Les équipes du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (Institut Pasteur, AP-HP) ont développé un outil numérique de surveillance épidémiologique de la santé mentale. Les résultats auxquels il a abouti sont publiés dans NPJ Mental Health Research.
En Île-de-France, entre août 2017 et février 2020, et entre mars 2020 et juin 2022, 14 023 hospitalisations avaient comme motif une tentative de suicide (TS) identifiée. Parmi ces TS (âge moyen de 38 ans), deux tiers concernaient des femmes, et particulièrement des femmes jeunes âgées de 8 à 25 ans, révèle l’étude publiée dans le NPJ. Ces résultats viennent confirmer des données récemment rapportées dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire sur la détérioration de la santé mentale des jeunes. Aujourd’hui, en France, le suicide est la 2e cause de mortalité chez les 15-24 ans.
Les femmes particulièrement touchées
Afin de mieux surveiller la santé mentale de la population générale, et notamment pendant les crises comme le Covid, les équipes du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de Robert-Debré ont développé un outil numérique de suivi des facteurs de risque exposant à la TS. L’objectif : mieux repérer des individus à risque et suivre les TS. En analysant des millions de données relevées dans des dossiers d’hospitalisation au moyen d’un algorithme de traitement de textes (NLP pour natural language processing), les auteurs ont réussi à décrire l’évolution de la tendance suicidaire avant et pendant la crise Covid et à dégager des indicateurs de surveillance corrélés à la tendance suicidaire. Les données de santé ont été collectées via l’entrepôt de données de l’AP-HP.
Parmi les 14 023 hospitalisations pour TS, la majorité d’entre elles a eu lieu durant la période 2020-2022 (57,5 versus 42,5 % pour la période 2017-2020), avec une augmentation de la tendance suicidaire après la flambée de Covid en population générale. Cette augmentation concernait particulièrement les filles de 8-17 ans et les jeunes femmes de 18-25 ans. Concernant les caractéristiques des hospitalisations pour TS, l’overdose intentionnelle de médicaments était très prévalente chez les femmes.
Les violences domestiques, physiques et sexuelles
À propos des facteurs de risque, le Pr Richard Delorme, chercheur au sein de l’unité de génétique humaine et fonctions cognitives à l’Institut Pasteur et chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital Robert-Debré AP-HP, relève « de manière alarmante, que les violences domestiques, physiques et sexuelles sont des facteurs de risques régulièrement mentionnés dans les comptes rendus d’hospitalisation des femmes ». Un constat qui invite à prendre en considération les violences faites aux femmes, notamment les jeunes filles, en particulier depuis la pandémie. Si les violences étaient retrouvées dans les dossiers avant et après la pandémie, une nette augmentation apparaît après la crise Covid. Les scientifiques notent d’autres facteurs de risque comme l’histoire personnelle de TS et l’isolement social chez les femmes comme chez les hommes, indépendamment de la période Covid.
Ils concluent à un impact majeur de la pandémie sur la santé mentale des femmes, et relèvent une franche augmentation des TS immédiatement après la pandémie. Cependant, le caractère observationnel de l’étude ne permet pas d’établir des liens de causalité et les auteurs encouragent à conduire une étude prospective.
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