Cette année, le prix Nobel de Physiologie et de Médecine a été décerné aux chercheurs américains David Julius et Ardem Patapoutian pour leur découverte des récepteurs du toucher à la température et à la pression.
Alors que les travaux portant sur les différentes cellules et fibres nerveuses impliquées dans la transmission des sensations tactiles ont occasionné un prix Nobel en 1944, il y a une dizaine d’années, les mécanismes de conversion d'informations thermiques et mécaniques en stimuli nerveux apparaissaient, quant eux, encore mystérieux.
Or, c’est cette énigme qu’ont contribué à élucider David Julius et Ardem Patapoutian. « Les découvertes révolutionnaires des [...] lauréats du prix Nobel de cette année nous ont permis de comprendre comment la chaleur, le froid et la force mécanique peuvent initier les impulsions nerveuses qui nous permettent de percevoir et de s'adapter au monde qui nous entoure », avance le comité Nobel.
Découverte des récepteurs thermiques par David Julius
En fait, c’est surtout à David Julius que doit être attribuée la découverte des récepteurs thermiques du toucher.
Son idée a été, à la fin des années 1990, d’utiliser la capsaïcine, alcaloïde issu du piment à l’origine de la sensation de chaleur associée à ce condiment. Son hypothèse : les neurones du toucher capables de réagir à la douleur et à la chaleur devaient exprimer un gène codant pour un récepteur sensible à la capsaïcine.
Or, après des années de travail,« un gène capable de rendre les cellules sensibles à la capsaïcine a finalement été trouvé » puis associé à un canal ionique thermosensible, baptisé TRPV1, activé non seulement par le piment mais aussi par des températures perçues comme douloureuses.
« La découverte de TRPV1 a été une percée majeure ouvrant la voie à la découverte de récepteurs [...] supplémentaires » activés par divers niveaux de températures, s’enthousiasme le Comité Nobel.
En particulier, après la capsaïcine, le menthol, associé cette fois à une sensation de fraîcheur, a permis de révéler un récepteur activé par de basses températures. « Indépendamment l'un de l'autre, David Julius et Ardem Patapoutian ont utilisé la substance chimique menthol pour identifier TRPM8 », résume le Comité Nobel.
Découverte des récepteurs mécaniques par Ardem Patapoutian
Si Ardem Patapoutian a ainsi aussi contribué à l'identification de canaux thermosensibles, il est surtout le principal découvreur des capteurs mécaniques du toucher, et en particulier des canaux Piezo1 et Piezo 2 ("pression" en grec).
A noter que ce dernier récepteur s’est d’ailleurs avéré « d’une importance critique » dans la proprioception. « D'autres travaux, ont en outre démontré que les canaux Piezo1 et Piezo2 régulent d'autres processus physiologiques importants, notamment la pression artérielle, la respiration et [la miction] », avance l’instance.
Comprendre la chaleur des contacts humaine en temps de Covid-19
Au total, les travaux de Julius et Patapoutian ont donc contribué non seulement à élucider diverses sensations de toucher mais aussi à expliquer diverses « fonctions physiologiques qui dépendent de la détection de la température ou de stimuli mécaniques ». D’où de nombreuses applications thérapeutiques potentielles. « Ces connaissances sont [d’ores et déjà] utilisées pour développer des traitements contre un large éventail de pathologies, dont les douleurs chroniques », souligne le comité Nobel.
Mais ce prix Nobel de Médecine ne s’explique sans doute pas que par les perspectives thérapeutiques ouvertes grâce à Julius et Patapoutian. D’après un membre du comité qui s’est exprimé ce matin après l’annonce des lauréats, si la plus haute distinction scientifique a été attribuée, en pleine pandémie de Covid-19, à des experts du toucher, c'est parce que la crise sanitaire a rappelé l'importance de ce sens. Dans un contexte marqué par la distanciation sociale, « la sensation de chaleur [et de proximité] que nous échangeons pendant une accolade nous a [particulièrement] manquée », estime-t-il.
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