À l’évidence, la vitamine D n’a pas fini de faire parler d’elle. Après ses propres recommandations de 2011 et celles de la HAS en 2013 limitant les conditions de remboursement de son dosage, le Groupement de recherche et d’intervention sur les ostéoporoses (GRIO) prend une nouvelle fois la parole pour alerter sur les modalités d’administration de cette vitamine. Trop d’un coup et de manière espacée ferait moins bien que des doses plus faibles et administrées quotidiennement. Selon le Pr Jean-Claude Souberbielle (laboratoire de physiologie, CHU Necker-Enfants malades, Paris) qui intervenait le 19 janvier dernier à la journée scientifique du GRIO, les recommandations de 2011 devraient évoluer dans ce sens, à la lumière des dernières études sur les modes d’administration de la vitamine D.
Le risque des très fortes doses annuelles
La première d’entre elles à avoir donné l’alerte date de 2010. Publiée dans le Jama, randomisée et contrôlée, elle est menée sur plus de 2 000 femmes australiennes âgées d’au moins 70 ans auxquelles on administre, pendant quatre ans, soit 500 000 UI de vitamine D3 une fois/an, soit un placebo. L’objectif était de tester l’efficacité d’une forte dose d’un coup capable d’améliorer l’observance – donc le risque – de chutes et de fractures. Au terme des quatre années d’étude, « il y a eu davantage de chutes dans le groupe traité. Ce fut la première étude qui avertissait sur le risque des très fortes doses administrées chez le sujet âgé de manière espacée », explique le spécialiste.
Le rôle de l’hormone parathyroïdienne
Beaucoup plus récemment, une équipe finlandaise teste l’administration de 100 000 UI vs 200 000 UI de vitamine D3 vs un placebo tous les trois mois chez des femmes ménopausées (Välimäki, Clinical Endocrinology, 2016). Le taux de 25(OH)vitD3 est mesuré juste avant chacune des prises, et sept jours plus tard, au moment théorique où la concentration est la plus élevée. Après 200 000 UI, le taux de vitamine D s’accroît davantage à J7 qu’en cas de prise de 100 000 UI.
Mais trois mois plus tard, avant la dose suivante, la concentration dans les deux groupes traités est la même. Les auteurs concluent à l’intérêt de réduire l’intervalle entre les bolus de vitamine D plutôt que d’en augmenter la dose. D’autant que, comme le souligne le Pr Souberbielle, « les vagues de concentrations plasmatiques induisent une augmentation du taux d’hormone parathyroïdienne à l’origine d’une résorption osseuse contre-productive sur l’os ! » Alors, quel rythme d’administration de vitamine D permettrait de maintenir à stabilité le taux d’hormone parathyroïdienne ? Parmi tous les travaux menés sur le sujet, selon le spécialiste, « l’espacement des doses ne devrait pas excéder un mois pour stabiliser le taux hormonal ».
Sur la question de la posologie, une étude suisse récente (Bischoff-Ferrari, Jama Int Med, 2016) a comparé l’effet de doses mensuelles de 24 000 UI de vitamine D3 et de 60 000 UI chez 200 femmes et hommes de 70 ans et plus, vivant en logements communautaires et ayant été victimes d’une chute dans l’année écoulée. Au bout d’un an, davantage de chutes ont été observées dans le groupe à fort dosage.
Une dose journalière, l’idéal
Et comme pour vérifier l’hypothèse d’un effet bénéfique de la réduction de l’espacement des doses, une autre étude a été menée, dans des conditions similaires, chez des patients aux antécédents de fracture de hanche, aux mêmes posologies mais administrées quotidiennement cette fois : 800 UI/j vs 2000 UI/j. Au bout d’un an, le différentiel en termes de chutes n’était pas significatif, mais l’avantage cette fois était aux fortes doses quotidiennes qui réduisent le taux de réhospitalisations. Une précédente méta-analyse avait déjà pointé en 2011 les bénéfices d’une administration vitaminique journalière sur la force musculaire des sujets âgés. Même modestement, elle était améliorée sur les critères objectifs du « up and go test ».
Reste que pour l’instant, hormis le ZYMAD plutôt destiné au nourrisson, « les formes pharmaceutiques dont on dispose en France sont au final peu adaptées à ces nouvelles pratiques cliniques ». En attendant la mise à disposition de nouvelles galéniques, « le mieux est donc d’administrer les doses les plus faibles quand on utilise des bolus ».
Dans tous les cas, quelle que soit la dose ou même le rythme, « administrer de la vitamine D3 est toujours plus efficace que ne rien faire ! » Seuls les très forts apports en bolus de 200 000 UI doivent être évités.
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