La metformine, à la fois bon marché et largement disponible, administrée dans les premiers jours d'une infection au Sars-CoV-2, réduirait de 40 % le risque de développer un Covid long au cours des 10 mois suivants, selon l'étude américaine Covid-out publiée dans « The Lancet Infectious Diseases ».
C'est la première fois qu'un essai de phase 3 randomisé et contrôlé par placebo teste l'efficacité d'un médicament pris en prévention du Covid long, souligne un communiqué du « Lancet ». Les chercheurs précisent que l'antidiabétique n'a pas été testé chez des personnes présentant un Covid long : l'étude suggère un effet en préventif, mais pas en curatif.
L'étude, qui évaluait dans un premier temps versus placebo l'effet de plusieurs médicaments (metformine, ivermectine, fluvoxamine), pris seuls ou en association pendant 14 jours, sur la survenue d'une forme sévère de l'infection, s'est poursuivie pendant 10 mois. Avaient été incluses des personnes à risque plus élevé de Covid sévère en raison d'un surpoids ou d'une obésité, âgées d'au moins 30 ans, testées positives au Sars-CoV-2 dans les trois jours précédents. Les premiers résultats de l'analyse sur l'effet des molécules sur la phase précoce ont été publiés précédemment.
Un effet présumé sur la réplication virale
Ce deuxième travail totalise 1 126 personnes : 564 ayant reçu de la metformine et 562 ayant reçu un placebo. La metfomine avait été administrée pendant 14 jours, avec une titration les six premiers jours pour arriver à 1 000 mg deux fois par jour les huit jours suivants. Les personnes étaient suivies jusqu’à 10 mois par des questionnaires auto-remplis tous les 30 jours. Dans ce questionnaire, les participants devaient indiquer si un professionnel de santé avait retenu le diagnostic de Covid long.
À 10 mois, 35 des participants qui avaient pris de la metformine ont reçu un diagnostic de Covid long, soit 6,3 % (35/564), contre 58 pour le groupe placebo, soit 10,4 % (58/562), ce qui représente une réduction de 40 % du risque. L'étude révèle également que le médicament antiparasitaire ivermectine, qui a fait l'objet de désinformation tout au long de la pandémie, ainsi que l'antidépresseur fluvoxamine n'ont pas empêché de contracter des Covid longs.
L'équipe avait précédemment montré que la metformine réduisait de plus de 40 % le risque de visites aux urgences, d'hospitalisations et de décès à la phase précoce. « Des études antérieures avaient montré que la metformine empêche la réplication du virus Sars-CoV-2 in vitro, ce qui est cohérent avec les prédictions de notre modèle mathématique, donc ce pourrait être ce qui explique la réduction à la fois des cas de Covid sévère et de Covid long observés dans cet essai », explique David Odde, ingénieur biomédical à l'université du Minnesota et co-auteur.
Les auteurs concèdent néanmoins des limites à leur travail : il ne permet pas de dire si ces résultats sont généralisables à des populations de corpulence normale ou plus jeunes ; le diagnostic de Covid long a pu être imparfait, car la définition de l'entité s'est révélée changeante.
Une place à préciser
S'ils étaient confirmés, ces résultats seraient « potentiellement marquants » pour la recherche sur le Covid long, a réagi dans un commentaire Jeremy Faust, un médecin de la Harvard Medical School non impliqué dans l'étude. Selon l'Organisation mondiale de la santé, le Covid long affecte une personne sur 10 ayant été infectée.
Frances Williams, professeure d'épidémiologie au King's College de Londres, relève toutefois que 564 personnes ont dû prendre ce médicament pour « éviter 23 cas hypothétiques » de Covid long. Ce qui veut dire que « 24 personnes ont pris de la metformine pour prévenir un cas de Covid long ».
La place dans la stratégie thérapeutique nécessite d'être précisée, d'autant que la pandémie a changé de visage. Le variant Omicron est moins pourvoyeur de Covid long que les souches précédentes, même s'il a été inclus en partie dans l'essai (mené entre décembre 2020 et janvier 2022). Pour les auteurs, il est aussi nécessaire d'évaluer ces résultats, « parmi les personnes vaccinées et ayant eu des rappels et les personnes ayant déjà eu une infection au Sars-CoV-2 ».
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