C’est devant une salle comble qu’ont été présentées les nouvelles recommandations sur la maladie de Lyme, lors des 20e journées nationales d’infectiologie (Lyon, 5-7 juin).
24 sociétés savantes
Prévention, diagnostics différentiels, explorations biologiques, antibiothérapie, etc. Loin des polémiques, ces nouvelles guidelines, signées par 24 sociétés savantes (dont le Collège national des généralistes enseignants et le Collège de la médecine générale) se veulent avant tout « des points de repère pour les praticiens », explique le Pr Pierre Tattevin, président de la SPILF (Société de pathologie infectieuse de langue française). Mais en balayant la notion de SPPT (syndrome persistant polymorphe après possible piqûre de tique), proposée il y a à peine un an par la HAS, elles risquent de ne pas plaire à tout le monde…
Exit le SPPT… vive le SSP !
En juin 2018, la HAS avait en effet publié des recommandations qui reconnaissaient à mot couvert la notion de Lyme chronique, pudiquement nommée alors SPPT. Ce choix avait alors conduit la SPILF, pourtant fortement impliquée dans le projet, à ne pas valider le document. L’Académie de médecine et le CNGE s’étaient aussi montrés critiques, jugeant cette notion scientifiquement infondée.
Sans surprise, la nouvelle feuille récuse cette entité. Les auteurs reconnaissent certes l’existence de patients présentant des symptômes persistants au décours d’une borréliose documentée ou suspectée et leur consacrent tout un chapitre. Mais ils refusent de les enfermer sous une bannière infectieuse.
Maladies neurologiques, auto-immunes, psychiatriques, etc. Selon six études différentes, chez ces patients « un autre diagnostic est finalement porté dans 80 % des cas ». D’où l’importance d’une démarche diagnostique minutieuse. En l’absence de signe objectif, « le diagnostic de symptômes somatiques persistants (SSP) doit être évoqué. Reconnu de longue date sous diverses appellations, ce trouble est caractérisé par des symptômes physiques chroniques et invalidants ne pouvant être totalement attribués à une cause lésionnelle, et des symptômes cognitifs et comportementaux spécifiques », précisent les experts. « Il ne doit pas être présenté comme un diagnostic d’élimination mais bien comme un diagnostic positif. »
Doxycycline en 1re intention
Hormis ce point d’achoppement, les principales nouveautés concernent le traitement. Que ce soit pour l’érythème migrant (EM) ou la neuroborréliose, la nouvelle feuille de route positionne clairement la doxycycline en première intention là où la HAS laissait le choix avec l’amoxicilline pour l’EM et la ceftriaxone pour la neuroborréliose. « On sait maintenant que la doxycycline est aussi efficace que la ceftriaxone au niveau neurologique, y compris en cas d’atteinte du système nerveux central, tout en évitant les injections », explique le Pr Tattevin. Par ailleurs, en termes d’antibiorésistance, la doxycycline « fait moins de dégâts ».
Les recos appellent aussi à ne pas répéter ou prolonger le traitement chez les patients dont les symptômes persistent après un traitement adéquat. Là encore, les auteurs s’appuient sur la littérature récente, cinq essais randomisés « ayant mis en évidence l’absence de bénéfice de l’antibiothérapie dans ce contexte, que ce soit sur la qualité de vie, les douleurs ou la fatigue ».
De même, aucune antibiothérapie ni sérologie n’est justifiée en cas de simple piqûre de tique, « le risque de Lyme étant <5 %, même en zone de forte endémie et après fixation prolongée de la tique ».
Les sérologies confortées
Enfin, concernant les explorations biologiques, les spécialistes confirment la fiabilité des deux tests sérologiques, à faire en deux temps : ELISA puis, en cas de positivité, confirmation par immuno-empreinte (Western Blot), de meilleure spécificité. Au stade d’EM, aucune sérologie n’est conseillée « car la clinique est pathognomonique et la sérologie généralement négative à ce stade ».
Quid des recos de la HAS ?
Ces nouvelles recommandations invalident-elles celles de la HAS et remettent-elles en cause la création des centres de références prévus pour prendre en charge les fameux patients SPPT ? Alors qu’elles ont été commanditées par le directeur général de la santé, la question peut se poser. Mais il semble qu’il n’en soit rien. « La DGS a lancé les appels d’offre pour les centres de référence, le jury est constitué et les 5 centres devraient être choisis d’ici juillet », indique le Pr Dominique Le Guludec, présidente de la HAS. À partir de là, la Haute autorité devrait ré-ouvrir les groupes de travail planchant sur les recommandations, mais surtout pour « définir un protocole qui précise quels patients devront être adressés à ces centres, par qui et dans quel contexte ». La remise en cause du SPPT ne semble donc pas à l’ordre du jour du côté des autorités.
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