les spécialistes en accès direct (pour certains actes des gynécologues, ophtalmologues, psychiatres, neuropsychiatres, stomatologues, spécialistes en chirurgie orale ou en chirurgie maxillo-faciale) et les patients de moins de 16 ans. Sauf dérogations, le médecin doit avoir vu le patient au cours des 12 derniers mois et obtenir son consentement. Pour les patients sans médecin traitant désigné ou non disponible dans le délai compatible avec sa santé, la téléconsultation pourra être proposée par une organisation territoriale (maisons ou centres de santé, communautés professionnelles territoriales de santé – CPTS).
Au niveau technologique, la téléconsultation est obligatoirement réalisée par vidéotransmission, via une plateforme certifiée par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). En pratique, c'est le médecin qui envoie le lien directement au patient, l'invitant à se connecter vers un site ou une appli sécurisés. Le patient non équipé ou peu familier des nouvelles technologies pourra être assisté par un autre professionnel de santé équipé (pharmacien ou infirmière venant à domicile).
Concernant la télé-expertise (qui peut impliquer un généraliste et un autre spécialiste mais aussi deux spécialistes), la connaissance préalable du patient par les médecins (à la fois requérant et requis) est nécessaire au moment de la réalisation de l’acte. En revanche, la télé-expertise n'exige pas un échange vidéo mais elle suppose un échange en direct (synchrone) ou en différé entre deux praticiens via une messagerie sécurisée, déjà utilisée par 50 % des praticiens libéraux.
Quels tarifs ?
Les téléconsultations seront facturées aux mêmes tarifs que les consultations classiques de visu (25 à 30 € selon les cas). Les règles de prise en charge sont les mêmes que pour une consultation classique : 70 % pour la part Sécu et 30 % pour la complémentaire ou 100 % pour les soins concernant des ALD. Les règles sont identiques aussi pour l'application du tiers payant intégral (ALD, maternité, CMU-C, ACS). La carte Vitale ne pouvant être lue à distance, le médecin pourra réaliser une feuille de soins en mode dégradé.
Pour la télé-expertise, l'avenant prévoit deux niveaux de tarifs : pour le praticien requis, ce sera 12 euros par acte pour le premier niveau, par exemple la lecture d'un fond d'œil (dans la limite de 4 actes par an, par médecin, pour un même patient) et 20 euros par acte pour le niveau 2, comme la surveillance d'une plaie chronique (dans la limite de 2 actes par an pour un même patient). Le médecin requérant sera rémunéré à hauteur de 5 € par télé-expertise de niveau 1 et 10 € par acte de niveau 2 (dans la limite de 500 € par an et par patient).
Quelles aides forfaitaires ?
Pour accompagner l'achat des équipements nécessaires (appareils médicaux connectés et abonnements à un service sécurisé de téléconsultation), une aide forfaitaire sera versée aux médecins, via l’ajout d'un nouveau volet au forfait structure, valorisé jusqu'à 525 euros.
Quel calendrier ?
La téléconsultation accessible à tous démarre dès le 15 septembre.
Pour la télé-expertise, le déploiement est programmé en deux étapes : à partir du 1er février 2019 pour certains patients (ALD, maladies rares, patients en zones sous denses n'ayant pas de médecin traitant, résidant en EHPAD et détenus) et en 2020 pour l’ensemble des patients (en fonction du bilan d'étape).
Quelle évaluation ?
L'observatoire des mesures conventionnelles suivra le déploiement de cette nouvelle pratique et fera évoluer l'avenant au besoin. La loi Sécu 2 018 a posé quelques objectifs : 500 000 actes de télémédecine en 2019, un million en 2020 et 1,3 million en 2021.
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