Pour le dépistage du cancer du col, il va y avoir une montée en charge du dépistage organisé pour une généralisation en 2018. Contrairement à ce qu’on a fait pour celui du sein ou du colon, le but est de compléter le dépistage « individuel » qui se fait déjà de façon importante (60 % des femmes concernées ont fait un frottis dans les 3 dernières années), en concentrant l'énergie et la logistique sur les femmes qui échappent au dépistage. C’est une stratégie qu’on pourrait dire de rattrapage.
Pour le dépistage du cancer du col, nous allons entamer les travaux pour aller vers le test HPV
Parallèlement nous allons entamer les travaux pour aller vers le test HPV qui est un test plus moderne mais qui a quand même ses écueils. Avec notamment des questions sur sa place chez les 25-35 ans (où la présence du HPV est très fréquente) ou sur l’acceptabilité de l’allongement de l’intervalle entre les tests de dépistage (5 ans contre 3 actuellement avec le frottis).
Pour le dépistage du cancer du sein, il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Ce n’est pas parce qu’un dispositif est perfectible qu’il est à interrompre ce qui était pourtant un des scénarios envisagés à l’issue de concertation citoyenne. Les études internationales montrent que le dépistage permet de diminuer la mortalité par cancer du sein de 15 à 20 %. Il faut aussi prendre en compte la morbidité et la qualité de vie. Enfin, le dépistage organisé a permis de gommer le critère d’éducation ou de revenus comme facteur discriminant de participation.
Cependant, il est clair qu’il faut qu’il y ait une rénovation de ce dispositif avec une meilleure prise en compte du niveau de risque et une meilleure information des patientes sur l’intérêt et les limites du dépistage et sur la prévention. Autant d’aspects pour lesquels nous avons proposé que le médecin généraliste reprenne une position centrale.
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Pour le cancer du côlon on arrive à la fin de la première campagne avec le test immunologique et on devrait bientôt avoir les premiers résultats de participation. On s'attend à ce que ceux-ci ne soient peut-être pas très élevés car on est encore en phase de montée en charge et que l’on n’envoie plus le test chez les gens pour des raisons de coût.
Vous mettez l'accent sur la prévention tertiaire, de quoi s'agit-il exactement ?
La prévention tertiaire correspond aux moyens qui existent pour éviter de faire un second cancer suite à un traitement pour un premier cancer. Potentiellement dans notre pays cela concerne 3 millions de personnes qui vivent avec ou après un diagnostic de cancer. Notre premier axe est ciblé sur le tabac. L'idée est de rendre plus systématique à la fois le repérage du tabagisme et l'accompagnement au sevrage au moment et aux endroits où les patients sont clairement identifiés comme ayant un cancer. Nous avons conçu plusieurs outils à destination des services de cancérologie, des médecins généralistes et des patients eux-mêmes de façon à ce que les interfaces se fassent bien et qu’il n’y ait pas de rupture dans cette chaîne d’identification, de mobilisation du patient et de proposition d’un accompagnement. Car on sait que l’accompagnement médical pendant le sevrage est un facteur de succès extrêmement important. Contrairement à ce que certains soignants peuvent penser de nombreuses études montrent que le moment de la prise en charge d'un cancer est finalement un bon moment de réceptivité pour les actions de prévention. En fait, non seulement c'est le bon moment mais c'est aussi un vrai service à leur rendre car en plus de diminuer leur risque de cancer, cela améliore aussi la tolérance des traitements, permet un meilleur état nutritionnel, etc.
De nombreuses études montrent que le moment de la prise en charge d'un cancer est finalement un bon moment de réceptivité pour les actions de prévention
Toujours en prévention tertiaire, il y a aussi l'activité physique qui peut désormais être prescrite et qui elle aussi est un facteur de meilleure tolérance des traitements et d'amélioration de la survie. Nous allons sortir cette année un rapport d'expertise de l'Inca sur les bénéfices de l'activité physique dans le cancer qui montre pour un certain nombre de cancers il n'est pas trop tard pour agir.
Avec l’avènement des chimiothérapies orales, la place des généralistes dans le parcours de soins du cancer est devenue centrale. Comment comptez-vous l’accompagner ?
Même si l’arrivée des immunothérapies – qui sont des traitements injectables — va faire revenir les patients à l’hôpital, il est clair que ce virage ambulatoire est inéluctable. On a donc de nouvelles interfaces à construire entre deux mondes qui ont besoin de s’apprivoiser. Dans cette optique, nous travaillons avec le Collège de la médecine générale et des oncologues pour identifier qui intervient dans les prises en charge et à quel moment, qui se retrouve en difficulté et à quel moment.
Avec le virage ambulatoire, il y a de nouvelles interfaces à construire entre deux mondes qui ont besoin de s’apprivoiser
Nous développons des outils spécifiques pour les généralistes pour leur permettre d’intervenir plus facilement et en meilleure connaissance chez leur patient atteint de cancer.
Nous travaillons aussi avec les établissements de santé sur la communication sortante, le courrier obligatoire, pour qu’il n’arrive pas 3 mois après la sortie du patient, le dossier communiquant de cancérologie pour que les généralistes puissent le consulter mais aussi y apporter leur connaissance du patient, etc.
Vous avez été saisi sur les soins de support. Pourquoi cette saisine ? Quel est l’enjeu ?
L’idée était de préciser le panier minimum de soins de support qui doit être « opposable » du point de vue du patient à l’établissement qui le prend en charge et de pouvoir ouvrir pour ces soins-là une discussion avec l’assurance maladie et le ministère sur leur prise en charge.
Cette saisine était aussi l’occasion de rappeler que la prise en charge de la douleur reste un des objectifs prioritaires dans la prise en charge des patients atteints de cancer, alors que nous avons noté un certain glissement ces dernières années sur ce point avec un recul dans la qualité des prises en charge anti douleur. Nous avons voulu repositionner très clairement ce type de soins de support dans ce qui est opposable aux établissements de prise en charge des cancers. Pour qu’au moment où le patient repart à domicile il ait une prise en charge de qualité de sa douleur avec des consignes très claires sur les adaptations de doses, les antalgiques à prescrire en priorité, etc.
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