Avec une prévalence comprise entre 2 et 5 %, on estime que les anévrismes intracrâniens concernent au bas mot 2 millions de personnes. Les formes familiales (deux membres de la famille au 1er degré) ne représentent que 10 à 12 % des cas. La plupart des formes sont sporadiques et beaucoup d’anévrismes sont découverts incidemment, à l’occasion d’examens d’imagerie médicale.
Si la pathologie est fréquente, elle demeure assez terrifiante puisqu’associée au risque d’une rupture brutale. Pour autant, le Pr Hubert Desal, neuroradiologue (CHU de Nantes) qui est intervenu au 46e congrès de la Société française de neuroradiologie (27 au 29 mars, Paris), se veut rassurant : « On ne peut plus dire aujourd’hui, comme je l’entendais il y a 20 ans, que cela équivaut à une bombe à retardement dans la tête. Nous passons notre temps à rassurer les patients dont certains, suivis depuis des années, vont parfaitement bien. Un anévrisme n’est pas une image qui va grossir jusqu’au point de rupture. » Avec une incidence de 10 hémorragies pour 100 000 patients, la grande majorité des anévrismes ne saigneront jamais.
5 000 interventions par an
Cependant, compte tenu du mauvais pronostic des ruptures d’anévrismes, la question de l’intervention se pose. 5 000 anévrismes sont opérés chaque année. L’intervention ne fait aucun doute lorsqu’il y a déjà eu une rupture. Mais préventivement ? Le traitement est en effet associé à un risque de moralité de 1 % et 3 % de morbidité.
Pas d’argument scientifique
Aujourd’hui, l’indication d’une intervention est délicate. Des scores pronostics (PHASES) peuvent aider à définir le risque pour chaque patient et proposer le cas échéant une intervention par neuroradiologie interventionnelle ou chirurgicale préventive. Ces scores, basés sur des données rétrospectives, prennent d’abord en compte le patient lui-même, avec ses antécédents personnels et familiaux ainsi que ses comorbidités.
Les indications opératoires s’appuient donc sur un faisceau de critères : « être une femme, être jeune (longue espérance de vie), souffrir d’hypertension artérielle, fumer. La topographie de l’anévrisme (circulation postérieure), sa taille (plus il est gros, plus il a de risque de saigner), sa forme (irrégularités) sont aussi des paramètres pris en compte, mais qui ont leurs limites. Tous ces arguments sont uniquement experience-based et manquent de bases scientifiques rigoureuses », argumente le Pr Desal.
à ce jour, il n’existe pas de biomarqueur ou d’outil diagnostique sensible et spécifique permettant de prédire l’évolution de l’anévrisme et son risque de rupture.
Pour mieux comprendre la physiopathologie des anévrismes intracrâniens et obtenir des réponses validées et scientifiques, le Pr Hubert Desal et l'institut du Thorax à Nantes ont lancé en 2015 le réseau de recherche ICAN, qui a pour objectif de collecter un ensemble de données cliniques (âge, antécédents médicaux, tabagisme, etc.), biologiques, génétiques et d’imagerie chez un grand nombre de patients porteurs d’anévrismes intracrâniens. Ce travail s’est d’abord intéressé aux formes familiales, puis s’est étendu aux formes sporadiques.
Aujourd’hui, le réseau ICAN, qui fédère 30 centres de neuroradiologie interventionnelle en France, compte 3 000 patients porteurs d’anévrismes. « Pour mener notre travail, on s’aide de méthodes modernes de recherche en construisant des “entrepôts de données” afin de déterminer des critères prédictifs de rupture et, au final, mieux cibler les patients à opérer préventivement », détaille le Pr Desal.
La fragilité de la paroi
Le neuroradiologue vise encore plus loin. Il se dit prêt à lancer le programme hospitalier de recherche clinique UCAN (prolongement d’ICAN). Cette fois-ci, le but est de déterminer un ou des marqueur(s) de la fragilité de la paroi de l’anévrisme (qui pourraient être annonciateurs de la rupture). Cette recherche se fera en explorant les anévrismes grâce à une IRM avec produit de contraste. En plus de centres français, le programme UCAN devrait intégrer des organismes européens des Pays-Bas et d’Allemagneeuro.
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