Diabète gestationnel : plus fréquent en été ... mais pas si évident à diagnostiquer

Publié le 15/09/2016
visite d'une sage-femme pour le suivi d'un diabète gestationnel

visite d'une sage-femme pour le suivi d'un diabète gestationnel
Crédit photo : BURGER/PHANIE

Dans des registres différents, deux études sur le diabète gestationnel font l'actualité de ces derniers jours. 

La première est une étude suédoise menée par le Dr Anastasia Katsarou de l’université de Lund qui démontre que le taux de diabète gestationnel augmenterait durant les mois d’été à cause de la hausse des températures. Ces travaux ont été présentés au congrès EASD qui se tient en ce moment à Munich. Dans le même temps, le BMJ publie le 14 septembre une méta-analyse basée sur plusieurs études observationnelles sur le sujet. Celle-ci conclut qu’il est nécessaire de trouver un seuil fiable afin de diagnostiquer ce type de diabète qui peut être lourd de conséquences et pour la mère et pour l’enfant.

La température monte, la glycémie aussi

L’intérêt des travaux dirigés en Suède était d’observer la proportion de tolérance au glucose et de diagnostic de diabète gestationnel en fonction des saisons. Les données incluant 11 538 femmes qui ont accepté de se soumettre aux tests HGPO à 75 g de glucose à 28 semaines de grossesse entre 2003 et 2005 dans le sud du pays. Les résultats des tests ont été regroupés selon les mois et les saisons et un modèle statistique a été réalisé.

Au total, les spécialistes ont diagnostiqué un diabète gestationnel à 4,2 % des participantes. La fréquence de diabète variait de 2,9 % en mars à 5,8 % en juin et de 3,3 % au printemps à 5,5 % en été. Ces différences se sont révélées significatives. Si on ajuste les calculs en prenant en compte l’âge des futures mamans, les scientifiques ont estimé que les mois d’été (de juin à août) étaient associés à une hausse du niveau de glucose et à une augmentation de 51 % de la fréquence de diabète gestationnel par rapport aux autres saisons. De plus, « une association avec la température ambiante a été démontrée », concluent les auteurs. Afin d’expliquer ce lien, ils émettent l’hypothèse que la température induirait des changements dans le flux sanguin périphérique, ce qui aurait des effets sur la composition du sang contenu dans les capillaires sanguins.

Mais à partir de quel niveau de glucose peut-on parler de diabète gestationnel ?

Des chercheurs basés au Royaume-Uni et en Irlande se sont penchés sur la question et ont examiné le lien entre le taux de glucose dans le sang des femmes enceintes qui n’avaient pas de diabète avant leur grossesse et les problèmes qui pouvaient survenir à la naissance pour le bébé comme pour la mère.

Leur méta-analyse comprend 23 études qui impliquent 200 000 femmes et leur enfant venant d’Asie, d'Australie, d'Europe et d'Amérique du Nord. Les résultats montrent une association entre les niveaux de glucose et le recours à la césarienne, la macrosomie et la dystocie de l’épaule. En revanche, il n’y a aucune preuve tangible d’effet de seuil. Ces travaux prouvent qu’il n’est pas évident d’établir un diagnostic de diabète gestationnel selon un taux de glucose précis.

Les auteurs suggèrent « qu’il faut travailler sur le meilleur seuil possible pour équilibrer la balance entre les bénéfices avec la prévention des complications en détectant et traitant les femmes avec un taux de glucose élevé et les coûts occasionnés ainsi que du problème de surtraitement chez certaines femmes ».

En France, la société francophone du diabète (SFD) et le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) ont préconisé en 2010 un dépistage ciblé chez des femmes présentant au moins un facteur de risque (avoir plus de 35 ans, un antécédent de diabète gestationnel ou d’enfant macrosome, un IMC supérieur à 25 kg/m2, ou des antécédents de diabète chez des personnes apparentées au 1er degré). Pour les femmes concernées, le dépistage doit dans l’idéal être fait via une glycémie à jeun au 1er trimestre, le seuil étant fixé à 0,92 g/L. Entre 24 et 28 semaines d’aménorrhée, l’HGPO avec 75 g de glucose avec mesures de la glycémie à 0,1 et 2 heures après la prise est également recommandée.

Pourtant, le pourcentage de femmes développant un diabète gestationnel qui ne serait pas détecté via ce dépistage ciblé pourrait potentiellement atteindre 50 %. De plus, ces recommandations ne semblent pas si évidentes à suivre. Une étude publiée par le BEH en mars dernier montre qu'une proportion non négligeable de femmes présentant des risques ne sont pas dépistées. 

 

Roxane Curtet

Source : lequotidiendumedecin.fr