LE QUOTIDIEN : Vous êtes chargé du PLFSS à l'Assemblée nationale. En santé, les promesses de campagne sont-elles tenues ?
Dr OLIVIER VERAN : Nous sommes en tout début de mandat et c'est le premier PLFSS. Mais ce budget suffit déjà pour montrer honnêtement que plusieurs engagements sont tenus. La généralisation de la télémédecine, cela faisait 15 ans qu'on en parlait ! J'avais même coutume de dire que la seule innovation en télémédecine serait de la financer ! C'est fait, cette pratique entre dans le droit commun.
La révolution de la prévention ? Le paquet de tabac sera porté à 10 euros, comme promis, c'est voté. L'extension de la vaccination obligatoire est une autre mesure de prévention courageuse, pas évidente à prendre, qui a été décidée d'emblée.
Sur l'innovation, autre engagement, l'article 35 du PLFSS montre que la donne a changé. Enfin, on tient compte du fait qu'on ne peut pas tout régir par la loi, ceintures et bretelles, et que le fait d'imposer aux professionnels des modèles conçus par les administrations ne marche pas. On fait l'inverse : on laisse émerger l'innovation, on l'accompagne, on la finance et on évalue. Cet article permettra par exemple de financer des pratiques avancées avec des infirmières cliniciennes, si les médecins le souhaitent.
N'oublions pas enfin la promesse d'un ONDAM (dépenses de santé) à 2,3 % (sur la durée du quinquennat en moyenne, NDLR). C'est exactement le taux retenu, il n'y a pas eu de mensonge. Et sur les 15 milliards d'euros d'économies en cinq ans, on en fait quatre dès 2018…
Sur le tiers payant généralisé, on a perçu quelques tâtonnements du ministère de la Santé en début de mandat. Quant à la promesse de zéro reste à charge, c'est flou, Agnès Buzyn parle de « panier de soins standard »…
L'engagement présidentiel sur le tiers payant « généralisable » sera tenu.
Quant à l'objectif de reste à charge zéro pour les soins prothétiques et les lunettes, les travaux avaient déjà démarré. On n'attendra pas 2022. Emmanuel Macron a toujours dit qu'on ne transigerait pas sur la qualité du produit sur la partie « soin ». Mais si on prend l'exemple de l'optique, ce n'est pas à la solidarité nationale de payer des montures Chanel ! Que des montures solides soient prises en charge oui, mais l'effort devra porter d'abord sur les verres, par exemple des verres progressifs. On ne rognera pas sur la qualité de la partie santé.
Le gouvernement ne parle plus de la généralisation de la vente à l'unité des médicaments. Cette promesse est-elle aux oubliettes ?
Cela relève moins du législateur que d'une nouvelle organisation. J'ai toujours dit aux syndicats professionnels que la vente à l'unité faisait sens sur des traitements de courte durée, des anti-inflammatoires par exemple. En revanche, dispenser à l'unité des traitements de trois mois pour des maladies chroniques, c'est moins pertinent. C'est ce travail qu'il faut conduire. J'ai toujours exprimé à titre personnel des réserves sur le plan technique, c'est un grand chambardement.
La grande réforme de l'hôpital est-elle encore d'actualité ?
La ministre est au four et au moulin, dans les territoires. Nous sommes partis tambour battant mais certaines choses mettront plus de temps.
Sur l'hôpital, l'idée est de réduire la part de tarification à l'activité (T2A). Partout où elle ne fait pas sens, lorsque les effets pervers sont supérieurs aux effets positifs, on la supprimera. Je renvoie à nouveau vers l'article 35 qui permettra de financer à l'épisode de soins ou au parcours pour les maladies chroniques. On va commencer à payer le soin autrement.
L'hôpital a absorbé beaucoup de réformes, il ne doit pas être braqué. Je partage totalement la sensibilité de la ministre. L'autonomie des établissements par exemple, ce n'est pas un chantier qui se fait en quatre mois.
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